Les élections sont venues mettre un terme à cette période d’effervescence. D’une part parce que la solidarité des associations étudiantes qui faisaient front commun contre Charest renfermait des conceptions stratégiques mais surtout politiques différentes qui se révèlent aujourd’hui avec le départ des libéraux et l’arrivée du PQ. D’autre part le mouvement étudiant a élevé la lutte au niveau maximum possible à l’intérieur de leurs propres forces. La lutte sociale amorcée par le mouvement étudiant surtout à l’initiative de la CLASSE devait, pour déboucher sur une perspective unitaire de lutte contre l’austérité, compter sur l’apport des forces syndicales. Cette jonction des luttes n’a pas eu lieu. Les directions des centrales ont plutôt joué le rôle d’entremetteurs avec le gouvernement, ils ont refusé l’occasion d’élargir la lutte.
Après plus de 6 mois de grève contre la hausse des droits de scolarité la présidente de la FEUQ, Martine Desjardins, voit dans l’annulation de la hausse par le PQ la fin d’un long conflit. La chute du gouvernement Charest, particulièrement dans une période de mobilisation intense, impose pour l’instant au PQ un changement dans la façon de dresser ses priorités. Mais Pauline Marois annonce déjà qu’elle défendra l’indexation des frais de scolarité lors du sommet sur l’enseignement supérieur. Pierre Duchesne aura semble-t-il beaucoup plus le mandat de faire passer la pilule que de jeter les bases d’une réelle réflexion sociale dans laquelle s’insère l’éducation. Dès lors le débat sur le financement de l’enseignement supérieur risque d’être circonscrit aux ressources internes du milieu universitaire, vidant la question des frais de scolarité de leur essence. Comment alors placer en parallèle la gratuité scolaire, et la gratuité minière, comme disait le slogan. Pour abattre le mur de résistance de la droite qui s’est érigé tout au long de la lutte étudiante et qui à l’évidence continuera de tout mettre en œuvre pour dénigrer leurs revendications, il faut éviter l’isolement et persister dans l’élargissement du débat à l’ensemble des questions sociales.
Nicolas Marceau annonçait déjà après son élection, son intention de maintenir un budget équilibré en agissant comme l’avait fait le PQ à la fin des années ’90. On se souviendra bien sûr du déficit zéro et des coupures drastiques en santé et en éducation effectuées par le gouvernement Bouchard en 1999. Si dans un contexte de lutte intense voire historique, le PQ a aboli la loi 12 (qui devenait caduque en mars 2013) et se devait d’annuler l’augmentation prévue des frais de scolarité, on sent très bien de quel côté le vent tournera en l’absence de mobilisation.
Sans réel débat sur les fondements sociaux de la gratuité scolaire, qui seul peut créer un rapport de force, le sommet sur l’enseignement supérieur servira d’exercice pour justifier l’indexation, laquelle cèdera peu à peu la place, le temps que la tempête se calme, à une augmentation.