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Écrits de prison
Leonard Peltier
Traduit de l’anglais
Je me souviens d’avoir mentionné, il y a plusieurs années, lors d’une rencontre de famille, que si pénibles qu’aient été les injustices commises à l’endroit des Autochtones au Canada (et elles l’ont été), elles ne sont en rien comparables à celles qu’ils ont subies sur le territoire des États-Unis. Mon beau-frère Daniel, lecteur invétéré, était d’accord avec moi. Le cas de Leonard Peltier, emprisonné dans des conditions abominables pendant près de cinquante ans pour des crimes qu’il n’a pas commis en est, parmi d’autres, un exemple accablant. Ce prisonnier politique, condamné à la double perpétuité à l’issue d’un procès ignoble, nous révèle, dans ces écrits, l’ampleur de la haine et du racisme à l’endroit des Autochtones aux États-Unis. Et sa grandeur d’âme aussi ! Un bouquin déchirant, démystifiant, que l’on devrait mettre dans toutes les mains !
Extrait :
Ceci est la vingt-troisième année que je passe en prison pour un crime que je n’ai pas commis. J’ai un peu plus de cinquante-quatre ans aujourd’hui. Je suis donc ici depuis l’âge de 31 ans. L’espérance de vie d’un Indien étant de quarante-cinq ans aux États-Unis, on m’a dit que je devrais vivre deux vies, plus sept années pour voir le jour de ma libération, fixée en 2041. J’aurai alors quatre-vingt-dix-sept ans. Je ne crois pas que j’irais jusque là. Ma vie est une souffrance qui n’en finit pas.
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Les chiens de garde
Paul Nizan
Paul Nizan a écrit cet essai d’une remarquable rigueur intellectuelle au début des années trente. « Les chiens de garde » est un virulent pamphlet à l’encontre des intellectuels de service, éternels défenseurs supposément neutres et pourtant intéressés de la minorité dominante. Si notre monde évolue souvent pour le mieux, « Les chiens de garde » nous décrit tout de même bien ces intellectuels d’autrefois, valets des nantis, qui, à bien des égards, ressemblent à de nombreux intellectuels d’aujourd’hui.
Extrait :
Il se peut en effet que les philosophes n’aient aucune intention claire de tromper. Il se peut même qu’ils croient sincèrement et efficacement aimer les hommes. Je ne pense pas que M. Lalande et ses confrères se réjouissent de l’esclavage économique et moral de la plus grande partie de l’humanité ; mais leur philosophie repose sur cet esclavage, l’accepte, et contribue finalement à son maintien. Les enseignements, les écrits de cette philosophie déçoivent en effet les esclaves et les égarent sur des voies où se dissipe leur révolte.
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Les nouveaux chiens de garde
Serge Halimi
Paul Nizan avait écrit au début des années trente « Les chiens de garde », un virulent pamphlet à l’encontre des intellectuels de service, éternels défenseurs de la minorité dominante. Mais le monde a un peu changé. Plus de soixante ans plus tard, les nouveaux chiens de garde, selon Serge Halimi, ce sont les médias de masse. La presse écrite et audiovisuelle est aujourd’hui dominée par un journalisme de référence, nous explique-t-il, par des groupes industriels et financiers, par une pensée de marché, par des réseaux de connivence. Serge Halimi est surtout connu depuis les années 1970 pour ses remarquables analyses dans le Monde diplomatique. « Les nouveaux chiens de garde » nous ouvre les yeux sur ce que nous observons pourtant tous les jours...
Extrait :
En 1932, pour dénoncer le philosophe qui aimerait dissimuler sous un amas de grands concepts sa participation à l’"actualité impure de son temps", Paul Nizan écrivit un petit essai, "Les chiens de garde". De nos jours, les simulateurs disposent d’une maquilleuse et d’un micro plus souvent que d’une chaire. Metteurs en scène de la réalité sociale et politique, intérieure et extérieure ils les déforment l’une après l’autre. Ils servent les intérêts des maîtres du monde. Ils sont les nouveaux chiens de garde.
Lettres persanes
Montesquieu
J’ai acheté ce bouquin à vingt ans de la Bibliothèque de Smooth Rock Falls. J’en avais commencé la lecture, mais n’avais pas su la terminer. J’ai lu cette fois-ci avec beaucoup de plaisir cette correspondance fictive entre le seigneur persan Uzbek, en voyage en France, et ses proches. Elle compte 161 lettres échangées de 1711 à 1720, dans lesquelles cette figure majeure du siècle des Lumières qu’est Montesquieu nous entretient de nombreuses questions philosophiques et sociologiques et des mœurs et habitudes de plusieurs pays d’Europe et d’Asie, et principalement de la France. Un beau voyage dans le temps à la lumière des idéaux émancipateurs de l’époque.
Extrait :
Je vois bien ce que c’est, ô Troglodytes ! votre vertu commence à vous peser. Dans l’état où vous êtes, n’ayant point de chef, il faut que vous soyez vertueux, malgré vous ; sans cela vous ne sauriez subsister, et vous tomberiez dans le malheur de vos premiers pères. Mais ce joug vous paraît trop dur : vous aimez mieux être soumis à un prince, et obéir à ses lois, moins rigides que vos mœurs. Vous savez que pour lors vous pourrez contenter votre ambition, acquérir des richesses, et languir dans une lâche volupté ; et que, pourvu que vous évitiez de tomber dans les grands crimes, vous n’aurez pas besoin de la vertu. Il s’arrêta un moment, et ses larmes coulèrent plus que jamais. Et que prétendez-vous que je fasse ? Comment se peut-il que je commande quelque chose à un Troglodyte ? Voulez-vous qu’il fasse une action vertueuse parce que je la lui commande, lui qui la ferait tout de même sans moi, et par le seul penchant de la nature ? Ô Troglodytes ! je suis à la fin de mes jours, mon sang est glacé dans mes veines, je vais bientôt revoir vos sacrés aïeux : pourquoi voulez-vous que je les afflige, et que je sois obligé de leur dire que je vous ai laissés sous un autre joug que celui de la vertu ?
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