Édition du 12 novembre 2024

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États-Unis

Le chef du Pentagone rompt avec Trump et s'oppose à l'invocation de la loi sur l'insurrection. Pourquoi ?

Leçon de choses. Qu’est-ce que l’Etat ? « En dernière instance, une bande d’hommes armés », disait Friedrich Engels. Le coeur de l’Etat, c’est en effet l’appareil de répression (armée, police, etc.). « En dernière instance » (quand il n’y a plus d’autre moyen pour elle de sauver son pouvoir), la classe dominante met bas les masques (si on peut dire en cette période de pandémie) et fait appel à l’armée pour sauver sa domination.

Crédit Photo : Wikimedia Commons
Tiré du site du NPA, 8 juin 2020
Daniel Tanuro

Une telle opération est toujours assez dangereuse, parce que les soldats, même quand ils sont militaires de carrière, sont issus majoritairement des classes populaires. Les jeter contre ces mêmes classes révoltées peut avoir un effet boomerang. Utiliser armée pour mater une révolte populaire ne se fait donc vraiment que « en dernière instance ». En utilisant des troupes « sûres ».

Or, si Trump veut mettre l’armée dans les rues, ce n’est pas parce qu’il n’y aurait plus d’autre solution « en dernière instance » pour sauver la classe capitaliste. Il veut la mettre dans les rues pour sauver son propre projet politique d’instauration d’un Etat policier, d’une dictature appuyée sur sa base sociale petite-bourgeoise, raciste, évangéliste, machiste, fasciste, etc. Son objectif est de mobiliser ses partisans à fond pour gagner l’élection de novembre, en detournant l’attention de sa gestion de la pandémie et du chômage qui explose. En dautres termes, au lieu d’agir « en dernière instance » au mieux des intérêts de sa classe, Trump fait un coup de poker politicien au service de sa clique et de lui-même.

Le problème en effet est que le projet d’extrême-droite de Trump, sa réponse à la révolte des racise.e.s et de leurs alliés.e.s ainsi que sa gestion de la pandémie sont loin d’être majoritaires dans la bourgeoisie étasunienne, et que tout cela risque de provoquer une flambée de luttes sociales d’une très grande force. Une flambée telle que l’armée elle-même sera « contaminée » par le débat sur le racisme institutionnel, et risque de ce fait de devenir inutilisable par la classe dominante. Mutatis mutandis, c’est la leçon de toutes les révolutions, notamment de la révolution portugaise de 1974-75 : quand les débats qui déchirent la société entrent dans les casernes, la situation risque d’échapper au contrôle des possédants.

Introduire le débat sur la discrimination structurelle des Noirs aux Etats-Unis dans l’armée ? Les chefs militaires US n’en veulent à aucun prix. Ils essaient au contraire de faire croire que l’armée US est un exemple « d’intégration » et de promotion sociale sans discrimination. Ils savent qu’ils sont assis sur une poudrière. Et voilà pourquoi le chef du Pentagone, le Secrétaire à La Défense de Trump, s’oppose au projet de Trump d’invoquer le « Insurrection Act » pour mater les manifestations avec l’aide de l’armée.

Du point de vue des intérêts de la bourgeoisie US, ce Monsieur a sans aucun doute raison, de même que tous les responsables US qui plaident pour une politique de modération, Biden en tête. Mais Trump est Président, et cela lui confère des pouvoirs constitutionnels étendus...

La suite à l’écran... et dans la rue : multiplions les initiatives de solidarité avec le mouvement étasunien contre le racisme et les violences policières. Il n’est pas exagéré de dire que l’avenir du monde en dépend !

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