Sous les flocons, nous y étions, onze d’entre-nous et notre candidate, Marie-Ève Duchesne sous la bannière de Québec solidaire. Quand j’ai entendu une maman parler à sa fille en Anglais, je me suis dit : « Ça y est » ! Je lui ai demandé si elle allait voter pour QS, en lui expliquant que c’est le seul parti qui s’oppose à l’augmentation des frais de garde.
« Que c’est bienvenu, m-a-t-elle répondu, nous en avons bien besoin ». Trente secondes plus tard, elle me posait l’inévitable question : « Donc, c’est le parti anglophone » ?
Je lui ai répondu que non et aussitôt que le mot souveraineté a été prononcé et a flotté comme les flocons entre nous, l’espace s’est agrandi et elle est partie en trombe, un peu comme si j’avais traité sa mère de moins que rien.
La question de l’indépendance trompe plusieurs anglophones du Québec. Il se peut que le temps guérisse les blessures mais, les cicatrices du référendum de 1995 sont encore bien visibles chez plusieurs d’entre eux. Elles sont exploitées de main de maître par le PQ et les Libéraux.
Les Libéraux prennent leur vote pour acquis quelle que soit la situation du parti. Malgré les accusations de corruption qui les atteignent au cœur, il sont sûr de leur vote. Je pense que ces votes contre la souveraineté donnent au PLQ toutes les permissions de pousser à droite bien plus loin que cet électorat ne le veut. Car si ces votes reposent sur la promesse de ne rien faire quant à la souveraineté du Québec, où donc se trouvent les raisons de se donner la peine de faire quoi que ce soit de progressiste ?
Les Anglophones qui votent pour les Libéraux pour appuyer le fédéralisme devraient se gratter la tête un peu. Que vaut le fédéralisme si votre environnement est détruit, si vous ne pouvez plus vous occuper les unEs des autres et si les hommes et femmes politiques sont corrompuEs ? Tous les drapeaux canadiens flottant au vent ne pourront jamais cacher que les Libéraux promettent d’augmenter les cliniques médicales privées partout dans la province. Nulle victoire de tous les Molson nationalistes canadiens s’excitant pour fêter, ne devrait convaincre qui que ce soit de voter pour M. Couillard, lui qui supporte le développement de la médecine privée et les profits qu’elle apportera à ses propriétaires.
C’est quand l’enjeu de la souveraineté est dominant dans une élection que les Libéraux font les meilleurs scores. Qui y perd ? Ce sont les gens ordinaires, ceux et celles qui vont subir une augmentation de 29% des frais de garde ; ceux et celles qui vont se ruiner en tentant de payer les frais de leur résidence privée ; ceux et celles qui vont devoir encore attendre des heures et des heures dans les salles d’urgence ; ceux et celles qui vont s’endetter pour payer leurs frais de scolarité ; ceux et celles qui sont bloquéEs dans les bouchons pendant des heures en écoutant Radio X qui leur raconte que ce n’est pas notre système de transport public qui est déficient mais que tout ce qui manque c’est une voie de plus sur l’autoroute (…). Ça serait vraiment déprimant s’il n’y avait pas d’alternatives mais, que ce soit à droite ou à gauche, il y en a. Les Libéraux ne sont pas seuls.
Les Anglophones qui s’inquiètent de l’augmentation des frais de garde devraient voter pour Québec Solidaire. Comme ceux et celles qui veulent que leur CLSC soit ouvert 24 heures par jour pour ne pas avoir à se rendre à l’urgence de même pour ceux et celles qui sont suffisamment ouvertEs pour comprendre qu’un vote pour les Libéraux apportera plus de difficultés dans la vie courante qu’autre chose. Québec Solidaire est leur alternative.
Même tous les Anglophones qui s’inquiètent de la souveraineté devraient aussi voter pour QS. C’est le seul parti qui propose un large processus de décisions basé sur une constituante qui aboutira à une nouvelle constitution pour le Québec. Ceux et celles qui voudront participer à ce processus, y compris les Anglophones y seront intégréEs. Aucun autre parti ne propose cela.
Voter pour le parti Libéral pour soutenir le fédéralisme c’est supporter un parti corrompu qui favorise les privatisations, l’austérité et les augmentations de frais de toutes sortes dans l’espoir de repousser un inévitable enjeu politique.
Il n’y a pas de doutes que le PQ est inquiet de la montée possible de QS dans la course électorale. La présence de QS l’empêche ce se présenter comme un parti de gauche. Mais je soupçonne que les Libéraux ne sont pas complètement tranquilles non plus. Ils ne peuvent pas revendiquer être à gauche non plus. La seule différence c’est que les Anglophones risquent moins de voter QS à cause de l’enjeu de la souveraineté.
Mais, avec une certaine radicalisation, avec deux ou trois porte-parole bien reconnuEs et unE candidatE anglophone de grand calibre, il serait possible de menacer la dépendance des Anglophones et allophones envers le parti Libéral. Si Québec Solidaire persiste à souligner que le roi est nu, ce n’est qu’une question de temps pour que les électeurs-trices du roi ne finissent par s’en rendre compte.