Alain Dubuc : QS, un canari dans une mine de charbon
Pour Alain Dubuc, pilier du fédéralisme qui sévit à La Presse depuis des décennies, le rôle de Québec solidaire ressemble à celui « des canaris dans les mines de charbon de l’ancien temps parce que ces petits oiseaux étaient plus sensibles aux émanations mortelles et dont le malaise avertissait les mineurs en danger ». Et il ajoute « Nous avons besoin de ces gens pour nous rappeler l’existence de ceux que l’on aurait tendance à oublier ». Il joue donc, selon lui, « le rôle d’un révélateur de fractures sociales ».
Dubuc admet aussi que QS « joue un rôle utile dans la vie démocratique car sa présence contribue à la qualité du débat public. Mais le fiel ne tarde pas : « D’autant plus que ses porte-parole dans leurs interventions sont pas mal plus sensés que le programme du parti », lance-t-il après avoir énuméré les bonnes raisons qui justifieraient de voter pour QS (cœur à gauche, déçus du virage à droite du PQ, on voudrait que la politique se fasse autrement, pour la diversité à l’Assemblée nationale, pour Françoise David qui se distingue dans les débats des chefs.)
Ces fleurs arrivent après le passage d’un bonhomme Sept heures aux accents catastrophiques destinés à apeurer des lecteurs qui n’en demandent pas tant. Exemples : Québec Solidaire « n’est pas un parti social-démocrate ni un parti de gauche mais d’extrême gauche qui propose à bien des égards une version soft du rêve cubain et de l’expérience vénézuélienne ». Pour lui le ‘Plan de sortie du pétrole’ de QS « ressemble plus à un chapitre d’un roman de science-fiction qu’à un projet politique »en concluant que « ce petit parti a basculé dans l’utopie ». Le cadre financier de QS ne trouve pas non plus aux yeux de ce dinosaure politique qui écrit « qu’il nage dans le rêve(et qu’il imite) un modèle qui a mené à l’échec partout où il a été essayé ».
Mario Dumont prétend s’inquiéter pour l’avenir de QS
Pour Mario Dumont, artisan du financement électoral douteux qui a profité à l’ADQ dont il était le chef en 2008 et qui s’est recyclé comme chroniqueur au Journal de Montréal, la nouvelle députée solidaire Manon Massé est une « femme hors des normes politiques habituelles (…) Elle a l’aura des gens qui ont du vécu et qui s’assument (…) Elle dégage une authenticité solide et tranquille ». Mario concède aussi que les deux autres députés solidaires, Françoise David et Amir Khadir , « ont pris leur place et sont devenus des monuments dans leurs comtés respectifs. Ils ont certainement des qualités en politique ».
Mais le pot ne tarde pas. Mario se dit en profond désaccord avec les solutions avancées par Québec solidaire dans son programme. De façon malhonnête il n’accorde à QS que 1% de gain en termes de votes le 7 avril sur l’élection précédente alors qu’il a été de 1,6%, soit quelque 67 700 votes de plus qu’en 2012. « Dans le contexte d’un glissade du PQ c’est même inquiétant pour Québec solidaire », estime-t-il.
Au Devoir, on joue les Cassandre
Quant à Michel David du Devoir, il joue les Cassandre avec son cynisme chronique qu’il confond avec du réalisme. « En 2018, pense-t-il, QS ne jouira pas de conditions aussi favorables que le 7 avril (…) Il pourrait même se voir contester le créneau de la gauche si le NPD décide d’aller de l’avant avec son projet de créer une aile québécoise », prévoit-t-il en plus d’avoir à affronter un PQ requinqué.
Un collaborateur au Devoir, David Desjardins, qui signe une chronique dans le numéro de fin de semaine, est ambivalent. Ce chroniqueur à la mode de type bobo « admire le courage (de QS) en même temps qu’il en déplore son angélisme qui le confine au folklore ». Et il ajoute en parlant de ce présumé angélisme : « Ce qui m’irrite le plus souverainement avec QS : le sentiment qu’il n’ira jamais plus loin parce qu’il se contentera d’agir comme notre mauvaise conscience. Cette voix qui vient nous rappeler que nous nous trompons de chemin, exposant toutes nos errances, mais qui n’a à proposer qu’une voie de garage. Une route pas carrossable pour deux secondes, zéro confort, alors que, visiblement, personne n’a envoie de se faire bardasser », conclut-il.
Il faut aussi mentionner l’incartade de la chroniqueuse attitrée du numéro du vendredi au Devoir, Lise Payette, qui a chargé Françoise David en l’affublant du surnom de sainte Françoise : « Sous ses dehors distingués (elle) est une sorte de chat de gouttière, très bien élevé, mais avec des griffes qu’elle garde rentrées autant qu’elle peut », a-t-elle écrit. Quel bel exemple de solidarité pour une championne du féminisme ! Je suis convaincu que rares seraient des politiciens hommes qui se seraient comportés ainsi envers un adversaire de leur sexe.
Montréal, le 20 avril 2014