Édition du 18 février 2025

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Féminisme

La Saint-Valentin ne rime pas toujours avec amour

Planifier une sortie en amoureux. Recevoir des fleurs. Tout ce qu’il y a de plus banal, pour un 14 février. Mais derrière l’image d’un couple parfait, la St-Valentin n’a pas la même saveur pour toutes. En contexte de violence conjugale, la « belle attention » peut en fait sonner comme une menace : attention à ce qui va t’arriver si tu penses à me quitter… De l’extérieur, saurait-on voir la violence au-delà des apparences ?

Les femmes qui vivent de la violence conjugale (sans forcément toujours la nommer ainsi) nous le disent souvent ? : personne ne pourrait se douter que leur partenaire est violent ; personne ne croirait ce qu’elles vivent. Les auteurs de violence savent dissimuler leur vrai visage et prendre l’apparence d’un voisin serviable, d’un ami attentionné ou d’un collègue sympathique. Le contrôle et la violence s’exercent souvent derrière des portes closes, et prennent des formes subtiles.

Derrière cette façade, il y a presque toujours des signes qui devraient nous alerter. Même lorsqu’il n’y a pas de coups. Surtout lorsqu’il n’y a pas de coups. Et si on apprenait, chacun.e à son échelle, à les reconnaître ?

Changer de regard sur la violence conjugale

Les films, les romans ou même l’éducation que l’on a reçue nous ont transmis des idées sur l’amour qui peuvent nous aveugler. Être jaloux, n’est-ce pas une preuve d’amour ? Écrire ou appeler sans arrêt sa partenaire n’est-il pas le signe d’une relation passionnelle ? Géolocaliser sa partenaire, n’est-ce pas une façon de la protéger ? Ces comportements peuvent sembler banals si on les observe de façon isolée. Mais le cumul de tous ces gestes peut nous indiquer un schéma de comportements calculés pour isoler, contrôler, terroriser et priver la partenaire de sa liberté. C’est ce qu’on appelle le contrôle coercitif. Pour le repérer, il faut aller au-delà des apparences et prendre au sérieux les comportements qui ne nous paraissent « pas corrects ».

Se sentir prise au piège dans une cage invisible. Se faire dire que c’est elle, le problème, et finir par le croire. Ne plus pouvoir décider pour soi-même. Obéir, pour éviter les représailles. Avoir peur, tout le temps. C’est le quotidien décrit par les femmes qui en sont victimes, dès l’adolescence parfois. Un quotidien où elles sont privées de ressources et de leur liberté.

Apprendre à reconnaître les signes

De l’extérieur, plusieurs signes peuvent nous mettre la puce à l’oreille sur la présence de contrôle coercitif dans un couple : la femme (ou l’ado !) que vous connaissiez n’est plus tout à fait la même. Elle n’accepte plus aucune invitation ou seulement avec son chum, elle est pressée de rentrer chez elle après le travail ou après l’école, elle regarde son partenaire avant de prendre la parole, elle ne s’habille plus comme avant, elle ne pratique plus son sport favori, elle semble inquiète quand elle reçoit des appels.

En reconnaissant ces signes, l’entourage peut jouer un rôle déterminant pour soutenir une femme aux prises avec la violence conjugale : ouvrir le dialogue, nommer les inquiétudes, offrir du soutien, respecter ses choix, suggérer des ressources et surtout, surtout, garder le contact. Oser aborder le sujet, même si ce n’est pas facile, ça peut tout changer.

En tant que parent, ami.e, collègue, voisin.e, intervenant.e, soignant.e, vous pourriez être la personne qui fera toute la différence dans la vie de la victime. Et qui pourrait sonner l’alerte avant qu’il ne soit trop tard. Dans le doute, n’hésitez jamais à appeler une maison d’aide et d’hébergement qui pourra vous aider à la soutenir au mieux.

En apprenant à voir les signes de contrôle coercitif, on peut aider à sauver des vies. En ce jour de célébration, rappelons-nous que l’amour ne devrait jamais être une prison.

– Annick Brazeau, présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale

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Annick Brazeau

Présidente du Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale.

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