Tiré d’Agence médias Palestine.
« Nous devons conquérir et détruire. Autant que possible, et aussi vite que possible », a écrit un membre d’Uri Tsafon – un groupe fondé au début de l’année pour promouvoir la colonisation israélienne du Sud-Liban – dans le groupe WhatsApp de l’organisation. « Nous devons vérifier, conformément aux nouvelles lois syriennes, si les Israéliens sont autorisés à investir dans l’immobilier et à commencer à acheter des terres dans ce pays », a écrit un autre membre. Dans un autre groupe WhatsApp de colons, les membres ont échangé des cartes de la Syrie et tenté d’identifier des zones potentielles de colonisation.
Le mouvement Nachala – dirigé par Daniella Weiss, qui a été le fer de lance des efforts déployés ces derniers mois pour coloniser Gaza – a exprimé un sentiment similaire dans un message publié sur Facebook : « Quiconque pense encore qu’il est possible de laisser notre destin entre les mains d’un acteur étranger renonce à la sécurité d’Israël ! La colonisation juive est la seule chose qui apportera la stabilité régionale et la sécurité à l’État d’Israël, ainsi qu’une économie stable, la résilience nationale et la dissuasion ».
À Gaza, au Liban, sur l’ensemble du plateau du Golan, y compris le ‘plateau syrien’, et sur l’ensemble du mont Hermon », ajoute le texte, en joignant une carte biblique intitulée “Les frontières d’Abraham”, sur laquelle le territoire d’Israël comprend l’ensemble du Liban ainsi que la majeure partie de la Syrie et de l’Irak.
Il ne s’agit pas de paroles en l’air : ces groupes sont déterminés. Nachala a déjà dressé la carte des lieux où elle prévoit de construire de nouvelles colonies juives dans la bande de Gaza et affirme que plus de 700 familles se sont engagées à déménager lorsque l’occasion se présentera (Daniella Weiss elle-même s’est déjà rendue à Gaza avec une escorte militaire pour repérer les lieux potentiels). La semaine dernière, Uri Tsafon, qui a attendu son heure au cours de l’année écoulée, a tenté pour la première fois de s’emparer de terres dans le sud du Liban, où les soldats israéliens sont toujours présents depuis l’accord de cessez-le-feu.
Le 5 décembre, le fondateur du groupe, Amos Azaria, professeur d’informatique à l’université d’Ariel en Cisjordanie occupée, a franchi la frontière libanaise avec six familles pour tenter d’établir un avant-poste. Ils ont atteint la zone de Maroun A-Ras, à environ deux kilomètres en territoire libanais, et ont planté des cèdres à la mémoire d’un soldat israélien tombé au combat au Liban il y a deux mois. Plusieurs heures se sont écoulées avant que l’armée israélienne ne les expulse et ne les force à retourner en Israël. (En réponse à la demande de commentaire de The Hottest Place in Hell sur cet incident, la police israélienne a déclaré que, selon l’armée, aucun civil israélien n’avait traversé le Liban).
Dès le mois de juin, lors de la « première conférence sur le Liban » organisée par Uri Tsafon sur Zoom, les membres parlaient déjà de coloniser la Syrie. Le Dr Hagi Ben Artzi, beau-frère de Benjamin Netanyahou et membre du groupe, a déclaré aux participants que les frontières d’Israël devraient être celles promises au peuple juif à l’époque biblique : « Nous ne voulons pas dépasser d’un mètre l’Euphrate. Nous sommes humbles. [Mais] ce qui nous a été promis, nous devons le conquérir ».
Et avec la chute du régime Assad et l’avancée des troupes israéliennes en territoire syrien, ils étaient impatients de saisir l’occasion. « Nous avons demandé au gouvernement de s’emparer de la plus grande partie possible du territoire syrien », a déclaré M. Azaria au magazine israélien The Hottest Place in Hell (L’endroit le plus chaud de l’enfer). « Les rebelles sont exactement [les mêmes que] le Hamas. Peut-être que maintenant ils font de beaux discours, mais en fin de compte ce sont des sunnites qui trouveront l’ennemi commun, c’est-à-dire nous. Nous devons faire le maximum maintenant, tant que c’est possible ».
Le 11 décembre, un petit groupe de colons israéliens a affirmé avoir pénétré dans une zone du territoire syrien désormais sous contrôle militaire israélien, où ils se sont filmés en train de prier. L’armée israélienne n’a pas encore répondu à la demande de commentaire de +972 sur cet incident.
« Le plus important est d’être de l’autre côté de la barrière »
Uri Tsafon tire son nom d’un verset biblique appelant à « Se réveiller, ô nord ». Son site Internet décrit le Liban comme « un État qui n’existe ni ne fonctionne réellement » et affirme que la véritable étendue de la Galilée septentrionale d’Israël s’étend jusqu’au fleuve Litani, au Liban, que les forces israéliennes ont atteint juste au moment où le récent accord de cessez-le-feu est entré en vigueur, après avoir déplacé de force des dizaines de milliers d’habitants de villages du Sud-Liban dans le processus.
« Nous avons commencé par des activités plus calmes », a déclaré M. Azaria à The Hottest Place in Hell. « Nous avons appelé le gouvernement et l’armée à entrer en guerre dans le nord… [et] nous nous sommes rendus au Mont Meron, sous la base aérienne, et avons effectué des reconnaissances en direction du Liban ».
Mais la tentative de la semaine dernière d’établir un avant-poste dans le sud du Liban a marqué l’entrée du groupe dans une nouvelle phase d’activité visant à forcer la main du gouvernement. « L’objectif était et est toujours d’établir une colonie au Liban », a déclaré M. Azaria. Nous n’attendons pas que l’État nous dise « Venez », nous travaillons pour que cela se produise.
Selon M. Azaria, le mouvement compte déjà des milliers de membres « qui sont très enthousiastes et intéressés » par ses activités. L’action de la semaine dernière n’a pas été annoncée à l’avance, car « [l’armée] nous aurait bloqués et ne nous aurait pas permis d’entrer ». Et ils n’ont certainement pas rencontré beaucoup de résistance : « La porte était ouverte et nous sommes simplement entrés », a-t-il déclaré.
Azaria ne s’inquiète pas qu’ils n’aient pas réussi ; en fait, il considère leur expulsion comme la première étape d’un plan d’action à long terme qui a caractérisé le mouvement des colons depuis sa création il y a plus d’un demi-siècle.
« La première fois que nous sommes expulsés, nous partons », explique-t-il. « La deuxième fois, nous restons plus longtemps. La [troisième] fois, nous restons pour la nuit. C’est ainsi que nous continuerons jusqu’à ce qu’il y ait un compromis. Au début, [l’armée] démolit, puis ils parviennent à un accord selon lequel il n’y aura qu’une seule colonie, et c’est tout. Entre-temps, nous commençons à travailler sur la prochaine colonie. Il n’est peut-être pas réaliste de penser que l’État construira une colonie [de son propre chef], mais cela ne signifie pas que l’État doive démolir une communauté que nous avons construite.
» Dans un premier temps, nous nous installerons là où nous le pourrons », poursuit-il. « Il n’y a pas d’intérêt pour un lieu spécifique ; le plus important est d’être de l’autre côté de la barrière. Nous devons lutter contre le tabou de la frontière établie par la France et l’Angleterre il y a 100 ans. Nous vivrons à la frontière libanaise, si Dieu le veut, et si nous sommes là, la frontière se déplacera vers le nord et l’armée la gardera.
« De même que l’armée se bat à la fois à Gaza et dans le nord, il en va de même pour les colonies : nous devons nous installer partout », a poursuivi M. Azaria. « À Gaza, il y a Nachala et plusieurs autres organismes [qui encouragent la colonisation]. Dans le nord, nous sommes le seul mouvement qui s’occupe vraiment de cette question à l’heure actuelle. Nachala le fait davantage avec des permis. Nous agissons plutôt comme un fer de lance ».
M. Azaria est convaincu que le soutien viendra de la sphère politique. « Lorsque j’ai fondé [Uri Tsafon], les gens ne parlaient pas du tout de la colonisation du Sud-Liban », explique-t-il. « Nous sommes en train de changer le discours. Nous sommes en contact avec des membres de la Knesset. Je suppose que, tout comme il leur a fallu du temps pour accepter de parler de la colonisation de Gaza, il leur faudra également du temps pour commencer à parler de la colonisation du Liban. [Ariel Kallner, député du Likoud, a mentionné quelque chose. [Le député d’Otzma Yehudit] Limor Son Har-Melech a également mentionné quelque chose. Peu à peu, de plus en plus de gens osent en parler ».
Illy Pe’ery est journaliste d’investigation et rédacteur en chef adjoint du magazine en ligne israélien indépendant The Hottest Place in Hell.
Traduction : JB pour l’Agence Média Palestine
Source : +972
Abonnez-vous à notre lettre hebdomadaire - pour recevoir tous les liens permettant d’avoir accès aux articles publiés chaque semaine.
Chaque semaine, PTAG publie de nouveaux articles dans ses différentes rubriques (économie, environnement, politique, mouvements sociaux, actualités internationales ...). La lettre hebdomadaire vous fait parvenir par courriel les liens qui vous permettent d’avoir accès à ces articles.
Cliquez sur ce bouton pour vous abonner à la lettre de PTAG :
Un message, un commentaire ?