GNL Québec déploie les grands moyens pour nous vendre une histoire : une compagnie du Saguenay va nous libérer du charbon et sauver la planète. C’est une belle histoire que le gouvernement Legault répète comme une berceuse pour calmer les opposants au projet. Mais il y a une autre version de l’histoire qui n’a rien à voir avec le Saguenay ni l’environnement. Cette histoire commence en Alberta, elle nous fait rebondir d’un paradis fiscal à l’autre et elle finit dans les poches de gros investisseurs américains.
Si vous voulez le fin mot de l’histoire, suivez l’argent.
Tout ça commence en Alberta, là où on extrait le gaz naturel qui finira à Saguenay. Comme le gaz de schiste au Québec, ce gaz albertain est extrait par la fracturation hydraulique, une méthode tellement polluante qu’une association de médecins a récemment recommandé un moratoire sur ce procédé « dangereux, toxique et néfaste ». Énergie Saguenay lui donne un second souffle, sans compter la pollution produite là-bas dans son évaluation environnementale.
Une fois arrivé au Saguenay, le gaz naturel devient du gaz naturel liquéfié (GNL) avec un petit coup de pouce des contribuables québécois. Énergie Saguenay recevrait des subventions déguisées de l’ordre de dizaines de millions de dollars par année sous la forme d’un tarif préférentiel d’Hydro-Québec, voire davantage. Le projet consommerait autant d’électricité que 250 000 maisons et Hydro lui vendrait au moins trois fois moins cher qu’à vous et moi. Oui, vous avez bien lu : en pleine urgence climatique, nous allons subventionner GNL Québec pour changer notre électricité propre en énergie sale.
Finalement, le GNL est exporté en passant par le fjord du Saguenay. Les lobbyistes et le gouvernement répètent sans pouvoir le prouver que c’est à cette étape que le projet rachète ses péchés et remplace du charbon encore plus polluant. Là encore, suivre l’argent nous donne un autre son de cloche. Le grand patron de GNL Québec, le milliardaire américain Jim Breyer, fait mine de défendre l’environnement au Québec, mais il est marié à l’industrie du charbon des États-Unis. Lui, sa famille et sa compagnie financent des politiciens comme Mitch McConnell, Ted Cruz et Rand Paul, qui ont tous trois demandé à Donald Trump de se retirer de l’accord de Paris sur le climat.
Ce n’est pas juste le GNL et sa pollution qui voyagent à travers le monde : ses dividendes s’envolent aussi. Comme ses commanditaires sont campés dans les paradis fiscaux, ils ne vont payer que 5 % d’impôts sur dividendes ici. C’est légal. Est-ce que c’est ça qu’on veut au Québec ?
Les fonds d’investissement américains comme celui de Jim Breyer ne viennent pas s’installer pour la beauté des paysages ni pour le bien-être des gens de la place. Ils placent leurs billes là où ils peuvent extraire un maximum de profits avec un minimum de friction. Quand on suit l’argent, qu’est-ce qu’on trouve ? Un milliardaire américain, des intérêts albertains et un premier ministre québécois berné par une belle histoire.
Le Saguenay mérite d’écrire sa propre histoire : une histoire qui commence par « Maîtres chez nous ».
Manon Massé, Ruba Ghazal et Catherine Dorion
Députées de Québec solidaire
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