Édition du 19 novembre 2024

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Environnement

Lettre au ministre - Le temps presse pour le caribou de Charlevoix

À l’approche de la fin de la consultation tenue par la Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards, le CRE Capitale-Nationale souhaite porter à votre attention la lettre ci-jointe que nous avons transmise au ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs le 25 mai 2022, pour l’enjoindre de prendre des mesures de protection à la hauteur du défi auquel nous faisons face, et ce dans les plus brefs délais. Le CRE Capitale-Nationale soutient que l’absence de mesures suffisantes pour protéger le caribou aura des répercussions très néfastes, en particulier au plan économique.

Québec, le 19 mai 2022

M. Pierre Dufour
Ministre de la Forêt, de la Faune et des Parcs
5700, 4e avenue Ouest
Québec (QC) G1H 6R1

*Objet : Le temps presse pour les caribous de Charlevoix*

Monsieur le Ministre,

Il ne reste à l’heure actuelle plus que 16 caribous forestiers dans la harde de Charlevoix. Si aucune action n’est prise rapidement, cette dernière est appelée à disparaître complètement. Aux plans écologique, écosystémique, culturel et économique, cette extinction serait très néfaste pour l’ensemble du Québec, en plus de représenter un échec cuisant dans notre capacité à protéger les richesses de notre territoire. Nous vous écrivons aujourd’hui car il est encore possible de renverser cette tendance, et cette décision est en grande partie du ressort de votre ministère.

La *Commission indépendante sur les caribous forestiers et montagnards* (ci-après la Commission), étudie présentement différentes stratégies de protection qui placent la restauration comme un obstacle au développement économique des régions concernées. Nous croyons cependant que ces deux objectifs, loin d’être en opposition, sont complémentaires dans une optique de gestion intégrée et durable du territoire. Dans le contexte actuel, il nous apparaît même qu’il serait plus dommageable économiquement de ne rien faire pour le caribou que de revoir l’encadrement de l’industrie forestière dans les zones sensibles.

La raison est simple : l’absence de mesures adéquates pour protéger le caribou pourrait compromettre le maintien de la certification Forest Stewardship Council (FSC), qui est un incontournable pour notre industrie forestière régionale. Cette dernière permet à l’industrie forestière de vendre le bois récolté sur les marchés nationaux et internationaux avec une valeur ajoutée. Elle contribue à rehausser la réputation de l’industrie québécoise sur le plan environnemental, qui peut pour sa part susciter l’intérêt du public en général, particulièrement pour le recrutement en ressources humaines dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre.

La perte de certification, qui surviendra inévitablement si nos mesures pour protéger le caribou sont insuffisantes, causera à son tour des pertes de marchés dont les impacts se feront certainement sentir sur la pérennité des emplois de l’industrie forestière. Il faut aussi penser aux autres secteurs économiques qui profitent du territoire comme l’industrie touristique. L’absence de volonté de protéger l’habitat du caribou pourrait entraîner une perte de réputation de la région de Charlevoix comme destination. Pour ces raisons, il importe d’opter pour une stratégie ambitieuse à la hauteur du défi auquel nous faisons face.

Malheureusement, les options étudiées présentement par la Commission ne contribuent pas à diminuer significativement la pression sur l’environnement du caribou. Même le scénario consultatif révisé, qui est le plus favorable à la protection de l’espèce, ne fait que limiter le potentiel d’augmentation de la capacité d’exploitation forestière dans Charlevoix dans le futur, sans réduire les activités de coupes forestières qui ont cours ou qui sont prévues. De plus, pour la harde de Charlevoix, il est prévu de limiter le niveau de perturbation de l’habitat du caribou à seulement 35%, alors que les experts estiment que ce seuil n’est pas une cible à atteindre, mais plutôt un maximum à éviter pour favoriser le maintien des populations.

Pour favoriser la probabilité d’autosuffisance de la population de caribous de Charlevoix, le CRE Capitale-Nationale est d’avis qu’il faut plutôt rejoindre un taux de perturbation de l’habitat équivalent à 20% en créant rapidement des aires protégées et en procédant à la fermeture des anciens chemins forestiers et des autres accès au territoire, le tout en concertation avec les usagers du territoire de la région. De telles mesures rendront possible le rétablissement de ces habitats, de façon à ce que la harde de Charlevoix puisse être remise en liberté le plus rapidement possible. Par ailleurs, les travaux nécessaires à la restauration de l’habitat pourront générer de nouveaux emplois plus écoresponsables pour la région.

Le Québec a ici tout avantage à agir promptement dans la protection du caribou. En espérant que vous serez sensible à l’urgence et la gravité de la situation, notre organisme réitère sa volonté de collaborer de manière constructive avec votre ministère dans la recherche de solutions.

Alexandre Turgeon

Directeur général

David Viens

Directeur – Milieux naturels et infrastructures vertes

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