Les classes politiques ocidentales, indéfectibles défenseures d’Israël affectent d’amalgamer le mouvement BDS à des groupes antijudaïques. Elles feignent d’assimiler les discussions souvent animées et l’insistance dont font parfois l’objet les étudiant-e-s israélien-ne-s dans certaines universités canadiennes et américaines à de l’intimidation.
La mauvaise foi la plus crasse le dispute dans ces assertions à l’inculture historique la plus ignorante.
On confond ainsi allégrement la religion (judaïsme) et le sionisme, une idéologie politique. Celle-ci vise à reconstituer ce que ses tenants et tenantes appellent « le grand Israël biblique ».
On oublie que bien des Juifs-ves occidentaux-ales et d’autres régions du monde se sont opposé-e-s à la création forcée de l’État hébreu parce qu’ils-elles redoutaient que la spiritualité juive ne s’y dévoie en nationalisme, particulièrement en un nationalisme spoliateur à l’endroit de la population arabe (les actuel-le-s Palestinien-ne-s) qui occupait le pays depuis toujours. On est alors en présence d’un courant d’opposition au sionisme venant de Juifs et de Juives éclairés, progressistes, un courant de pensée trop souvent occulté par les sionistes et leurs soutiens occidentaux.
On feint de croire en haut lieu (de la part de Justin Trudeau entre autre) que BDS ne serait pour l’essentiel qu’une version édulcorée du nazisme. On y fait semblant de confondre antijudaïsme d’une part et esprit critique à l’endroit du sionisme d’autre part.
Par ailleurs l’ancien député fédéral néo-démocrate Svend Robinson, défenseur assumé de la cause palestinienne refuse d’appuyer BDS sous prétexte que certains de ses membres prônent le retour en Israël de tous les Palestiniens et Palestiniennes de l’exil, ce qui placerait les Juif-ve-s en minorité.
On touche là au coeur du problème. La position de Robinson en faveur de la cause palestinienne l’honore ; toutefois, que soutient-il en réalité ? La démocratie, ce qui comprend en principe le droit au retour des personnes exilées palestiniennes en territoire israélien, ou plutôt le nationalisme israélien ? Les deux ne se recoupent pas nécessairement. Et si un jour, vu le dynamisme démographique des Arabes israélien-ne-s (18% de la population du pays), la situation se renversait et que ceux-ci-celles-ci égalaient désormais la population juive, ou même la dépassaient, que se produirait-il ? Une hypothèse qui n’a rien de farfelu à long terme. On peut craindre alors l’établissement sournois d’un régime d’apartheid juif au nom de la sécurité nationale. Il est peu probable que la classe politique israélienne céderait le pouvoir aux personnes représentants des Arabes israélien-ne-s. Après tout, les sionistes n’ont pas hésité à chasser du territoire convoité la grande majorité de la population qui était arabe à l’époque (milieu-fin de la décennie 1940).
Quelle attitude adopteraient en pareil cas des gens bien intentionnés comme Svend Robinson ?
BDS rassemble divers courants de pensée, qui s’étalent du soutien au retour en Israël (l’ancienne Palestine arabe) de tous les exilés et exilées à celui qui promeut l’établissement d’une partie plus ou moins considérable d’entre eux et elles en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est en passant par la réimplantation d’une partie seulement des descendant-e-s d’exilé-e-s palestinien-ne-s en Israël. Dans pareilles circonstances, ces positions reflètent celles qui déchirent la société palestinienne elle-même.
Les accusations des bien-pensants occidentaux pro-israéliens à l’égard d’un mouvement pacifique et démocratique comme BDS s’avèrent donc fausses et grotesques. La réalité est beaucoup plus nuancée.
Si vous voulez en savoir plus sur BDS-Québec, une assemblée d’information et d’organisation se tiendra le mardi 29 janvier de 18h à 20h30 au 3720, Avenue du Parc à Montréal, second étage, au local de la revue Alternatives. Tous et toutes sont les bienvenu-e-s. En cas d’annulation vu la tempête de neige prévue, elle sera remise à une date ultérieure. Renseignez-vous.
Jean-François Delisle
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