Il est difficile de croire que ces personnes en connaissaient si peu sur l’histoire russe qu’elles ne pouvaient imaginer la réaction du Président Poutine devant les tractations de Kiev avec le soutient américain. Elles ont mené au renversement du Président Yakounovich après des manifestations de rue. Des éléments néo-nazis y participaient et participent maintenant au nouveau gouvernement.
Pas possible de douter de ces tractations. Nous avons été témoins d’une conversation téléphonique entre Mme Victoria Nuland, assistante secrétaire pour la section Affaires européennes et eurasiennes du département d’État et M. Geoffrey Pyatt, l’ambassadeur américain en Ukraine. On y entend Mme Nuland dire : « Je ne crois pas que Klisch devrait entrer au gouvernement (référence à Vitaly Klitscho, un des leaders de l’opposition ukrainienne). Je ne crois pas que ce soit nécessaire, je ne crois pas que ce soit une bonne idée. Je pense que Yats est celui qui a une expérience économique et une expérience de gouvernement. (Référence à un autre leader de l’opposition, M. Arseniy Yatsenyuk). Il est effectivement devenu premier ministre après le départ de M. Yakounovitch.
La réponse de l’ambassadeur ? « Je pense que si vous lui parlez directement (à M. Yatsenyuk), cela aiderait à gérer les personnalités parmi les trois (leaders de l’opposition). Mais nous pourrions en considérer d’autres assez surs pour aller vite. Nous voulons quelqu’un qui ait une personnalité internationale qui pourrait prendre les choses en mains et les mener à terme ».
Le gouvernement américain a donc agit activement dans le remplacement du M. Yanukovych par « son homme », sans le dire à la population de l’un ou l’autre des pays.
Cette conversation a fait les manchettes parce que Mme. Nuland a proféré une obscénité à l’égard de l’Union européenne. La nouvelle consistait pourtant dans ce projet de renversement du pouvoir. Mais les médias n’en ont rien dit comme le gouvernement l’a fait. Pas besoin d’être un apologiste du Président Poutine pour voir que cela allait le provoquer.
N’oublions pas que ce n’est pas la première fois que les administrations américaines agissent de la sorte ; c’est une politique abusive qui s’est répétée de multiples fois depuis la chute de l’Union soviétique en 1991 : d’abord, l’expansion de l’Otan jusqu’aux frontières russes alors que le Président Bush père avait promis de ne pas le faire en contre partie du retrait de l’Armée rouge d’Allemagne de l’est. Ensuite, d’anciennes républiques soviétiques se sont jointes à l’Otan et il faut ajouter des tractations pour que l’Ukraine et la Géorgie soient elles aussi intégrées à l’Otan. Finalement, des ententes ont été conclues par l’armée américaine avec les dirigeants des anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale à majorité musulmane.
Le commun des mortels qui possède un strict minimum de notions de l’histoire russe, sait que de telles pratiques vont créer une réaction nationaliste. La reprise de la Crimée était la plus prévisible. Qui peut croire que l’administration américaine ignorait une telle réalité ?
On peut se demander toutefois, si elle cherchait une telle réponse. Il semble que oui. Pour quelle fin ? M. Poutine a récupéré la Crimée, mais il est probable que le reste de l’Ukraine se rangera sérieusement du côté du camp européen, même si ses offres d’aide financières sont moins intéressantes que celle de la Russie. Avec ses manœuvres maladroites, M. Poutine a donné de nouvelles occasions à l’administration Obama de le diaboliser et peut-être d’augmenter la crédibilité américaine qui était à la baisse depuis quelques années. Autre effet possible : mettre un frein aux restrictions annoncées pour le budget du Pentagone. Le complexe militaro-industriel apprécierait également que les dépenses soient maintenues et d’autres industries s’attendraient aussi à en profiter.
On ne peut pas non plus mettre complètement de côté que, malgré les souhaits de M. Obama, les néo conservateurs dans son administration comme à l’extérieur cherchent à miner la coopération entre les États-Unis et la Russie dans les négociations avec l’Iran et sur la situation en Syrie. M. Poutine a secondé M. Obama dans ces négociations jusqu’ici.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que les gouvernements américains se mêlent des affaires des autres pays. C’est ce que nous démontre M. Robert Kagan, le mari de Mme Nuland, dans son livre d’histoire publié en 2006 et intitulé, Dangerous Nation. Il insiste auprès de ses compatriotes pou qu’ils prennent conscience que leur pays est encore un empire,
aujourd’hui comme dans le passé. Il écrit : « Les Américains ont intégré une certaine image d’eux-mêmes, à savoir que, par nature, telle une communauté repliée sur elle-même, ce n’était que sporadiquement, qu’elle s’aventurait loin dans le monde généralement pour répondre à des attaques perçues comme menaçantes. Cette image persiste toujours malgré quatre siècles d’expansion continue et d’implication toujours plus profonde dans les affaires mondiales. Et malgré des guerres innombrables, des interventions et des occupations prolongées de pays étrangers, elle est toujours vivante.
M. Kagan voudrais que nous soutenions l’empire avec délice. Je crois, qu’au contraire, il faut le rejeter et le liquider.