Édition du 17 décembre 2024

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Lettre à Mme Monique F. Leroux, PDG Caisses Populaires Desjardins : Rémunération excessive des hauts dirigeants

Bonjour Mme Leroux,

Depuis quelques années, nous observons une montée en flèche des rémunérations des principaux dirigeants des banques, compagnies d’assurances, caisses populaires, etc. Les écarts de revenu entre les dirigeants et les travailleurs de la base sont maintenant rendus tellement grands qu’ils deviennent une véritable injustice sociale. Cette situation va, de plus, toujours en s’amplifiant.

Ce déséquilibre entraîne plusieurs conséquences indésirables. D’abord l’écart de revenu provoque des sentiments de malaise et de gêne dans la population en général. Ensuite, la grande majorité des gens riches, par leurs comportements ostentatoires, provoquent des sentiments d’envie, voire de jalousie, de la part de ceux qui possèdent moins. De plus, des rémunérations trop différentes entre la base et le sommet de la pyramide, creuse les écarts entre les classes sociales, ce qui est malsain pour toute la société. En effet, ceci provoque toutes sortes de comportements indésirables comme la délinquance, le vol, la criminalité, la corruption, etc. On a qu’à observer, chez nos voisins du sud, la prolifération des quartiers emmurés et surprotégés pour s’en convaincre. Les grandes différences de niveau de vie entraînent aussi beaucoup de gens, qui n’en ont pas les moyens, dans une spirale de surconsommation, ce qui provoque un sommet inégalé d’endettement. Finalement, la surconsommation des personnes riches et moins riches, mais qui veulent leur ressembler, est un véritable drame sur le plan environnemental. Effectivement, et même si on ne le dit pas souvent, la consommation et la dégradation de l’environnement sont intimement liées. Hervé Kempf l’a bien démontré dans son livre « Comment les riches détruisent la planète » (2007).

Je ne crois pas qu’un émolument de 3,55M$, comme vous avez reçu en 2013, soit raisonnable Mme Leroux. On utilise fréquemment l’argument voulant que d’autres dirigeants de banques ou compagnies gagnent plus. À mon avis, c’est là une continuelle surenchère qui n’a aucune base véritablement logique et raisonnable. Même l’argument voulant que la rémunération élevée se justifie pour garder en poste les gens compétents, voire exceptionnels, ne tient pas la route. En effet, la cupidité est une très mauvaise valeur pour un bon leader. En fait, il devrait exister un « Revenu Maximum Acceptable » (RMA), lequel ne devrait pas dépasser 500 000$ annuellement, tout compris. Je ne connais personne au Québec qui ne puisse très bien vivre avec une telle rémunération. Personnellement, je fonctionne, bien à l’aise, avec un revenu dix fois moins élevé.

Même si vous n’êtes pas la plus haute salariée au Québec, je m’adresse à vous parce que vous êtes la personne la plus susceptible de démarrer un mouvement de recul chez les hauts salariés. Pourquoi vous, mais d’abord parce que vous êtes une femme et que les femmes sont habituellement plus connectées aux valeurs humaines que les hommes. Aussi, parce que vous êtes dans le monde de la coopération et de la solidarité qui sont des valeurs primordiales dans le mouvement des Caisses Populaires Desjardins. Finalement, parce que la Caisse d’Économie Solidaire est ma caisse depuis 15 ans et que mon compte de banque a toujours été dans une Caisse Populaire, et ce, depuis mon adolescence.

Si jamais vous acceptiez de renoncer à une partie importante de ce salaire faramineux, il pourrait en résulter plusieurs effets positifs sur les plans social et environnemental. Votre geste pourrait créer un effet d’entraînement chez les hauts dirigeants. De plus, vous pourriez provoquer un mouvement d’adhésion aux Caisses Populaires de la part de gens, qui comme moi, cherchent une institution financière et une compagnie d’assurance où on y fait une bonne gouvernance. Une bonne gouvernance signifie, entre autre, que les dirigeants reçoivent des salaires raisonnables.

J’espère Mme Leroux que mes arguments auront su vous convaincre des méfaits de comportements financiers prédateurs et des bienfaits d’une approche raisonnable sur le plan des rémunérations.

Pascal Grenier

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