Édition du 12 novembre 2024

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Élections québécoises 2012

Rue comme dans ruer

Depuis le début de la campagne, Charest évoque la nécessité de résister aux pressions de la rue, tentant ainsi d’associer dans l’esprit des gens pouvoir de la rue et violence de la rue. J’étais parmi les centaines de milliers de citoyens descendus dans la rue depuis le printemps dernier ; je n’y ai côtoyé que des gens pacifiques de tous âges et de toutes provenances. Charest sait parfaitement que, dans ce contexte, la rue représente les citoyens qu’il refuse d’entendre depuis des années.

On a assisté pendant des mois à un spectacle extrêmement pathétique et dramatique : des contingents de policiers casqués et armés intimidant et brutalisant des citoyens comme s’ils faisaient face à des insurgés armés de mitraillettes, et ceci pour maîtriser quelques groupuscules de casseurs facilement repérables et dont on n’est même pas certain qu’ils étaient vraiment des étudiants. Quand Charest évoque l’incendie d’une auto-patrouille pour décrire la violence de la rue, passant sous silence les nombreuses violences policières envers des citoyens de tous âges et particulièrement envers les jeunes, il méprise la population du Québec.

Après avoir créé et entretenu une crise sociale sans précédent au Québec depuis les évènements d’octobre 70, plutôt que de privilégier le dialogue, il a opposé à la jeunesse pacifiquement revendicatrice les matraques, les balles de plastique et les gaz lacrymogènes. Et il pousse le cynisme, l’arrogance et le mépris jusqu’à tenter de nous faire croire qu’il n’en est nullement responsable. Lui et ses complices ont délibérément créé une atmosphère de guerre civile, projetant cette image du Québec même à l’étranger, pour se poser ensuite en sauveur de la paix sociale.

Les aînés se rappelleront la crise d’octobre 70. Les autorités savaient très bien qu’ils ne faisaient pas face à une véritable insurrection. Ils ont profité de cette crise pour mettre sous arrêt tous ceux qui étaient démocratiquement opposés à leurs vues. Rappelez-vous qu’ils ont même emprisonné le député poète Gérald Godin et la grande Pauline Julien, et tant d’autres qui n’avaient rien de violent et de terroriste. Rappelez-vous cet agent de la GRC qui a perdu un bras en amorçant une bombe qu’on allait attribuer au FLQ et ce convoi de la Brink’s censé évacuer hors du Québec les fonds des sièges sociaux et des banques, alors qu’il n’en était rien.

C’est ce genre de stratégie de la peur qu’utilisent tous les petits Charest de ce monde. À Victoriaville, on avait mis en place tous les ingrédients pour que la manifestation dégénère. Une personne ayant participé au nettoyage du site la veille du congrès libéral a déclaré que le fameux tas de briques utilisées par les casseurs ne s’y trouvait pas lorsque les employés ont terminé le travail. Qui a déposé cette palette de briques pendant la nuit précédant l’arrivée des congressistes alors que la police se trouvait bien sûr sur place ? Certainement pas les manifestants ! Des dizaines de témoignages dénoncent les abus commis lors de cet évènement, comme lors de nombreuses manifestations ayant eu lieu depuis le printemps. L’ex-ministre de la sécurité publique Jacques Dupuis a déclaré qu’aucune police politique n’existe au Québec. En effet, nul besoin de créer chez nous une police politique, les corps de police déjà en place s’acquittent très bien de la tâche.

Et la cerise sur le sunday : la Loi 78-12, dénoncée tant par l’ONU que par Amnistie Internationale, la Commission des droits de la personne et le Barreau du Québec, mais considérée par le petit caporal et ses supporteurs comme étant démocratique et nécessaire, comme si cette loi inique ne visait pas, par-delà la crise étudiante, le muselage de toute contestation du gouvernement pseudo-démocratique de Charest.

Ne pas laisser la rue gouverner, clame-t-il sur toutes les tribunes, prononçant chaque fois le mot rue comme une vomissure ! Vivement le 4 septembre que la rue lui donne une bonne ruade au cul-de-sac et que le Québec se refasse enfin une beauté !

Robert Duchesne, Trois-Rivières

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