La conquête de la Palestine
Rachad Antonius
Ce court essai a été publié il y a quelques mois, alors que le génocide des Palestiniens par l’État d’Israël était déjà en cours. Il clarifie opportunément la réalité historique en Palestine, qui en est une de conquête depuis une centaine d’années, et le rôle des pays occidentaux, à commencer par la Grande-Bretagne et les États-Unis, dans cette dépossession et l’élimination des Palestiniens. Un essai nécessaire pour rétablir les faits et contrer la propagande qui fait des victimes des bourreaux et des bourreaux des victimes, et qui permet à l’État d’Israël, avec le soutien des pays occidentaux, de violer impunément les droits humains et de poursuivre actuellement cet insoutenable génocide.
Extrait :
La fiction de la conformité au droit international a encore une fois éclaté lorsqu’elle a été confrontée à l’appui des puissances occidentales à la perpétuation du massacre, exprimé par une euphémisme : oui à un cessez-le-feu, mais sous certaines conditions. Il a fallu des mois et plus de 30 000 morts palestiniens pour que, finalement, le Canada demande timidement ce cessez-le-feu, et ce, sous les mêmes conditions que celles demandées par Israël. Ces conditions ont été exigées uniquement de la part du Hamas : libérer tous les otages israéliens. Sans exiger d’Israël le moindre engagement : ni celui d’une cessez-le-feu durable, ni celui de libérer les civils palestiniens emprisonnés sans accusation, ni celui de mettre fin au blocus de Gaza imposé depuis 2007, ni celui de laisser passer les vivres et l’aide humanitaire par voie terrestre. Telle est en effet la position du Canada, exprimée par sa ministre des Affaires étrangères et du Commerce international, Mélanie Joly, lors de l’émission « Tout le monde en parle » à Radio Canada, le 7 avril 2024.
Robert Rumilly, l’homme de Duplessis
Jean-François Nadeau
Ce que m’avait rappelé la victoire de la Coalition avenir Québec (CAQ), en 2018, c’est ce vieux fond conservateur qui perdure, bien terré dans certaines régions du Québec. L’Action démocratique du Québec, la drôlement nommée, avait bien fait revivre un peu l’Union nationale de Maurice Duplessis, mais heureusement toujours en restant dans les marges. Cette fois, avec quelques carriéristes ou arrivistes bien sûr, voilà que cette vieille droite idéologique revient au pouvoir, revient nous hanter pourrait-on dire. « Robert Rumilly, l’homme de Duplessis », celle des biographies de Jean-François Nadeau que j’ai la plus appréciée, bien que j’aie bien aimé aussi « Bourgault » et « Adrien Arcand, führer canadien », nous fait revivre dans le détail cette période bien longue et bien sombre de notre histoire où cette droite exerçait le pouvoir. Pour l’historien Robert Rumilly, les idéaux de la Révolution française ont souillé la France. Il s’exile ainsi au Canada et, à compter de 1928, s’engage dans une activité intellectuelle frénétique qui a marqué son temps. On lui doit pas moins de quatre-vingt-onze livres, dont l’Histoire de la province de Québec en quarante-et-un volumes, que j’ai eu dans ma bibliothèque pendant plusieurs années, sans compter les brochures et les conférences. Écrivain donc prolifique, Rumilly se démarque aussi par son rôle de rassembleur infatigable des intellectuels de droite de son époque. Passionné par la politique, il organise des rapprochements entre des personnages comme Maurice Duplessis, Camillien Houde, Henri Bourassa, René Chaloult… et même Conrad Black. Son énergie est surtout, bien sûr, consacrée au service de l’Union nationale de Duplessis. Pétainiste impénitent, Rumilly accueille en Amérique des collaborateurs des nazis, à commencer par le célèbre Jacques Dugé comte de Bernonville. Jusqu’à la fin de sa vie, en 1983, il demeure fidèle à son maître Charles Maurras, l’idéologue de l’Action française. Somme toute, si l’on n’est guère enclin à aimer un type comme « Robert Rumilly », on aimera cependant bien sa biographie « Robert Rumilly, l’homme de Duplessis ».
Extrait :
La mort remonte à 1972. À Rio de Janeiro, au petit matin du 27 avril, on trouve le corps de Jacques Dugé, comte de Bernonville. Il gît, selon des témoignages, près d’un portrait du maréchal Pétain. De Bernonville, presque 75 ans, est mort par strangulation. On l’a garrotté, un supplice souvent utilisé dans l’Espagne de Franco, une dictature que de Bernonville a estimée presque autant que celle de Pétain.
Le mouvement masculiniste au Québec
Sous la direction de Méissa Blais et Francis Dupuis-Déri
Je vous recommande la lecture de ce bouquin fort instructif qui porte sur ce mouvement réactionnaire qu’est le masculinisme. Depuis quelques années, l’idée que les hommes vont mal gagne des adeptes. Cette prétendue crise de la masculinité aurait pour cause les femmes, et surtout les féministes, qui domineraient la société québécoise. Des partisans de la « cause des hommes » grimpent sur les ponts pour y déployer des banderoles, intentent des poursuites judiciaires contre des militantes, prennent la parole en commissions parlementaires, font du lobbyisme auprès d’institutions politiques, publient des livres et multiplient les attaques sur le Web. Certains vont même jusqu’à harceler des groupes de femmes…
Extrait :
Les remises de prix participent du processus d’héroïsation. Marc Lépine n’a pas reçu de prix, mais des saluts militaires. Durant les années 1990, des soldats du Régiment aéroporté de l’armée canadienne basé à Petawawa ont rendu cet hommage au meurtrier. Les demandes d’explication des députés de l’opposition au ministère de la Défense de l’époque n’ont pas empêché que certains de ces militaires obtiennent une promotion, ni qu’une seconde célébration en hommage à Lépine s’organise au même endroit, l’année suivante. Ces hommages rendus remplissent ici la même fonction que l’attribution d’un prix, à savoir qu’ils commémorent le tueur et confirment son statut de héros.
La grimace
Heinrich Böll
Traduit de l’allemand
Il y a peu de personnages, sauf peut-être certains personnages de Roger Martin du Gard, auxquels je me suis autant identifié qu’à celui de Hans dans « La grimace » d’Heinrich Böll. Ce roman est une virulente critique du catholicisme politique allemand des années 1960. Hans, jeune Allemand, a préféré devenir clown que de se complaire dans la société opportuniste, moralisatrice et oublieuse de l’époque. Un très beau et bon roman encore une fois. Très drôle aussi parfois.
Extrait :
Karl et Sabine se mettaient alors à discuter de ces opuscules et calendriers qui indiquent les périodes durant lesquelles une femme ne risque pas de se faire faire un enfant. Ce qui ne les empêchait pas de les mettre au monde l’un après l’autre. Il ne leur venait même pas à l’esprit que ces discussions pussent nous être pénibles, à Marie et à moi, qui n’arrivions pas à avoir d’enfant. Enfin, quand il était gris, Karl lançait force imprécations contre Rome, accumulant sur la tête du pape et des cardinaux les plus funestes malédictions ; et le plus ridicule de toute l’affaire, c’est que c’était moi qui prenait la défense du pape.
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