Édition du 17 décembre 2024

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Féminisme

Le génie pour le contrôle des armes : Des associations et institutions du génie joignent leurs voix aux étudiants et diplômés de Polytechnique

Montréal, 28 novembre 2014 — C’est à l’École Polytechnique de Montréal, lieu du massacre qui a fait quatorze victimes et treize blessés en moins de 25 minutes à l’aide d’une arme à feu légalement acquise, que les étudiants témoins de la tragédie et instigateurs d’un mouvement social pour le contrôle des armes se sont réunis de nouveau, vingt‐cinq années plus tard. En effet, les diplômés et associations étudiantes et de diplômés de Polytechnique membres de PolySeSouvient se voient encore dans l’obligation de lancer leur message en faveur d’un meilleur contrôle des armes, alors qu’un autre projet de loi visant à affaiblir les contrôles (C‐42) (1) fait l’objet de débats parlementaires à la Chambre des Communes.

Mais cette fois, leurs demandes sont appuyées par une gamme d’institutions, d’organismes et d’associations du monde du génie du Québec et du Canada, dont l’Ordre des ingénieurs du Québec, l’École Polytechnique, l’École de technologie supérieure, le Réseau des ingénieurs du Québec, la Confédération pour le rayonnement étudiant en ingénierie au Québec et plusieurs associations étudiantes en génie. 

Nathalie Provost, diplômée de Polytechnique qui a survécu ses blessures après avoir été tirée multiples fois et avoir vu s’éteindre devant elle la vie de six de ses consœurs, dit : « Je suis fière, aujourd’hui, de pouvoir compter non seulement sur la communauté polytechnicienne, mais pour la première fois, sur ma profession, sur la profession du génie, qui se tient debout pour appuyer nos démarches en faveur du contrôle des armes.

Christophe Guy, directeur général et vice‐président du conseil d’administration de Polytechnique Montréal ajoute : « En plus de rendre hommage aux victimes, aux blessés, aux professeurs, aux employés et aux étudiants qui se sont retrouvés au cœur du drame, Polytechnique réitère son soutien au groupe Polysesouvient dans leurs démarches. Nous sommes fiers d’appuyer l’initiative de nos étudiants et de nos diplômés qui ont décidé de s’engager dans cette cause pour un meilleur contrôle des armes. »

Françoise Marchand, membre de la Commission des études de l’École de technologie supérieure dit : « Le premier devoir déontologique des membres de la profession du génie est de respecter ses obligations envers la personne humaine et de tenir compte à tout instant des conséquences de ses travaux sur l’environnement et sur la sécurité de tous. Les démarches des ingénieurs et des futurs ingénieurs visent justement à appliquer les apprentissages acquis dans leurs cours, soit de se baser sur des fondements scientifiques solides pour promouvoir la sécurité publique » Natalia Nuño, membre du C.A. de l’ÉTS, ajoute « En effet, il existe un consensus scientifique mondial sur l’efficacité des mesures de contrôle des armes pour réduire leur mauvais usage. C’est pourquoi, lors de cet anniversaire nous faisons plus que nous souvenir. Le 20 novembre dernier, le conseil d’administration de l’École de technologie supérieure a adopté une motion pour appuyer également la campagne en faveur du contrôle des armes de PolySeSouvient. Nous agissons désormais en faveur d’une cause qui sauve des vies. C’est là un des meilleurs hommages que nous puissions offrir aux quatorze victimes »

Jean‐François Larivée, diplômé de Polytechnique qui a perdu son épouse Maryse Laganière, souligne que « la loi de 1995 représentait un véritable monument à la mémoire des quatorze filles décédées, dont mon épouse Maryse. Parce que cette loi, pendant ses 15 années d’existence, a sauvé des milliers de vies, au moins 300 par année selon les chercheurs de l’Institut national de santé publique. Le resserrement du contrôle des armes avait fait en sorte que ma Maryse ne soit pas morte en vain.

« Si je suis ici avec tous ces gens, 25 années après avoir perdu ma Maryse, c’est parce que dans le dossier du contrôle des armes c’est l’idéologie pro‐armes qui continue de triompher sur la science et le gros bon sens. Depuis avril 2012, le gouvernement Harper a détruit la plupart de nos gains et s’apprête à en affaiblir encore plus. Sauf au Québec, il faut le dire... Le registre est encore en vigueur ici, grâce une injonction des tribunaux obtenue par le gouvernement du Québec qui, lui, a décidé de prioriser la sécurité publique en promettant d’instaurer son propre registre avec les données du registre fédéral. »

Heidi Rathjen, diplômée de Polytechnique et coordonnatrice de PolySeSouvient, explique que depuis qu’il est arrivé au pouvoir en 2006 « le présent gouvernement a démoli ou affaiblit la plupart des mesures obtenues suite à la mobilisation pancanadienne suivant la tuerie et appuyée par les associations canadienne de policiers et des directeurs de service de police, les groupes de femmes luttant contre la violence conjugale et les organismes de prévention du suicides, en plus des familles des victimes. » Il s’agit des contrôles sur la possession (permis de possession), les contrôles sur les armes (enregistrement) et les limites sur la capacité destructrices des armes légales (prohibition des armes à caractère militaire).

« La loi sur le contrôle des armes est aujourd’hui plus faible qu’elle ne l’était au moment de la tuerie. En plus d’avoir aboli le registre des armes d’épaule, les vendeurs n’ont plus à vérifier la validité du permis d’un acheteur, les marchands d’armes n’ont plus à tenir de registre de leurs ventes, et les armes d’assaut, conçues pour tuer des humains, sont de plus en plus accessibles, » renchérit madame Provost. « Et maintenant, à la demande du lobby des armes qui ne sera jamais content jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de la loi, le gouvernement fédéral s’apprête à affaiblir d’avantage nos protections. »

Les deux associations étudiantes de Polytechnique, soit l’Association des étudiants de Polytechnique (AEP) et l’Association des étudiants des cycles supérieurs de Polytechnique (AECSP), deux membres fondateurs de PolySeSouvient (avec le C.A. de l’Association des diplômés de Polytechnique), ont participé à de nombreux débats et commissions parlementaires sur la question. « L’accès facile aux armes à feu était un facteur déterminant dans la tragédie du 6 décembre. Un meilleur contrôle des armes aurait peut‐être empêché ce massacre... peut‐être. Mais ce que l’on sait avec certitude, c’est que le contrôle des armes minimise les chances que ce genre de massacres se produise. C’est ce que confirme les études scientifiques à travers le monde, » déclare Raphaël Beamonte, président de l’AECSP.

« En tant d’individu, mais aussi en tant que société, il faut prendre une position claire contre les affaiblissements de la loi sur le contrôle des armes, demandés et effectués à la demande d’un lobby puissant, qui repose uniquement sur une idéologie pro‐armes, comme c’est le cas aux États‐Unis. En ce 25e anniversaire de la tuerie, au nom de l’Association des étudiants de Polytechnique, j’invite le public et tous les étudiants à poser un geste concret : celui de contacter le député fédéral de votre circonscription et lui mentionner que vous êtes contre la proposition du gouvernement fédéral dans le projet de loi C‐42, et contre l’affaiblissement du contrôle des armes à feu. Vingt‐cinq années plus tard, il faut à nouveau agir en la mémoire des 14 étudiantes assassinées en 1989 » conclut Romain Gayet, président de l’AEP.

La mise en œuvre de la Loi sur les armes à feu et son application se sont écoulées sur quinze années, de 1996 à 2011. L’année 2011, soit la dernière année complète de la mise en œuvre de la Loi dans son intégrité, fut l’année qui a affiché, selon Statistique Canada, « le plus faible taux d’homicides commis à l’aide d’une arme à feu en près de 50 ans » (2), et en plus, cette diminution « peut être attribuée en grande partie à la baisse des homicides commis à l’aide d’une carabine ou d’un fusil de chasse, » (3) soit les armes à feu qui ont été assujetties aux nouveaux contrôles.

Notes

1- Le projet de loi C-42 propose entre autre d’affaiblir les contrôles sur le transport des armes de poing, sur la disponibilité légale d’armes d’assaut et sur les permis de possession, et à éliminer la marge de manœuvre des provinces pour assurer une application rigoureuse de la loi.

2- Statistique Canada, Juristat 2012. http://www.statcan.gc.ca/pub/85-002-x/2012001/article/11738-fra.htm#a1

3- Statistiques Canada, Juristat 2011. http://www.statcan.gc.ca/pub/85-002-x/2011001/article/11561-fra.htm#a4

1) Liste complète des appuis et participants : http://polysesouvient.ca/Documents/PRSS_14_11_28_ListeDesParticipants_PRESSE.pdf

2) Statistiques baisse homicides par armes : http://polysesouvient.ca/Documents/DOCU_14_11_28_StatistiqueCanada_HomicidesArmes.pdf

3) Dossier Ruger Mini‐14 : http://www.polysesouvient.ca/Documents/DOCU_14_11_14_RUGER_MINI_14.pdf

4) Dossier Impacts de C‐42 : http://polysesouvient.ca/Documents/DOCU_14_10_07_Impacts_C42.pdf

5) Déclaration du comité officiel de commémoration du 25e : http://polysesouvient.ca/Documents/DOCU_14_12_06_Declaration25ePoly.pdf

6) Images de PolySeSouvient et des étudiants de Poly en action : http://polysesouvient.ca/Documents/MONT_14_09_00_PancartePolysesouvient.pdf

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