Ce n’est pas la première fois que le débat refait surface. Ailleurs dans le monde, il existe des systèmes de santé au sein desquels on exige des infirmières qu’elles aient des études universitaires pour pratiquer leur métier. On dit de ces infirmières qu’elles seraient mieux adaptées aux transformations du monde de la santé et qu’elles seraient plus polyvalentes. C’est peut-être vrai ailleurs, mais ailleurs, les cégeps n’existent pas.
Les cégeps ont fait leurs preuves
Les collèges d’enseignement général et professionnel (cégep) sont un modèle d’enseignement supérieur unique au monde. Un modèle qui permet l’accès à des études supérieures spécialisées partout sur le territoire, comme c’est le cas en soins infirmiers. Plusieurs futures infirmières devraient s’expatrier pour poursuivre des études universitaires. Cette expatriation a un coût tant pour l’étudiante que pour la région qui verrait une partie de sa main-d’œuvre partir pour les grands centres et, dans plusieurs cas, ne jamais revenir.
Un sondage mené par la Fédération des cégeps en 2012 auprès des étudiantes inscrites au diplôme d’études collégiales (DEC) en soins infirmiers dans l’un ou l’autre des 43 cégeps offrant ce programme révélait que plus de 70 % des personnes répondantes étaient défavorables au BAC obligatoire. Pire encore, si le BAC avait été obligatoire au moment de leur inscription, une bonne partie des étudiantes n’auraient pas choisi la profession. Par ailleurs, 72,2 % des personnes répondantes faisaient leurs études dans leur région d’origine.
Qui plus est, le personnel enseignant en soins infirmiers au collégial doit faire un bon boulot puisque les finissantes du collégial réussissent aussi bien, voire mieux, que celles de l’université à l’examen de l’OIIQ afin d’avoir un permis d’exercice. De plus, à ma connaissance, il n’y a jamais eu de plainte provenant des milieux de soins et rien ne démontre qu’au Québec, la formation collégiale ne serait pas adéquate.
Dans notre modèle, le DEC et le BAC ont deux fonctions bien différentes. Dans un cas, on forme des infirmières techniciennes qui constituent la colonne vertébrale de nos centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS). Dans l’autre cas, on forme des infirmières cliniciennes qui ont une pratique complètement différente (qui serait encore plus efficace si on leur donnait réellement l’occasion de soigner à leur plein potentiel, mais ça c’est une autre histoire).
Pour protéger le public, les infirmières ont besoin de ressources
On appelle les bachelières, à tort, les « super infirmières ». Savez-vous quoi ? Toutes les infirmières sont super, pour peu qu’on leur donne les moyens d’exercer leur profession avec humanité et à la hauteur de leur dévouement. C’est d’ailleurs ça qui leur manque présentement, des ressources. On leur impose du temps supplémentaire obligatoire, on les déplace d’un centre de services à l’autre, à des kilomètres de leur lieu de travail habituel, on les surcharge de patients, sans égard à leur capacité réelle de répondre aux besoins de tant d’humains et à leur santé physique et mentale.
Ce dont les infirmières ont besoin, ce n’est pas d’une année d’études de plus que les infirmières ontariennes, c’est de temps avec leurs familles, d’horaires stables, de collègues en nombre suffisant pour répondre aux besoins et de gestionnaires qui se souviennent que leur travail, c’est de soigner des humains. Battons-nous pour leur donner les moyens de nous soigner, nous et nos proches. Pour la formation, ça va aller, le DEC et le BAC dans leur forme actuelle ne les empêchent pas de bien nous soigner.
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