L’éducation n’est pas une affaire de charité
Nous apprenions ce matin que des écoles ont été approchées par la maison de production de madame Lacroix afin de participer à un concours en vue de gagner la rénovation de leurs locaux. J’en ai déjà traité dans un billet précédent : quand l’État se désengage de ses missions, le privé se sent justifié d’occuper le terrain.
Ça ne part pas nécessairement d’une mauvaise intention, mais le résultat est qu’on applique une logique commerciale au détriment du bien commun. C’est ce qui indispose, avec raison, plusieurs parents qui sont confrontés à cette situation.
La ligne est floue
Un peu comme pour les controversés « cubes d’énergie » de Pierre Lavoie, les élèves sont invités à faire de bonnes actions et à remplir un carnet de suivi pour maximiser les chances de leur école. Si l’équipe-école participe à l’initiative parce qu’elle s’inscrit dans leur projet éducatif, tant mieux. En plus, les parents sont invités à publier des photos sur Facebook pour augmenter leurs chances de gagner. Si tout cela sonne comme n’importe quel concours commercial, c’est parce qu’il n’y a pas tant de différence.
La Loi sur l’instruction publique (LIP) est claire : bien que les établissements aient le droit de recevoir des dons, ces derniers ne peuvent être assortis « […] d’une condition prévoyant que les élèves, leurs parents et, de façon générale, les personnes fréquentant l’école feront l’objet d’une sollicitation de nature commerciale […] ».
Or, c’est précisément ce que le concours de Donnez au suivant fait : il impose une participation des élèves et des parents à la promotion toute commerciale d’une émission de télévision d’un diffuseur privé.
La pression est insidieuse. Comme dans le cas des « cubes d’énergie », on met les écoles et les élèves en compétition, et les parents sont obligés de composer avec tout ce qui en découle.
La balle dans le camp des écoles ?
En théorie, c’est aux écoles de faire preuve de jugement et de s’assurer que les dons et les commandites n’entrent pas en contradiction avec la LIP et la mission éducative.
Quand l’État se désengage de l’école, il est tentant pour la communauté scolaire de se tourner vers d’autres sources pour financer sa mission. Je n’ai rien contre les bonnes actions, bien au contraire, mais je considère que tous les élèves méritent un environnement éducatif de qualité, pas seulement ceux qui auront colorié un maximum de cœurs et récolté le plus de « j’aime » sur Facebook.
L’éducation est une mission fondamentale de l’État. Le ministre Proulx devrait cesser de se cacher derrière les conseils d’établissement et faire preuve de leadership au sein de son propre gouvernement en finançant l’école publique à la hauteur de ses besoins.
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