Dans les partis politiques traditionnels et électoralistes, le programme politique sert à étaler certains principes, certaines valeurs. Mais il est, en général, peu utilisé. Il demeure davantage sur les tablettes que dans les mains des personnes militantes. Ce qui est publicisé, c’est la plateforme électorale : les promesses faites durant la campagne électorale et vite oubliées au lendemain des élections. En fait, notre système parlementaire a comme coutume de voter davantage pour la personne ( pour ne pas dire pour l’homme) et pour sa personnalité. Davantage pour ce que cette personne dégage que pour tout le charabia politique.
Et pourtant...
Un programme devrait nous donner une image de la période politique. Les grandes tendances, les grands enjeux devraient y être expliqués pour nous permettre de comprendre les rapports de force en présence. Ce n’est donc pas un outil pour garnir la tablette mais un outil pour mieux comprendre la réalité. Le programme doit à la fois être concret en proposant des revendications essentielles pour la situation actuelle et poser des liens transitoires pour un monde nouveau. La plateforme électorale, à ce moment, résume le programme en ne reprenant que quelques points essentiels pour la période électorale à venir.
Par exemple, face au départ d’Amazon et au licenciement du personnel, le programme défend la nécessité pour le gouvernement de refuser une telle fermeture. Ceci concrétise et souligne les besoins essentiels de ces travailleuses et travailleurs. Ensuite, pour poser la transition, il faut demander des comptes à la compagnie, vérifier sa comptabilité et voir ce qu’elle a fait des subventions gouvernementales (ce que d’ailleurs le syndicat d’Amazone demande en ce moment). Finalement, il faut poser la nécessité d’une nationalisation de la livraison des colis un peu comme la livraison du courrier.
Le programme, dans la période actuelle, doit développer une vision internationale. Ceci est essentiel avec la guerre qui sévit en Ukraine et l’envahissement impérialiste de la Russie, avec le génocide en Palestine et avec les visées impériales de Donald Trump sur le Panama, le Groenland et le Canada. Le monde a besoin de réponses pour arrêter cette barbarie destructrice de l’environnement. Le programme doit servir à tracer ces signes d’espoir.
Que fait Qs dans tout ce contexte québécois et international ? Des interventions à l’Assemblée nationale. Pourrait-on penser développer davantage des revendications posant la mobilisation du mouvement ouvrier en solidarité avec Amazon ? Est-il important de prôner l’unité syndicale pour organiser la lutte ? De remettre de l’avant l’urgence de sauver la planète face aux guerres, aux génocides et au climato-scepticisme en développant la solidarité internationaliste ?
La consultation de QS
Le programme permet de sensibiliser les gens à la situation politique en offrant de nouveaux horizons, en ouvrant sur un monde nouveau.
La consultation entreprise par Qs pose deux problèmes majeurs : la base pour construire le programme et le processus démocratique.
La base du programme
Pour servir d’outil et non de décoration de tablette, le programme doit partir d’une analyse de la conjoncture politique. Quelles sont les forces en présence ? Comment les multinationales s’organisent-elles ? Comment les partis politiques réagissent-ils à ces pressions ? Comment les mouvements sociaux se mobilisent-ils et autour de quels enjeux ? Le texte de Françoise David, publié récemment dans Le Devoir (L’orage gronde, il faut résister à ce tsunami de droite ! | Le Devoir ), peut nous donner une première idée du genre d’analyse à produire.
Qs répond à la pièce, quand il répond, aux éléments de conjoncture. Et souvent, ces éléments ne sont pas les plus importants de l’heure. Qs ne propose pas de vue d’ensemble et ne peut présenter son projet d’avenir parce qu’il ne projette rien.
Donc, le processus de consultation avec des priorités prédéfinies et ciblées (a-t-on oublié la situation internationale ? Et les actions de la Marche Mondiale des Femmes ?) ne peut combler une analyse faisant des liens réels entre les projets de la bourgeoisie et les mobilisations ouvrières et sociales. Ce sont ces liens-là qui sont essentiels : comment organiser les mouvements sociaux face aux menaces de Trump ? Mais rien de cela n’est apparu dans la récente consultation.
Le processus démocratique
Une consultation individualise la personne membre et ne lui permet pas de bénéficier, dans sa réflexion, des échanges qui pourraient avoir lieu avec les autres membres. Ce n’est que dans la discussion que les idées peuvent évoluer, se préciser, s’enrichir. Et il faut du temps pour débattre. Certes, le congrès va ouvrir une période de débat mais il faut plus de trois semaines entre les cahiers de résolution pour organiser les rencontres par assos, par région. Il faut aussi ouvrir un organe interne de discussion pour débattre à la grandeur de la province avant de le faire en congrès.
Plusieurs militantes femmes et plusieurs militants et militantes des régions ont parlé des blocages, des processus et des attitudes bureaucratiques qui ont cours dans Qs. Pour résoudre ces problématiques, la discussion respectueuse en vue d’élaborer des solutions pour enrayer ces fonctionnements patriarcaux et non collectifs est nécessaire. La consultation renforce le repli sur soi et l’isolement : le contraire de ce qui permettrait de trouver de réelles solutions.
Et pourquoi ne pas penser à un modèle de discussion qui ouvrirait le débat avec les groupes sociaux : syndical, femmes, communautaires ? En mettant en place des forums de discussions et de partage, par exemple. Nous pourrions ainsi être à l’écoute de leurs luttes, mieux comprendre les réalités vécues et être en mesure de proposer de réelles propositions de changement.
Un parti de la rue se doit de partager ses réflexions avec l’ensemble des personnes militantes. Un parti des urnes, comme les partis traditionnels, cherche à séduire par des promesses.
Conclusion
L’actualisation du programme de QS risque d’être une opération de maquillage risquant de laisser le texte en tablette. Cela équivaudrait à revenir aux pratiques électoralistes des vieux partis et à élaborer une plateforme électorale qui plaira peut-être à la classe soi-disant moyenne mais en ne proposant pas des revendications de changements et un projet de société. C’est pourtant ce dont la population a le plus de besoin face aux différentes crises économiques, environnementales et sociales qu’elle vit.
Il y a tellement à dire et Qs pourrait porter un si beau projet de société, comme celui que la Marche Mondiale des femmes présente en 2025 : pour une justice sociale, contre la pauvreté, pour une égalité contre les violences et les guerres et pour le respect de l’environnement.
Qs doit donc changer de paradigme et les militants et militantes de gauche se regrouper pour mieux faire entendre leurs voix.
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