C’est au Québec que le « sentiment d’affection profonde » envers l’Unifolié s’est le plus propagé, près d’une personne québécoise sur deux se dit fière d’être canadienne avec un taux de 58%, une augmentation de 13 % depuis décembre dernier.
Au niveau fédéral, le Parti libéral du Canada (PLC) est en remontée et se présente comme le rempart contre la droite trumpiste et, par conséquent, la nécessaire alternative aux Conservateurs. Cela aura également un impact au Québec, même en considérant le poids du Bloc Québécois.
Ce dernier se pose en alternative au Québec, mais vit très confortablement dans le cadre de l’État fédéral canadien. On pourrait même dire que ce parti fait la démonstration que le fédéralisme fonctionne bien en apportant ses propositions et critiques. Comme le mentionne Michel C Auger : « Pour les souverainistes, placer le Québec dans le plus grand ensemble commercial possible a toujours été un moyen de rendre leur option plus attrayante. Que ce soit une association avec le Canada ou une place dans une zone de libre-échange à la grandeur des Amériques. »
L’oppression nationale du Québec est le maillon faible de l’État impérialiste canadien. C’est dans cette mesure que la lutte pour l’indépendance doit être une lutte pour un changement de société, démocratique, sous contrôle social où les grandes entreprises doivent être nationalisées. Cette lutte se fait en solidarité avec les progressistes du Reste du Canada (ROC) qui ont tout intérêt à un changement de société ainsi qu’avec les peuples autochtones pour la réappropriation de leurs droits ancestraux.
Le Bloc québécois, quant à lui, partage les mêmes positions néolibérales que le PLC. Ses politiques identitaires et anti-immigrations rebutent un grand nombre de personnes et ne sont pas très loin de celles des Conservateurs. De surcroît ce parti ne peut pas structurellement aspirer au pouvoir. Il se donne le rôle de paver la voie à l’Indépendance du Québec et travaille en tandem avec le Parti Québécois avec qui il partage les mêmes politiques néolibérales et identitaires. Paul St-Pierre Plamondon se voit probablement déjà premier ministre lorsqu’il a affirmé que le Canada a été un mauvais voisin avec les États-Unis : « le Canada et le Québec ont été « des mauvais voisins » sur la question de l’immigration illégale et le trafic de fentanyl à la frontière ».
Le Parti conservateur incapable de tenir un discours cohérant face à l’offensive de Trump devient un incitatif à voter libéral. Le NPD semble le seul parti qui n’est pas néolibéral et pour lequel on peut voter. Mais ses positions mitigées ne sont pas inspirantes.
Les barrières économiques qu’imposeront les politiques tarifaires de Trump seront reportées essentiellement sur la classe ouvrière, mais à cause de la dynamique du fonctionnement des industries et du rôle des gouvernements tant fédéral que provinciaux de se plier à la logique entrepreneuriale. Cela ne pourra conduire qu’au rétrécissement de l’État social avec pour conséquence les coupures dans les services publics, la baisse des salaires et des conditions de travail.
Si nous n’offrons pas d’alternative à la classe ouvrière, elle suivra forcément les forces néolibérales qui, de capitulation en capitulation devant la droite, désarmeront la classe ouvrière et la laisseront au final sans force de résistance face à la droite et l’extrême droite. C’est l’histoire du mouvement ouvrier.
Il n’y a aucune réponse rationnelle à donner à Trump, son discours n’est que de la falsification et de la propagande haineuse et dépolitisantes. Trump libère les criminels d’extrême droite et se débarrasse des personnes qui ont un sens démocratique.
Notre force repose sur la politisation, sur la mobilisation. Il faut s’adresser à la population et particulièrement aux progressistes américains et construire la mobilisation avec eux. Il faut aussi défaire le mythe du Canada, le beau pays qu’on doit défendre. Ce pays est contrôlé au final par les multinationales, les minières, les papetières, les compagnies forestières, les pétrolières et les consortiums financiers.
Le ministre fédéral des finances vient d’indiquer qu’il va falloir rendre l’industrie plus compétitive. Il envisage la possibilité de leur accorder des baisses d’impôts et de réduire la taille des services publics.
Le Conseil du Patronat du Québec (CPQ) propose quant à lui de réduire l’impôt sur les bénéfices des sociétés de 15 à 12%, voire 10 % au fédéral et de 11,5 à 10 % au provincial.
C’est la réponse patronale au fait que le président Trump veut abaisser le taux d’impôt fédéral américain de 21 à 15 %. Avec ces changements annoncés, le taux combiné moyen tournerait ainsi autour de 19,5 % pour les entreprises manufacturières. C’est beaucoup moins qu’au Québec qui afficherait un taux d’impôt des sociétés combiné fédéral-provincial à 26,5%. Les entreprises canadiennes devraient faire à une concurrence fiscale américaine et elles ne seraient plus plus à armes égales pour faire face.
Les multinationales, ces intouchables qui échappent au financement
Selon les données de 2016 de Statistique Canada, moins de 1 % des entreprises au Canada étaient des multinationales. Bien qu’elles ne représentent qu’une petite partie du nombre total d’entreprises, les multinationales ont eu un impact important sur l’économie canadienne. Ces entreprises employaient un Canadien sur quatre et possédaient 67 % du total des actifs des secteurs financier et non financier. Les multinationales ont également généré plus de revenus et détenu plus d’actifs dans presque toutes les industries canadiennes. De plus, en tenant compte de leur taille, les multinationales étaient généralement plus profitables que les entreprises qui œuvrent uniquement sur le marché canadien. La majorité des filiales de multinationales canadiennes se trouvent aux États-Unis, où se trouvent 58.3 % de sociétés mères et 49,9 % des filiales.
Si on ne prend que l’exemple des compagnies minières, une enquête du vérificateur général Renaud Lachance conclut qu’entre 2002 et 2008, 14 entreprises minières exploitantes n’avaient versé aucune redevance. ( Voir, W. Sacher et A. Denault Paradis sous terre, Les Éditions Écosociété, 2012 )
Seul le combat paiera
Ce n’est que la pointe de l’iceberg. Il n’est pas difficile de comprendre que la pression de Trump, sans compter celle de l’extrême droite mondiale, aura pour conséquence une offensive en règle contre le mouvement ouvrier, contre les syndicats, les salaires, les conditions de travail. Cela aura un impact sur les services sociaux, comme la santé et l’éducation, qui sont déjà dans la mire de nos dirigeants politiques.
En outre, il n’y a pas de solution viable dans une consigne de vote aux élections fédérales qui arrivent bientôt. Le PLC est en remontée suite aux interventions de Justin Trudeau qui donnent l’impression d’un certain gain ou à une sorte de répit face à l’offensive de Trump. Cela peut sembler encourageant face à Poilievre qui voguait vers une victoire assurée. Mais, appuyer le PLC, c’est appuyer tout de même un parti néolibéral au service des entreprises et des multinationales, qui nous conduira inévitablement vers des offensives antiouvrières induites par les politiques de Trump, mais par la défense par la bourgeoisie canadienne de ses propres intérêts.
En deuxième lieu, si nous ne construisons pas d’alternative de la classe et si nous ne mettons pas de l’avant, par conséquent l’analyse politique anticapitaliste, qui y est liée, cela nous empêchera de construire une résistance (à tout le moins) et une analyse politique progressiste.
Le plus important dans la période antisociale qui s’annonce c’est de politiser, de construire des mouvements de résistance, d’allier les différents secteurs populaires afin de construire un rapport de force. Si nous n’allons pas dans cette direction, nous laisserons les leaders de l’establishment (les Libéraux en l’occurrence) prendre la direction du terrain politique et imposer leurs perspectives qui sembleront moins rudes au départ, mais qui auront pour effet de nous désarmer, nous laissant sans perspective.
La crise capitaliste non résolue a engendré la montée de la droite et de l’extrême droite. Il n’y aura pas de solution cosmétique ou de moindre mal. Nous n’avons pas su, tant au niveau national qu’international, construire une alternative politique de gauche. La planète est maintenant en péril, la crise climatique ne cesse de s’accentuer.
Pour Trump, la question ne se pose simplement pas. Mais l’extrême droite européenne développe d’autres stratégies qui peuvent s’avérer dangereuses. Elle s’attaque désormais aux changements de mode de vie qu’imposent des politiques environnementales. Selon cette vision, les mesures de protection du climat seraient un moyen supplémentaire pour les élites urbaines d’avoir un plus grand contrôle sur la population. L’idée, c’est d’opposer le bon sens de la terre, du paysan, contre l’idéologie urbaine bobo. En France, par exemple, Marine Le Pen promet dans son programme d’abroger des segments entiers du Pacte vert, comme l’interdiction de la vente des véhicules neufs à essence en 2035 ou le règlement sur la restauration de la nature, et souhaite imposer un moratoire sur l’éolien et le solaire.
Cela pourrait devenir le cas au Québec également si nous n’y portons pas attention. En effet, Le Parti conservateur d’Éric Duhaime (PCQ) exige que le gouvernement du Québec fasse marche arrière sur l’interdiction de la vente de véhicules à essence dès 2035 et demande la mise en place d’un moratoire sur cet enjeu.
La division régions et centres urbains peut potentiellement se révéler un écueil, si nous ne trouvons pas de revendications unificatrices. Le plan de transport proposé par Québec solidaire lors de la campagne électorale de 2022 en était un exemple. Ce plan écologique proposait l’établissement d’un système de transport en commun unifié, interrégional et à faible coût. Ce plan a malheureusement été mis de côté. Son financement, proposé lors de la campagne électorale, ciblait la classe moyenne et ne visait pas les multinationales qui ne paient pas ou peu d’impôt. Cela avait provoqué un tollé et stoppé la montée de QS.
Selon le dernier sondage, QS est passé en dessous du PCQ d’Éric Duhaime. Il est plus que temps de revenir à des revendications qui ciblent les vrais dirigeants de l’économie, les grandes entreprises, qui nous amènent dans un gouffre.
L’heure est maintenant pour nous de construire la mobilisation populaire, d’unir les forces de la gauche au niveau international afin de pouvoir poser une politique et un discours alternatif. La construction d’une alternative ouvrière pancanadienne respectant le droit à l’autodétermination du Québec et des nations autochtones doit être notre priorité.
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