Notre travail tout au long des consultations nationales de 2023 et des travaux parlementaires depuis mai 2024 nous mène à conclure que l’exclusion des questions relatives à la fin de la préséance des droits miniers et de l’autorégulation de l’industrie, à la protection de l’eau et au retrait efficace des claims miniers nocifs, notamment, a été sciemment décidée par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts et son équipe. Les attentes étaient à la hauteur des problèmes : immenses. Le résultat est à la hauteur du gouvernement actuel en matière environnementale : faible.
En attendant une équipe gouvernementale qui aura le courage d’imposer des normes minières dignes des enjeux de notre époque, l’industrie minière continuera hélas de prospérer sur la vaste majorité du territoire québécois au détriment de l’environnement, des droits des peuples autochtones et des communautés locales et de la sobriété minérale.
Priorités écartées
Le projet de loi sur les mines ne répond pas à la grande majorité des conclusions du rapport des consultations du Ministère des Ressources naturelles et des Forêts publié en octobre 2023.
Comme nous l’avons souligné dans notre mémoire présenté en commission parlementaire cet automne, le projet de loi initialement déposé en mai dernier répondait à moins de 10% des recommandations de la Coalition QMM. Sachant que trop peu d’occasions de réformer le régime minier se présentent, nous avons néanmoins adopté la position d’être favorable à l’étude du projet de loi, à condition qu’y soient ajoutées nos six priorités.
Nous avons donc soumis aux partis représentés à l’Assemblée nationale le mois dernier des dizaines de propositions d’amendements pour corriger le tir. Or, le rapport de la Commission parlementaire indique que la plupart des amendements proposés par les partis d’opposition ont été balayés par l’équipe de la ministre et que peu de gains substantiels ont été réalisés pour l’environnement et les droits des populations directement touchées par les minières.
Au final, les priorités de la Coalition QMM sont absentes du projet de loi sur le point d’être adopté aujourd’hui. Les revoici :
1- Consentement des populations avant l’émission des droits miniers
2- La fin de la préséance des droits miniers sur la protection de l’eau, de l’environnement, des aires à protéger et des populations
3- Un mécanisme efficace de retrait des claims miniers incompatibles avec les autres usages du territoire
4- Une obligation légale de restaurer les mines abandonnées d’ici 10 ans
5- La fin de l’autorégulation du secteur minier
6- L’obligation de retourner les déchets miniers dans les fosses et autres excavations
Aucune réponse appropriée au jugement de la Cour supérieure au sujet des droits des Autochtones
L’étude détaillée du PL63 a été marquée par le jugement de la Cour supérieure du Québec dans l’affaire menée par la Première Nation Mitchikanibikok Inik, rendu le 18 octobre. La Cour a conclu que le gouvernement du Québec porte atteinte aux droits constitutionnels et inhérents de la Première Nation en ne la consultant pas avant d’émettre des claims miniers aux compagnies d’exploration minière. Nous avons formellement demandé à la ministre de prendre acte de cette décision des tribunaux et d’amender son projet de loi en conséquence. Ce qui n’a pas été fait, en dépit des nombreuses tentatives en ce sens de la part de l’opposition.
Quelques avancées ou mesures intéressantes notables
La ministre a concentré son attention sur la soustraction des terres privées à l’activité minière, ce que nous interprétons comme une avancée là où les mesures s’appliqueront – ce qui n’est ni partout ni maintenant. Nous réitérons cependant que cette approche n’aura qu’un effet limité sur les préoccupations, tensions et conflits générés par l’industrie minière avec les populations locales puisque 92% du territoire de la province se trouve en terres publiques, là où se concentrent l’essentiel des activités minières.
Nous soulignons également l’assujettissement de tous les nouveaux projets d’exploitation minière à la procédure d’évaluation et d’examen des impacts sur l’environnement menant au Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), mais déplorons que cette mesure ne s’applique pas à tous les projets d’agrandissement des mines en opération, malgré nos demandes répétées en ce sens. Les mesures pour exiger la réparation des « préjudices » à l’environnement ont aussi retenu notre attention, même si leurs définition et application restent à évaluer concrètement.
La suite
Pour l’heure et désormais, il importe de garder en tête que cette révision de la Loi sur les mines ne répond pas aux attentes de la société civile et que le gros du travail reste entier pour que le Québec ait meilleure mine.
Citations
« Il y a trop peu dans la version finale du projet de loi sur les mines pour qu’il soit qualifié de gain. Oui, il faut saluer que l’industrie recule en terres privées, mais les conflits sont largement provoqués par l’industrie sur les territoires des peuples autochtones en terres publiques. Aujourd’hui, l’environnement et particulièrement l’eau douce sont les grands oubliés de cet exercice de révision bureaucratique », Rodrigue Turgeon, avocat, co-porte-parole de la Coalition Québec meilleure mine et coresponsable de MiningWatch Canada.
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