Vous nous rabattez les oreilles avec les « choix difficiles » que vous avez à faire. Ils ne sont difficiles que parce que vous êtes conscients, vous et votre ineffable trio économique, que vous avez adopté le fameux « catéchisme néo libéral » et que vous voulez en appliquer les injonctions coûte que coûte et le plus vite possible. Vous avez décidé, comme certains de vos prédécesseurs d’ailleurs, de l’imposer au peuple. Pour cela vous devez trahir certains de vos engagements de campagne, comme la fin de la taxe santé, le maintient des niveaux de financement de l’éducation et de la santé et introduire des éléments dont vous n’aviez jamais parlé. En passant, comment voulez-vous que cette chère population continue à voter quand les programmes ne veulent rien dire ? Mais revenons à nos moutons….à tondre.
Les baisses d’impôt sont la base ultime du catéchisme néo libéral. Soit disant pour que les citoyenNES aient un peu plus d’argent dans leurs poches. Et pour les plus sérieux avec cette explication, pour qu’ils et elles aient plus de capacité à faire les choix économiques qui les concernent. FOUTAISE ! Comment une baisse d’impôt sur le revenu qui ajoute quelques dollars dans la poche peut-elle faire la différence dans la vie ? Surtout que la contre-partie existe toujours dans votre fameux budget : les tarifs et taxes de vente vont augmenter pour compenser. Les choix difficiles, Monsieur le Premier ministre, c’est cette couche de la population qui va devoir les faire, et pas une fois par année, tous les jours. Qu’allons-nous laisser tomber pour assumer les hausses annoncées et celles que vous nous promettez pour l’an prochain en plus ? C’est une compatibilité à sens unique : ceux et celles qui profitent des baisses d’impôt sont ceux et celles qui en ont le moins besoin et pour certainEs c’est une contribution de l’État à leur patrimoine déjà confortable. 1% de 100,000$ et 1% de 10,000$ ne donne pas le même résultat…Il n’y a pas assez de riches au Québec pour qu’il vaille la peine de leur imposer quelque hausse d’impôt que ce soit ? Cette semaine, le Journal de Joliette dénombrait 43 millionnaires dans la seule région de Lanaudière !
La contrepartie de cette assertion c’est que l’implication de l’État dans les services à la population doit être ramenée à sa plus stricte expression. Et tout ce qu’il ne fera pas sera pris en charge par les entreprises privées selon leurs coûts et exigences . Pour ce qui ne les intéressera pas parce que pas assez lucratif, la charité et certaines formes de solidarité immédiate devront s’en charger. C’est ce que vous nous annoncez pour le prochain budget. Nous savons déjà, et votre gouvernement aussi, ce que cela veut dire. Nous avons le modèle sous les yeux chez nos voisins américains qui, en passant nous envie, et nous l’avons vécu dans un passé pas si lointain.
Ces politiques mènent au développement d’écarts de richesses scandaleux mais surtout carrément improductifs. Ce ne sont pas des vilainEs de gauche qui le disent mais bien le FMI et l’OCDE entre autre. Même M. Mark Carney, ex-gouverneur de la Banque du Canada, maintenant à celle d’Angleterre, le souligne et le condamne avec vigueur. Ce chantre du capitalisme et de l’économie de marché ne peut pas être taxé d’irresponsabilité ou de gauchisme. Les politiques d’austérité tuent la croissance, engendrent la pauvreté et à terme, mènent à de sérieux troubles sociaux.
Bris du contrat social
Il s’agit d’un bris très clair de notre contrat social. Au moment de la Révolution tranquille il fallait justement sortir le Québec de son retard économique historique en permettant à une majorité de sa population d’accéder à un niveau social plus intéressant que celui dans lequel elle stagnait depuis des années. Une des clés de progrès à mettre en marche passait par la démocratisation de l’éducation. Or, 50 ans plus tard voici que vous vous attaquez à ce qui a survécu tant bien que mal (souvent plus mal que bien) jusqu’ici de cette base sociale. Ce n’est pas seulement scandaleux, c’est totalement irresponsable.
Lorsqu’il s’agit des programmes de retraites vous êtes un des premiers à parler d’équité entre les générations. À qu’elle équité travaillez-vous en appauvrissant ce secteur vital ? Que ferons-nous de tous ceux et celles qui n’auront pas la formation voulue pour accéder aux postes exigeants de l’économie numérique ? Tous et toutes seront d’une manière ou d’une autre obligéEs d’aboutir à l’aide sociale, si jamais elle existe encore. Ils et elles pourront toujours faire appel à la charité qui peut-être aura été développée par quelques super riche qui en tireront gloire et réconfort. Et si vous cédez les actifs publics au secteur privé que léguons-nous aux futures générations ? Gestion de courte vue.
Le contrat social qui nous uniEs depuis tant d’année stipule que la société doit, pour que la population vive correctement, avec des perspectives de développement social et personnels, pouvoir compter sur L’État pour remédier aux fractures inhérentes au capitalisme. Ce n’est rien de généreux, de sacrificiel ou même de solidaire. C’est un placement élémentaire que les entreprises recherche plus que tout : des travailleurs-euses éduquéEs, forméEs et en santé dans une population que se renouvelle. Le type de gestion publique qui s’est concrétisée sous les gouvernements Lesage et ceux du PQ première mouture, ont donné des résultats spectaculaires dont nous profitons encore quelque peu aujourd’hui. Ils introduisaient des structures de solidarité organique dans le fonctionnement politico-social qui ont été bénéfiques pour toute la société, riches et patronat y compris.
Vous objecterez sans doute que les temps ont changé. Oui, mais pas au point où il soit logique de détruire des bases productives. Aujourd’hui, avec vos orientations économiques vous voulez finaliser le chacunE pour soi et la compétition entre individus et groupes comme seules perspectives. C’est un autre article destructeur du catéchisme néo libéral !
Cet article a comme corollaire : ceux et celles qui ont réussi à s’enrichir n’ont quasi aucune obligation de contribuer au maintient de ce contrat social qui donne au gouvernement des devoirs de maintient d’un équilibre entre les classes sociales qui structurent la société. Au contraire, toute la richesse possible doit leur revenir par tous les moyens imaginables. Aujourd’hui, les entreprises, ici comme ailleurs, sont assises sur des milliards de fonds qu’elles n’investissent pas ou peu et surtout pas dans le secteur productif. M. Mario Dragi, directeur de la Banque centrale européenne, vient de retirer aux banques européennes un avantage qu’elles avaient en stockant leurs fonds dans cette institution. Pour les punir ? Non, pour les forcer à prêter aux entreprises.
Faire autrement
Il est possible de faire autrement. Pour maintenir des comptes publics plus seins tout en respectant les classes travailleuses et populaires. Il faut commencer par démystifier la dette et cesser de l’utiliser comme l’épouvantail qui justifie tout. Premièrement nous nous la devons à nous-mêmes ce qui est une sérieuse différence par rapport à la devoir à des propriétaires de capitaux étrangers. Il faudrait d’ailleurs savoir précisément de quoi elle est constituée pour pouvoir la juger. Ensuite, son rapport au PIB est par définition, un rapport avec l’état de notre richesse collective ; il fluctue. La récession relative qui nous affecte encore explique une grande partie de sa détérioration actuelle. Le Japon vit depuis des décennies avec un rapport bien pire que le nôtre et, même si la population rame un peu trop, il n’est toujours pas en faillite.
Si vous partiez de l’objectif de respecter le contrat social que vous n’avez jamais mis nommément en jeu, vous pourriez faire autrement et faire mieux du simple point de vue socio-économique. Mais vous ne satisferiez pas votre base sociale qui, possédante qu’elle est, a depuis longtemps endossé l’obéissance au catéchisme néolibéral et réclame que vous continuiez à la favoriser à tout prix fut-ce celui de sa propre dégénérescence.
Finalement,
Vous vous défendrez sans doute avec le fait que nous ne sommes même pas un pays et que la mondialisation a introduit des règles indépassables. On ne vous demande pas de faire la révolution, on vous demande un peu de sens de la justice socio-économique. Cela demande un peu d’audace et de courage par les temps qui courent. C’est un choix difficile pour un gouvernement comme le vôtre ? Alors allez-y !
Vous comptez peut-être aussi, pour réussir votre coup, sur la relative division de la gauche et l’apathie de la population en général. Attention ! Vos prédécesseurs, de Robert Bourassa à Jean Charest ont mordu la poussière avec des programmes semblables. La pression populaire les ont fait reculer. Cela pourrait bien se reproduire. Vous tentez de nous rouler dans la mélasse plutôt que dans la semoule. Mais nous ne sommes pas dupes et vous pourriez avoir à faire avec forte partie. À bon entendeur, salut !