Édition du 10 décembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Canada

La guerre, Yes Sir !

Il s’agit là du titre d’un roman publié par Roch Carrier en 1970 ; c’est une fable à la fois réaliste et surréaliste dont l’action se situe dans le Québec rural au début des des années 1940.

Dernièrement, le président Donald Trump a évoqué lors d’une rencontre à Mar-a-Lago en présence de Justin Trudeau la possibilité que le Canada devienne le cinquante-et-unième État américain dont le premier ministre serait nommé gouverneur. Tout ça si Ottawa s’avérait incapable de faire face aux tarifs douaniers de 25% que Trump menace d’imposer si Ottawa ne resserre pas la sécurité aux frontières. Tous eux n’ont évidemment pas pris au sérieux cette farce. Il semble que Trump, comme bon nombre de ses compatriotes considère les Canadiens comme des Américains du nord, vu l’étroite imbrication de leurs économies respectives. Comme on sait, les liens commerciaux sont intenses entre les deux pays. Il faut y ajouter la proximité culturelle, surtout entre le Canada anglais et son grand voisin du sud. Le Canada est donc un satellite des États-Unis, même s’il bénéficie d’une certaine autonomie vis-à-vis de son puissant voisin, surtout en politique étrangère. Vu le rapport de forces entre les deux pays, peut-il en être autrement ? L’alliance militaire canado-américaine cimente encore davantage les liens entre les deux États.

Mais peut-on pour autant en déduire que l’hypothétique annexion du Canada par Washington irait de soi et que l’opération si elle se produisait, se ferait sans douleur ? certainement pas.

Tout d’abord, aucun indice ne permet de penser que l’ensemble des Américains serait intéressé à "gober" le Canada, une ingestion qui se révélerait vite indigeste. L’intégration, même relative, des deux économies et les liens commerciaux entre les deux États satisfont la plupart des citoyens et citoyennes de la république du sud.

Une annexion ne pourrait que déstabiliser leurs économies respectives, ce qui compromettrait la stabilité politique nord-américaine. Le Mexique est beaucoup plus faible que le Canada mais pour autant Trump n’a jamais évoqué la possibilité de son annexion. Les institutions canadiennes viennent tout droit du parlementarisme britannique, celles des États-Unis sont républicaines. Le type de société et l’échelle des valeurs diffèrent donc beaucoup entre l’un et l’autre pays.

Il faut ensuite relever que le nationalisme "canadian" poserait un problème épineux à Washington en cas d’annexion. La Maison-Blanche se heurterait à une résistance farouche de la part d’une bonne partie de la population. Il en résulterait un conflit majeur et indésirable pour le gouvernement américain. Après tout, le déploiement des investissements américains au Canada rapporte déjà beaucoup aux firmes américaines (et donc indirectement à l’État par le biais des taxes et impôts). Alors, pourquoi risquer de tout bousiller ? Ottawa dispose d’une influence internationale importante et une tentative d’annexion plomberait encore davantage la crédibilité américaine dans le monde déjà très amochée.

Si l’annexion se produisait, comment disposer de cet immense territoire ? Trump en plaisantant, a affirmé à Mar-a-Lago qu’on pourrait diviser le Canada en deux États, l’un libéral et l’autre conservateur, mais dans la réalité il faudrait le diviser en plusieurs États et donc, tenir compte de ses particularités régionales (en particulier de celle du Québec), ce qui représenterait tout un casse-tête pour les dirigeants américains. L’équilibre des forces partisanes au Congrès s’en trouverait bouleversé.

Pour terminer, la question du Québec se poserait. Le Québec a plutôt mauvaise réputation aux "States" vu ses velléités souverainistes et son rôle de trouble-fête au sein de la fédération canadienne. On peut douter que la classe politique américaine et que la plupart de ses électeurs soient intéressés à se charger de ce "fardeau".

Toutes ces considérations constituent de la politique-fiction j’en conviens, mais elle peuvent nous donner une idée des possibilités d’action et de leurs limites chez les deux voisins nord-américains et par ricochet sur les nôtres, ici au Québec.

Jean-François Delisle

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