On se rappellera qu’au début du précédent mandat, Québec solidaire avait alors menacé le gouvernement Legault d’une opération de blocage du parlement l’Ultimatum 20-20. [2]
Aujourd’hui, un bilan concret sur l’inaction de la CAQ montrerait « que son Plan pour une économie verte » ne se donnait même pas les moyens d’atteindre la moitié de la cible insuffisante de 37,5%. Pourtant, en ce qui concerne le changement climatique, Québec solidaire se donne comme cadre de son action d’être des adversaires coriaces à chaque fois que le gouvernement va vouloir nous faire reculer dans la lutte aux changements climatiques, mais son allié à chaque fois qu’il voudra aller dans le bon sens. Voilà une hypothèse stratégique bien hasardeuse qui laisse espérer que ce gouvernement néolibéral avec son super-ministe Fttzgibbon, champion de la croissance à tout prix et son ministre aplatventriste Benoit Charette à l’environnement puisse s’engager sérieusement dans la lutte aux changements climatiques.
C’est sur cette hypothèse stratégique sans fondement que QS solidaire propose à François Legault de « reprendre la toute première mesure du plan solidaire : un Sommet national sur le climat qui réunirait les forces vives de la société québécoise, dont le milieu des affaires, les organismes gouvernementaux, les organisations syndicales, étudiantes et communautaires, les municipalités, les partis d’opposition ainsi que les représentantes et représentants des Premières Nations et Inuit. »
Définissant sans sourciller le monde des affaires comme un partenaire à la lutte aux changements climatiques, cette proposition de Québec solidaire, sème la confusion et évite d’identifier quels sont les obstacles et les agents s’opposant à la lutte aux changements climatiques et à une véritable transition écologique.
Dans quelle société et dans quelle période vivons-nous ?
Les propriétaires des grandes entreprises décident ce qui va être produit, en quelle quantité et selon quels procédés. Leur objectif est de dégager le maximum de profits, d’accumuler et de réinvestir pour augmenter leurs débouchés. Cette économie capitaliste est une économie centrée sur la croissance. Comme société de production généralisée de marchandises, le capitalisme est une société productiviste qui pousse à la surconsommation et à l’épuisement des ressources. Ces puissances qui dirigent la société contrôlent des institutions politiques (partis politiques et institutions étatiques) qui protègent leur domination sur l’économie et sur l’ensemble de la société.
Au niveau mondial, nous sommes dans une société où les guerres pour les ressources pétrolières et minières sont à l’ordre du jour. Les entreprises exploitant des hydrocarbures continuent d’investir des sommes colossales dans des infrastructures pour augmenter leur production dans les prochaines décennies. Les dirigeants politiques se contentent de belles paroles sur l’urgence climatique et sur la lutte aux GES, mais ils continuent de subventionner les entreprises pétrolières et gazières.
Des rapports récents montrent que les gouvernements au Canada continuent de subventionner les industries fossiles. Le capital financier continue d’investir comme jamais dans l’exploitation des hydrocarbures. Le plan Legault (le PEV) défend le gaz fossile comme une énergie de transition, le rôle de la finance comme instrument de la réduction des GES, un nouvel extractivisme des métaux rares et une croissance supposément verte bâti sur l’élargissement d’un nouveau parc automobile... électrique et la perspective d’une croissance sans fin.
Une stratégie en phase avec la réalité capitaliste de l’économie et qui tient compte du blocage des entreprises et des gouvernements à leur service
C’est dans ce cadre que nous croyons nécessaire d’aborder la dimension stratégique de cette lutte aux changements climatiques et pour la protection de la biodiversité. Une telle stratégie doit identifier le cadre systémique dans lequel se livre ce combat, les adversaires auxquels il faudra faire face et les rapports de force qu’il faudra construire pour mettre en pratique concrètement les pistes de transformation sociale que Québec solidaire défend. Se contenter d’un simple appel au dialogue social sans préciser la portée de cet appel ne permettra pas de préciser les tâches pour avancer vers une révolution économique et écologique essentielle dans la période pour ne pas foncer dans le mur.
En fait, tout plan de transition véritable doit rendre explicites la nature et les formes de la remise en question des rapports de domination économique, politique et culturel existant dans la société québécoise. La nature des transformations visées peut être résumée comme suit :
a. Pas de décision collective sur les choix économiques et environnementaux sans instaurer la propriété collective des principaux moyens de production. Cette propriété collective peut prendre la forme soit de coopératives, soit d’entreprises publiques démocratisées permettant de jeter les bases d’une autogestion économique.
b. Pas de passage à une société carboneutre sans expropriation des entreprises extractives et l’obligation réglementaire de garder les hydrocarbures sous terre.
c. Pas de protection des ressources restantes, sans la mise en place d’une décroissance solidaire, et la détermination des choix de production par une planification démocratique afin de pouvoir sortir du productivisme
d. Pas de lois écologistes véritables, sans la mise en place d’institutions permettant la démocratie directe et participative qui dépasse la simple démocratie représentative instrument le plus souvent de la reproduction des élites.
e. Pas de ralliement à un projet de transformation économique, sociale, politique et culturelle qu’implique une réponse adéquate à l’urgence climatique sans une bataille pour une redistribution égalitaire de la richesse.
f. Pas de transition possible sans la socialisation du secteur financier pour pouvoir faire démocratiquement les choix d’investissements nécessaires à la transition économique et écologique.
Des débats incontournables pour établir les conditions politiques de la mise en œuvre des propositions que nous avançons
Il faut refuser d’écarter les discussions sur les dimensions stratégiques et politiques de la lutte dans un contexte d’urgence climatique. Les débats qui doivent s’ouvrir autour du Plan Climat de Québec solidaire (2030) doivent chercher à :
a. donner la priorité aux combats les plus mobilisateurs dans le contexte actuel : comme la défense du secteur public et particulièrement la nationalisation-socialisation intégrale des services de santé et des entreprises qui lui sont liées
b souligner la nécessité d’une révolution culturelle s’enracinant dans les combats quotidiens pour l’égalité, la justice et la fin de la prédation de la nature, conditions essentielles du dépassement de l’hyperconsumérisme.
c. préciser que les luttes à mener aux niveaux local, régional, national et international doivent être des dimensions du plan de transition. Le problème de la crise climatique et environnementale est planétaire et une dialectique des luttes doit s’instaurer à tous ces niveaux.
d. s’assurer qu’un plan de transition solidaire et démocratique soit à la fois un plan d’action visant la mobilisation populaire et un plan d’initiatives d’un gouvernement de la majorité populaire.
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