Édition du 12 novembre 2024

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États-Unis

Les États-Unis ne sont pas un tiers pays si sûr pour les réfugiés.es

Lors de la visite du Président Biden à Ottawa, toute une série d’enjeux liés à la frontière ont été discutés

27 mars 2023 | tiré de rabble.ca | Photo : Le président Joe Biden et le premier ministre Justin Trudeau lors d’une conférence de presse à Ottawa le vendredi 23 mars 2023. Crédit : Nick Seebruch / rabble.ca
https://rabble.ca/politics/canadian-politics/the-u-s-is-a-not-so-safe-third-country-for-refugees/
Traduction, Alexandra Cyr

La Canada partage sa longue frontière avec un seul pays. C’est la plus longue du monde. Elle a été au cœur des discussions entre le Premier ministre Trudeau et le Président Biden lors de sa récente visite dans la capitale. Il en est résulté un engagement de la part des États-Unis de prolonger l’accord sur le « tiers pays sûr » vieux de quelques décennies. En retour, le Canada acceptera 15,000 réfugiés.es de plus, venant de l’hémisphère occidental.

Depuis des années, un nombre imposant d’immigrants.es venant d’Amérique du sud et centrale est arrivé dans les deux pays. Les réfugiés.es fuient les guerres, la violence des gangs criminels, la pauvreté et la destruction de leurs demeures dans leurs pays qui subissent aussi la crise climatique ; c’est donc la recherche de plus de sécurité.

Certaines de ces personnes traversent les États-Unis pour chercher leur sécurité au Canada. Au cours des années récentes, plusieurs l’ont fait en utilisant le chemin Roxham (au Québec) où les autorités avaient installé un poste d’accueil.

Est-ce que les États-Unis sont un pays sûr ?

Cet accord a pris effet la première fois à la fin de 2004. Il exige que les candidats.es au refuge déposent leur demande dans le premier pays sûr où ils et elles arrivent après avoir quitté leur pays d’origine. Si ce sont les États-Unis et qu’ensuite ils ou elles se présentent à un poste frontière officiel canadien en demandant l’asile, c’est le refoulement vers les États-Unis.

L’annonce du renouvellement de l’accord, le 24 mars courant, étend cette obligation (de refoulement) à toute la frontière, postes officiels ou non. Dans la foulée, le Premier ministre Trudeau a annoncé la fermeture du poste irrégulier du Chemin Roxham.

Durant sa conférence de presse il a déclaré : « Nos deux pays croient en une migration sûre, juste et ordonnée, à la protection des réfugiés.es et en des frontières sécuritaires. C’est pour cela que maintenant, l’Accord sur les tiers pays sûrs, va aussi s’appliquer aux demandeurs et demanderesses d’asile qui arriveront ailleurs qu’aux postes officiels ».

Quatre facteurs font que le Canada reconnaît les États-Unis comme pays sûr : les deux premiers sont le fait que ce pays est engagé envers la Convention sur les réfugiés de 1951 et celle contre la torture de 1984. Il existe aussi une entente entre les deux pays pour y recevoir les réfugiés.es à la frontière commune. C’est le troisième facteur. Et finalement, le Canada a une vision des États-Unis comme un pays détenant un solide dossier en regard du respect des droits humains.

Mais, l’accord sur les tiers pays sûrs, fait débat ici depuis un bon moment.

En juillet 2020, un tribunal fédéral canadien a jugé que cet accord violait la Charte canadienne des droits et libertés. La Juge Ann Marie McDonald a remis en question le dossier américain sur ces droits en disant que les réfugiés.es y sont face à des détentions arbitraires, parfois à des confinements solitaires ce qui va à l’encontre de la Charte canadienne.

Le Conseil canadien pour les réfugies.es a exprimé des inquiétudes par rapport à cette expansion de l’entente : « Les droits fondamentaux doivent demeurer au cœur des préoccupations canadiennes. Selon les lois internationales en matière de droits humains, le Canada a l’obligation d’offrir la protection. L’entente va forcer plus de personnes à retourner aux États-Unis où elles seront à risque de détention arbitraire, de possible renvoie (dans leur pays d’origine), à la torture et même à la mort ».

La Cour suprême du Canada étudie en ce moment, un appel du statut de Tiers pays sûr. La requête met en cause ce statut en regard de la Charte canadienne des droits et libertés.

La frontière au-delà des réfugiés.es

L’enjeu des réfugiés.es et de la frontière n’est pas le seul. Le Premier ministre Trudeau a annoncé qu’avec les États-Unis, le Canada veut créer une coalition mondiale pour combattre les trafics illégaux de drogue comme le Fantanyl, à travers les frontières. Il a déclaré : « La crise des surdoses d’opioïdes a des retombées dévastatrices dans nos communautés. Nous allons perturber les mouvements des fabricants illégaux de Fantanyl à la frontière ».

Au cours de sa conférence de presse, le Président Biden a aussi mis l’accent sur un autre enjeu relié à la frontière canadienne. Un grand projet d’extraction de pétrole au nord-est de l’Alaska a été approuvé. Il se situe dans une importante zone écologique fragile à la frontière canadienne.

Tout juste avant son voyage ici, le Président Biden a approuvé ce projet nommé Willow, dans cette région, mené par Conoco-Phillips d’une valeur de 8 mille milliard de dollars. Cela met en cause la circulation de plus de 200,000 caribous dont le territoire s’étend de part et d’autre de la rivière Porcupine, qui traversent la frontière naturellement.

Antérieurement, le Président Biden a annulé le projet canadien Keystone XL qui devait traverser une partie des États-Unis. Les journalistes lui demandé si ce n’était pas un peu hypocrite d’en approuver un près de l’habitat d’animaux sauvages. Il leur a répondu : « Je ne crois pas. La question difficile était de savoir quoi faire avec ce projet en Alaska. J’étais plus enclin à le refuser complètement. J’ai reçu les avis d’un conseil disant que si je faisais cela les risques de nous retrouver devant les tribunaux étaient élevés et finalement de perdre notre cause. Cela nous aurait empêcher de préserver des parties importantes de la mer et des terres en Alaska, ce que je veux vraiment ».

Il s’est ensuite permis de dire qu’il croyait vraiment que son pays a fait plus pour la conservation des terres sauvages qu’aucun autre depuis Theodore Roosevelt qui a créé les premiers parcs nationaux.

La série d’enjeux discutés par les deux chefs d’État, durant la dernière visite du Président Biden, est aussi longue que la frontière elle-même. En plus de ceux relatifs à la frontière proprement dite dont il a été question au cours de la conférence de presse, pas un mot n’a été entendu sur le traitement équitable qu’il faut apporter aux réfugiés.es en cessant de les traiter comme des problèmes alors que nous sommes aux prises avec la consommation de drogues, leurs trafics à la frontière, que nous devons lutter contre la crise climatique pendant que les forages pétroliers continuent.

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