Pourtant, un économiste canadien, Mark Jaccard, professeur à la retraite de l’Université Simon Fraser, est allé s’adresser au Comité de l’énergie et du commerce de la Chambre des représentants des États-Unis pour condamner ce projet de pipeline. Il faut préciser que M. Jaccard est l’un des coauteurs de Global Energy Assessment, un important rapport international publié l’automne dernier, qui visait à proposer une voie vers une stabilisation du climat.
« Nous avons calculé le budget carbone pour toutes les sources d’énergie, dit M. Jaccard, en entrevue avec La Presse. Il est clair que toute installation qui permet de tripler la production des sables bitumineux fait partie d’un scénario qui nous amène à 6, 7 ou 8 degrés de réchauffement en 2100. Ce qui est catastrophique. »
À l’encontre du ministre Oliver, il ne dit pas que les sables bitumineux seraient responsables de ce réchauffement à eux seuls. « Vous pouvez prendre tous les sables bitumineux, tout le charbon du Wyoming ou du Shanxi en Chine, dit-il. Pris individuellement, ils ont tous un impact marginal. Mais il faut regarder l’ensemble. » M. Jaccard croit que le président Barack Obama pourrait changer le cours de l’histoire en refusant le projet Keystone XL. C’est aussi l’opinion des écologistes étatsuniens qui se mobilisent au sud de la frontière.
Pour contrer la propagande qui répand l’idée que « les centrales au charbon des États-Unis émettent 40 fois plus de gaz à effet de serre (GES) que l’industrie canadienne des sables bitumineux. », les activistes s’opposant à Keystone XL donnent un son de cloche différent :
• les 830 000 barils de pétrole par jour provenant des sables bitumineux émettraient du CO2 équivalent à 51 centrales électriques au charbon ;
• ce projet ouvre la voie à l’une des ‘plus grande bombe au carbone’ de la planète ;
• plutôt que les 20 000 à 100 000 emplois temporaires présentés par le lobby, on ne parle que de 3 900 emplois temporaires (construction) et 35 emplois permanents (maintenance).
Le 22 avril était la dernière journée de la période de 45 jours au cours de laquelle les citoyens étatsuniens pouvaient envoyer leurs commentaires au département d’État. Ce dernier a par la suite 45 jours avant de produire le ‘Draft Environmental Impact Statement (EIS)’ puis ensuite produire un rapport final de ‘National Interest Determination’. Donc en principe le président Obama pourrait attendre jusqu’à l’automne pour prendre une décision finale.
Mais terminons avec l’opinion de l’économiste canadien Mark Jaccard, mentionnée plus haut : dans l’ensemble, nous dit-il, le pétrole lourd et coûteux [des sables bitumineux] n’a pas sa place sur le marché, si on met en place des mesures pour freiner les émissions de gaz à effet de serre (GES), sous forme de taxe ou de droit d’émission. Mais c’est justement ce que refuse de faire ce gouvernement soumis aux intérêts des pétrolières.