Tiré de MondAfrique.
Une vision qui s’inspire des recommandations du rapport A Clean Break : A New Strategy for Securing the Realm, publié en 1996 par des stratèges néoconservateurs américains. Ce document suggérait de remodeler le Moyen-Orient en exacerbant les divisions internes de ses États, une approche que Netanyahu semble avoir adoptée avec constance.
Une doctrine au service de la puissance israélienne
Le rapport A Clean Break préconisait de rompre avec les processus de paix traditionnels et d’utiliser la puissance militaire et politique pour affaiblir les adversaires d’Israël. Cette doctrine repose sur deux piliers principaux :
– Rejeter les compromis territoriaux, notamment le principe de « la terre contre la paix » inscrit dans les accords d’Oslo.
– Exploiter les divisions internes des adversaires pour maintenir un avantage stratégique.
Cette logique se reflète dans plusieurs initiatives israéliennes, notamment le soutien à l’indépendance kurde, qui vise à fragmenter des États comme l’Irak, la Syrie ou l’Iran. Autre exemple : la division entre le Hamas et le Fatah, qui affaiblit les Palestiniens en rendant plus difficile toute forme d’unité nationale.
Une stratégie qui fragmente le Moyen-Orient
Depuis deux décennies, cette approche a eu des répercussions majeures sur les équilibres régionaux :
– En Irak, l’éviction de Saddam Hussein en 2003, bien que menée par les États-Unis, a laissé un pays fracturé entre tensions sectaires et ingérences étrangères.
– En Syrie, les frappes israéliennes ciblées contre les infrastructures militaires et les soutiens indirects à certains groupes d’opposition affaiblissent le régime de Bachar Al-Assad.
– Au Liban, les actions israéliennes contre le Hezbollah, combinées à la crise économique, contribuent à fragiliser un État déjà en grande difficulté.
Ces interventions, bien qu’efficaces à court terme pour limiter les menaces immédiates, alimentent un cycle d’instabilité dans la région.
Un risque d’effet domino
Cette politique de fragmentation pourrait cependant produire des effets inverses :
1- L’instabilité pourrait s’étendre à des puissances régionales telles que l’Iran ou l’Arabie saoudite. La diversité ethnique en Iran ou les fractures religieuses en Arabie saoudite pourraient devenir des points de tension exploités par des acteurs externes.
2- Des risques pour les intérêts américains : La fragmentation des États du Moyen-Orient risque d’affaiblir les alliances des États-Unis et de créer des vides de pouvoir où prospèrent les groupes extrémistes.
Un paradoxe face aux Accords d’Abraham
La stratégie de Netanyahu entre en contradiction avec les dynamiques de normalisation portées par les Accords d’Abraham, signés en 2020, qui visent une intégration régionale autour de la coopération économique et politique. Cette tension se manifeste particulièrement dans les relations avec l’Arabie saoudite :
– La priorité saoudienne à la stabilité régionale s’oppose aux actions israéliennes au Liban ou en Syrie, qui amplifient les crises.
– La question palestinienne demeure un point central : Riyad exige des avancées concrètes pour envisager une normalisation avec Israël, une exigence incompatible avec la doctrine de fragmentation.
Une vision stratégique aux limites évidentes
Si la doctrine de Netanyahu a permis de contenir des menaces à court terme, elle repose sur une vision à court terme de la sécurité régionale. L’instabilité qu’elle alimente pourrait renforcer des groupes extrémistes et éloigner Israël de partenaires potentiels.
Alors que le Moyen-Orient évolue vers une interconnexion accrue, portée par des initiatives comme les Accords d’Abraham ou la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, la persistance d’une stratégie de rupture pourrait isoler Israël. La quête de sécurité pourrait alors se transformer en un pari risqué, où l’instabilité finit par affecter tous les acteurs, y compris ceux qui la provoquent.
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