En visite au Canada, François Hollande a déclaré ce dimanche que la France et le Canada étaient « déterminés à agir ensemble en matière de climat ». Cela pourrait être une histoire drôle pour l’une des longues soirées de négociations internationales sur le climat. Le Canada est en effet le pays de la planète le plus réfractaire à toute action climatique. Même les Etats-Unis de Barak Obama sont sont doute plus ambitieux en la matière, si cela avait un sens de comparer les résultats de deux des pires cancres de l’histoire récente. Le Canada a en effet décidé récemment de quitter le protocole de Kyoto et de rejoindre les Etats-Unis dans la liste des Etats-voyous de l’inaction climatique.
Le gouvernement conservateur canadien, dirigé par Stéphane Harper, est en effet prêt à tout pour développer l’exploitation et le commerce du pétrole issu des sables bitumineux d’Alberta. Il a multiplié les exemptions fiscales et réglementaires pour attirer les industries pétrolières, comme Total, pour exploiter ce qui est sans doute l’un des pétroles les plus sales de la planète (voir ce reportage accablant). Les conséquences écologiques et sanitaires sont terrifiantes : la forêt boréale et les populations autochtones sont sacrifiées, les terres et les fleuves sont souillés pour des siècles, et l’atmosphère est surchargée de nouvelles émissions de gaz à effets de serre et de substances toxiques.
Pour promouvoir ce pétrole sale, Stéphane Harper, allié aux industries pétrolières, multiplie les pressions diplomatiques. Avec un certain succès puisque l’Union européenne a récemment renoncé à restreindre l’importation de ce pétrole sale à travers la mise en application de sa directive sur la qualité des carburants. C’était la condition de Harper pour finaliser fin septembre l’accord de libre-échange et d’investissements avec le Canada, que le gouvernement français juge comme un « bon accord ». Un accord qui, comme TAFTA, vise à libéraliser le marché transatlantique de l’énergie afin de maintenir, voire d’accroître les importations d’énergies fossiles en Europe. Rien qui ne soit climato-compatible.
Après avoir entendu François Hollande s’auto-décerner un très usurpé rôle de « leadership » en matière climatique avec les Etats-Unis au printemps dernier, il donc assez inquiétant d’entendre le Président de la République déclarer que la France et le Canada seraient « déterminés à agir ensemble en matière de climat » alors que le gouvernement canadien brille par ses politiques et décisions climaticides. François Hollande veut-il faire comme le Canada et quitter le protocole de Kyoto tout en facilitant l’exploitation et le commerce du pétrole des sables bitumineux ? En promouvant l’accord de libre-échange CETA, il y contribue fortement.
A tout juste un an de la conférence de l’ONU sur le changement climatique que la France va accueillir sur l’aéroport du Bourget, François Hollande pourrait plutôt exiger une revoyure du projet d’accord avec le Canada pour y intégrer le respect des exigences climatiques telles que les fixe le dernier rapport du GIEC. Ce serait une véritable avancée, à laquelle il serait difficile de s’opposer, sauf à afficher un mépris et un déni des dérèglements climatiques et de l’urgence à agir. Pour mettre en cohérence les actes avec les paroles. Enfin.
Maxime Combes, membre d’Attac France et de l’Aitec, engagé dans le projet Echo des Alternatives (www.alter-echos.org)