Édition du 17 décembre 2024

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Le blogue de Donald Cuccioletta : La Gauche américaine en 2020 : Stratégies et perspectives

Les socialistes et les progressistes voteront-ils pour le Parti vert ?

Durant cette période d’élections présidentielles, nous sommes bombardé-e-s par les discours simplistes émis par les deux candidats, Donald Trump et Joe Biden, qui se confrontent afin de déterminer qui sera le meilleur représentant de la classe capitaliste américaine pour les quatre prochaines années. Dans mon dernier blogue, j’ai écrit sur le Parti du peuple fondé le 30 août avec un programme ancré dans un populisme de gauche, et en soulignant comment ce parti pourrait nuire au Parti démocrate.

Nous n’avons entendu aucun mot d’ordre de Black LIves Matter (l’organisation la plus importante pour la communauté afro-américaine) sur le vote du 3 novembre. La gauche socialiste, surtout représentée par DSA (Democratic Socialiste of America) et sa revue Jacobin, est encore en réflexion sur la nécessité de développer un mouvement socialiste autonome à l’échelle nationale, pour éventuellement fonder un nouveau Parti socialiste aux États-Unis. À ces réflexions et projets s’ajoute la question que se posent tous les analystes, que fera cette jeunesse qui manifeste dans plus de 150 villes américaines contre le racisme systémique et pour la justice sociale ? Cette cohorte a été éveillée par la présence de Sanders dans la course à la nomination pour le Parti démocrate et ses discours sur la santé universelle et la gratuité scolaire pour les Universités d’État. Et il ne faut pas oublier l’électorat indépendant, qui attendent après les trois débats pour faire leur choix.

Il y a néanmoins un parti qui se présente depuis plusieurs années aux élections présidentielles, soit le Parti vert des États-Unis. Il a surtout fait parler de lui quand son candidat à la présidentielle en 2000, Ralph Nader, a été fustigé par Al Gore et le Parti démocrate, qui l’ont accusé d’avoir permis l’élection aux mains de George W. Bush, en ne soutenant pas Al Gore. Le Parti vert avait été blâmé même si Al Gore comme Président du sénat (contrôlé à l’époque par les démocrates) n’a pas eu le courage de contester le résultat des élections et la décision de la Cour suprême. Comme toujours, les démocrates cherchent toujours un coupable en dehors de leurs rangs : en 2016, c’était la faute de Bernie Sanders.

Le Parti vert a choisi leurs candidates avec des congrès virtuels tenus dans chaque état du pays. Howie Hawkins, un socialiste et un des fondateurs du parti, a été élu candidat au poste de président et comme colistière Angla Nicole Walker. Mme Walker est une militante afro-américaine déjà pressentie au post de vice-présidente pour le Parti socialiste des États-Unis. M. Hawkins est un socialiste de longue date et Mme Walker est aussi une militante socialiste de longue date. Nous pouvons remarqué que la justice climatique est conjuguée à la justice sociale dans les discours de ce parti.

Le parcourt pour le Parti vert, depuis sa fondation, a toujours été très difficile, ne serait-ce que pour se faire accepter sur le bulletin de vote. Le Parti vert ne participe pas aux primaires contrôlés par les deux partis (démocrates et républicains), qui contrôlent aussi le processus électoral pour se placer sur les bulletins de vote dans les 50 états. C’est la raison pour laquelle le Parti vert procède par des congrès (cette fois virtuels) dans chacun des états, qui ,dans les faits, sont une forme de primaires pour tous ceux et toutes celles qui veulent briguer la présidence ou la vice-présidence. Le Parti vert doit aussi amasser un certain nombre de signatures d’électeurs et d’électrices (qui varie selon la constitution de chaque état) pour avoir le droit d’être sur les bulletins de votre dans chacun des cinquante États. Le cas du Parti vert montre à quel point le processus électoral aux États-Unis est antidémocratique. Tandis que, pendant que j’écris ce blogue, les démocrates et les républicains tentent, devant la Cour suprême de l’État de la Pennsylvanie d’éliminer le Parti vert sur le bulletin de vote dans cet État.

Ce n’est pas la première fois que le Parti vert subit cette procédure antidémocratique de la part des démocrates et des républicains. Cela nous aide à comprendre pourquoi le Parti vert dépense jusqu’à 40 ou même 50% des dons de ses partisans et partisanes sur du travail mené par des avocats et des avocates dans chaque état pour inscrire le Parti vert sur les bulletins de vote, tandis le Parti démocrate et le Parti républicain sont automatiquement inscrits sur tous les bulletins de vote. Quelle belle démocratie n’est-ce pas ?

Ironiquement, le programme que le Parti vert met de l’avant pour cette élection est celui présenté par Bernie Sanders au Congrès du Parti démocrate, et évidemment rejeté en bloc par celui-ci.

Un programme de santé universelle, l’application du « Green New Deal » dans le combat contre les changements climatiques, gratuité scolaire pour les Universités d’état, abolition des dettes des étudiants et étudiantes qui viennent des familles à faible revenu, la lutte contre le racisme systémique par un programme fédéral, la réduction des budgets des forces policières qui se procurent des armes militaires auprès du Pentagone, reconnaissance des personnes LGBTQ+ avec les pleins droits selon la constitution, l’établissement de fonds de pension transférables pour les couples mariés de même sexe, abolition des ventes d’armes à feu semi-automatiques et automatiques, le renforcement du libre choix des femmes à l’avortement, etc.. Un programme qui ne différencie pas entre l’écologie et le social, la lutte pour l’égalité et la reconnaissance pour tous et toutes de la communauté LGBTQ+ et la lutte contre le racisme systémique. Tous ces éléments font partie de la même chaine d’oppression et d’exploitation.

Ce n’est une surprise pour personne que le Parti républicain essaie d’utiliser le Parti vert à son avantage surtout, pour les courses dans plusieurs états clés qui sont très serrées. Le candidat à la présidence pour le Parti vert, Howie Hawkins est sur le bulletin de vote dans seulement vingt huit états à l’heure actuelle Il est sur le bulletin de vote en Floride, au Colorado et au Michigan, mais ne l’est pas encore dans les états comme le Wisconsin, le New Hampshire et la Georgie, tous des états clés.

M. Hawkins a déjà dénoncé les manœuvres des républicains, tandis que les démocrates prétendent déjà que si les républicains gagnent, ce sera la faute au Parti vert. Nous savons qu’ici au Québec l’idée du vote stratégique prend encore beaucoup de place. Aux Etats-Unis, avec la montée d’une électorat progressiste, socialiste, écologiste, indépendant sans compter la communauté afro-américaine, les autres communautés visibles et invisibles, le mot ordre « ni les démocrates ni les républicains » demeure assez fort.

C’est clair qu’aux États Unis, voter pour le moins pire n’est plus une option, surtout pour la nouvelle génération de militants et militantes. Trop souvent ceci était la norme, mais une fois au pouvoir les deux partis (démocrates et républicains) étaient pareils.

Il faut voir et comprendre aussi que le système de gouvernement est différent du système québécois. C’est la raison pour laquelle les progressistes, les socialistes, les écologistes dirigent leur attention sur le municipal pour prendre la Ville. Les villes aux États-Unis sont totalement autonomes, et dans les grands centres urbains ils ont leur propre base fiscale, contrairement à nous où les villes sont des marionnettes du provincial.

Prendre la ville, pour eux et pour elles est un objectif primordial afin d’implanter le socialisme à l’échelle locale. En somme, le municipalisme permet de contrôler le palier de gouvernement qui est le plus proche de l’électorat. L’élection municipale de la Ville de New York en novembre 2021 risque de mener à un conseil de ville avec plus de trente conseillers et conseillères sur cinquante-deux qui seront membres d’une coalition socialiste et progressiste. C’est une marge de manœuvre que nous n’avons pas ici. Peut-être nous devrions nous battre pour l’avoir.

Le 20 septembre 2020, nous avons perdu à l’âge de 96 ans une grande militante communiste italienne Rossana Rossanda. Féministe de la première heure, fondatrice avec quelques autres camarades du quotidien communiste Il Manifesto, pour lequel elle a été expulsée du Parti communiste italien (stalinien). Suite à son expulsion, elle a fondé le Parti prolétarien pour le communisme, tout en continuant à écrire et à être la rédactrice de Il Manifesto. Une grande perte pour la lutte de classes en Italie, mais aussi partout dans le monde.

Mille Volte Grazie campagna

Lotta Continua

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