Nous sommes des militants. Nous ne sommes pas tellement de la tendance club de l’âge d’or. Nous sommes plutôt dans le style des Aînés contre la hausse (des droits de scolarité), aussi appelés Têtes blanches, carrés rouges. Nous sommes de ceux et celles qui ont beaucoup marché au printemps dernier. (...)
Le résultat des élections du 4 septembre nous rappelle ces propos du grand écrivain tchèque Milan Kundera dans Les Testaments trahis : “Les petites nations. Ce concept n’est pas quantitatif ; il désigne une situation, un destin : les petites nations ne connaissent pas la sensation heureuse d’être là depuis toujours et à jamais ; elles sont toutes passées, à tel ou tel moment de leur histoire, par l’antichambre de la mort ; toujours confrontées à l’arrogante ignorance des grands, elles voient leur existence perpétuellement menacée ou mise en question ; car leur existence est question”.
D’une élection à l’autre, nous ne savons pas si pourront être mis en place des mécanismes qui favoriseront le maintien, l’épanouissement et l’empowerment (la responsabilisation, l’augmentation de l’autonomie) de notre nation. Comme peuple, nous sommes habitué à être piqué de banderilles par l’histoire et par la géographie, et à toujours nous remettre sur nos pieds, comme un petit taureau tenace et invaincu. Mais tant que les corridas ne seront pas interdites, quelle dépense constante d’énergie ! (...)
Notre projet de souveraineté fait en sorte que les Québécois et les Québécoises sont autre chose que des petits bouchons de liège ballottés sans but sur des flots incontrôlables. Notre projet de souveraineté nous structure, nous donne de la cohésion, du sens et remplit le vide politique ambiant. Notre projet de souveraineté intègre, dynamise et canalise autant des éléments anciens comme la recherche de solidarité et d’égalité sociale, que des courants neufs comme l’altermondialisme et la lutte pour l’environnement. Notre projet de souveraineté et les autres courants novateurs agissent comme des catalyseurs mutuels, décuplant leurs potentiels respectifs de transformation. Plusieurs projets de société pourront être dynamisés par l’accession à la souveraineté et les élections ultérieures sauront arbitrer les nouveaux choix de façon démocratique.
Nous sommes désireux d’oeuvrer, comme d’autres peuples et chacun dans son contexte historique particulier, à la construction d’un foyer national. Le Québec est une cathédrale. C’est pourquoi il est long à bâtir. Il faut faire en sorte que la lenteur de la gestation de la souveraineté nous angoisse de moins en moins. Le professeur de philosophie Michel Seymour, ancien président des Intellectuels pour la souveraineté, disait, dans la revue l’Action nationale d’octobre 2012 : « Les grands projets s’inscrivent dans une trame politique lente ».
Les gens d’affaires, du moins plusieurs d’entre eux, sont aujourd’hui à la recherche de profits immédiats et rapides. Chaque décision est dictée par le désir de rendements hâtifs, peu importent les dommages à l’environnement et les pertes d’emploi. Éthiquement, on se doit d’être à contre-courant de cette mentalité, génératrice de surconsommation et de mise en place d’une société du tout-jetable. L’action à long terme doit prendre plus d’importance, les décisions dictées par le court terme causent trop de dommages.
De même, on ne naît pas citoyen, on le devient.
Oui, la souveraineté est un projet urgent mais bienvenue à celles et ceux qui veulent prendre le temps de faire « de la belle ouvrage » et qui veulent laisser quelque chose de durable à leurs enfants, à leurs petits-enfants (après tout, nous sommes un groupe d’aînés) et à tous les enfants du monde.
Texte intégral sur
http://www.chronijacques.qc.ca/2012/10/memoire-des-aines/