Cette sortie de Québec solidaire allait provoquer une réaction unanime de désapprobation. L’entreprise niait rapidement le fait que ces enregistrements puissent lui permettre de frauder l’impôt.
Les partis politiques nient tout et minimise le problème des paradis fiscaux.
Les partis politiques dénoncèrent avec force ces demandes d’éclaircissements de Québec solidaire et les médias se firent l’écho des partis, reprenant spontanément la thèse de Quebecor et des fiscalistes, grands conseillers des entreprises qui veulent diminuer leur impôt.
Le Parti Québécois, par la bouche de Pierre Paquette, un autre ex-syndicaliste, devenu le copain de PKP, dénonçait les questions de Québec solidaire comme un coup bas. François Legault a, pour sa part, q déclaré : « Il y a des avantages à être au Delaware, mais je ne serai pas de petite politique avec ça ». Pour lui, il n’y a pas d’avantages fiscaux à tirer d’un enregistrement au Delaware. Le PLQ déjà empêtré dans la question du compte de Philippe Couillard dans l’île de Jersey resta silencieux, mais il n’avait sans doute rien à redire sur la question. Pas surprenant, d’autant que l’ancienne présidente du Conseil du trésor du gouvernement Charest, madame Monique Jérôme-Forget avait elle-même envisagée de transformer le Québec en Delaware du Nord.
Alors que le secret bancaire et la culture de l’opacité rend difficile sinon impossible aux simples citoyenNEs de savoir ce qui se trame dans les milieux financiers, la dénégation du fait que les paradis fiscaux constituent un problème majeur d’équité fiscale, leur faisait rapidement oublier leur engagement d’avril 2013. À cette époque, alors qu’une vaste enquête internationale (offshore leaks) démontrait l’ampleur du phénomène, et sa réalité canadienne et québécoise, Pauline Marois, Philippe Couillard s’affirmaient prêt à s’engager dans la lutte contre ce phénomène. On craignait sans doute alors que la réalité de l’irresponsabilité généralisée du 1% face à ses obligations publiques éclate au grand jour. François Legault se montrait, lui, plus circonspect. On comprend mieux, alors qu’il promet aujourd’hui de faire du Québec « un paradis de la flexibilité » et un Delaware pour les compagnies. » [1]
Mais les grands partis de l’oligarchie ont oublié leurs belles résolutions d’alors et ils n’ont pas pris durant cette campagne électorale l’engagement politique à combattre toutes les formes d’évitement fiscales. Au contraire...
Les journaux se portent à la défense de l’innocence des entreprises
Interrogeant, les fiscalistes qui conseillent les entreprises pour les aider à diminuer leurs impôts, les journalistes ont recueilli la seule réponse qu’ils pouvaient attendre : « les entreprises canadiennes n’y enregistrent pas nécessairement leurs sociétés pour épargner de l’impôt. » [2] Pas nécessairement ?! Puis, les grands médias nous expliquent que les entreprises québécoises font comme les autres... Et on nous énumère des grandes entreprises enregistrées au Delaware pour prétendre qu’il n’y a pas problème puisqu’elles sont nombreuses à le faire.
Malheureusement, la généralisation d’une pratique douteuse ne saurait cautionner un tel genre de pratique... Quand il y a une généralisation d’un problème, on dit qu’il est systémique. On ne se hâte pas d’affirmer qu’il n’existe pas. Quand la commission Charbonneau a démontré le caractère généralisé de la corruption dans la construction, on a appris que toutes les grandes entreprises de la construction et de génie-conseil étaient impliquées dans ce système de corruption. Quand, des législations de complaisance adoptent des lois pour permettre de contourner le fisc en toute légalité, on ne peut s’étonner que cette mangeoire attire le plus grand nombre.
Les médias ont donc tout fait pour mettre le couvercle sur la question des paradis fiscaux. Certains chroniqueurs ont tenté de démontrer le caractère marginal du phénomène, mais jamais les nécessaires éclaircissements n’ont été exigés. Les documents possédés depuis avril 2013 par Radio-Canada grâce à l’enquête du Consortium international de journalistes d’enquête resteront-elles sur les tablettes ou seront-ils utilisés pour enfin écorcher le secret bancaire et faire connaître la vérité sur la réalité de l’évitement fiscal et sur la complicité des décideurs politiques et économiques pour rendre légal dans des paradis fiscaux ce qui dans des États de droit serait illégal.
Dans le Journal de Montréal du 31 mars, Jean-Jacques Samson tenait des propos méprisants contre les porte-parole de Québec solidaire qui ont osé s’en prendre aux intérêts d’un grand entrepreneur, donc au-dessus de tout soupçon. “Mais surtout, ils ont exploité sournoisement l’ignorance populaire des réalités des multinationales pour salir un entrepreneur et l’une des plus florissantes entreprises du Québec. Cette forme de populisme de la part d’intellectuels véreux de la gauche caviar est répugnante.”
Une telle hargne, s’ajoutant à une dénégation aussi unanime de l’ampleur du problème, n’est que l’expression d’un réflexe de classe qui ne peut souffrir qu’on s’attaque à ses intérêts et à ses privilèges.
C’est pourquoi, il faut maintenant exiger que les partis politiques au Québec (comme ceux d’Ottawa d”ailleurs) s’engagent comme le souligne Alain Denault dans la conclusion de son livre.” [3] à :
– “Désigner les paradis fiscaux comme un problème politique causé par la complaisance de nos États
– faire preuve de vigilance au regard de la tentation offshore de nos États
– légiférer de façon à ce l’État impose les revenus dans le lieu même où a cours une activité
– élaborer des lois qui permettre de lutter contre les stratégies d’évasion fiscale respectant la lettre de la loi
– sommer les banques de rendre accessibles toutes les informations dont elles disposent dans le monde
– coordonner la loi fiscale avec des politiques sociales des normes de défenses des écosystèmes
– et enfin éviter le piège de la judiciarisation du débat, plutôt que de sa politisation."
Il faut refuser l’arrogance et l’irresponsabilité des décideurs économiques et politiques qui n’hésitent pas à multiplier les stratagèmes pour concentrer la richesse de la société dans leurs mains et à aggraver ainsi les inégalités sociales. Au lieu de parler vrai, les médias se font ldes relais serviles des ambitions de l’oligarchie. Il était plus que temps de parler vrai. C’est pourquoi, il faut saluer l’initiative de Québec solidaire.