Dans son texte [1] M. Zanetti, caricature la position de Québec solidaire, puis il s’étonne que ce parti puisse défendre une telle caricature. Voyons donc, de plus près la logique qui sous-tend la position de Québec solidaire en ce qui a trait à l’accession à l’indépendance.
La constituante doit élaborer la constitution d’un pays... Jamais, dans aucun texte de Québec solidaire, vous trouverez que le projet de constitution serait celui d’une constitution provinciale. Il en est de la constitution comme d’un référendum. Si le Parti québécois tient un référendum est-il assuré qu’il va gagner ce référendum. En 1980 et en 1995, le référendum n’a pas été gagnant. Cela signifie-t-il en quelque façon que le PQ n’était pas pour la souveraineté ou plus exactement pour la souveraineté-association. Faire une telle affirmation semble farfelu. Pourtant, lorsqu’on l’applique à la constituante qui doit permettre au Québec d’élaborer la constitution d’un Québec indépendant, à partir d’une élection de cette constituante au suffrage universel, le résultat devrait être établi d’avance. Dans les textes de Québec solidaire, il est affirmé que Québec solidaire se battra pour qu’une telle constitution soit celle d’un pays. Un gouvernement de Québec solidaire en toute logique défendra la position du parti qui forme le gouvernement. Tout ce que disent les porte-parole de Québec solidaire, c’est que la constitution issue de la constituante reflétera la réalité des rapports de force entre les indépendantistes et les fédéralistes... dans la constitution elle-même.
A-t-on refusé aux fédéralistes de participer au référendum en 1980 et en 1995 ? Si les fédéralistes avaient boycotté massivement le référendum, cela aurait été une défaite importante. Parce que le gouvernement fédéral aurait été dans une position beaucoup plus facile de dénier la légitimité du référendum sur la souveraineté. Pourquoi, les fédéralistes n’ont-ils pas boycotté le référendum alors ? C’est que l’aspiration du peuple québécois à pouvoir se prononcer sur son destin avait une telle force que se heurter de plein fouet à cette aspiration risquait d’affaiblir radicalement les tenants du fédéralisme parmi des secteurs significatifs de la population québécoise. C’est pourquoi ils ont dû reconnaître cette aspiration pour mieux la détourner.
L’objectif de Québec solidaire n’a jamais été de rédiger une constitution provinciale, mais de rédiger la constitution d’un pays. Le nier c’est refuser tout simplement de lire les résolutions dûment adoptées à cet égard. Mais, on ne fait pas appel à la souveraineté populaire en fixant les résultats de son expression. Pas plus qu’on ne tient un référendum en affirmant qu’il ne peut avoir qu’un seul résultat. Pourquoi donc en tenir un alors ?
Pourquoi une constituante dans ce contexte ? N’est-ce pas ajouter une inutile étape ? Aucunement. Car, il faut bien tirer le bilan des référendums tenus. Un exercice s’étendant sur quelques semaines, marqué avant tout par le marketing politique, est complètement insuffisant pour que le peuple puisse se réapproprier son pouvoir collectif et exercer sa souveraineté populaire. Non seulement l’exercice ne permet pas au peuple québécois de se prononcer sur le pays qu’il veut, mais il reste aux mains d’une élite la définition d’un projet de pays souhaité que le peuple voudrait établir.
La constituante articule dans une même démarche l’aspiration à un pays indépendant avec l’aspiration à une société juste, inclusive, débarrassée de la domination étrangère y compris sur le terrain économique. La force de cette double aspiration, le temps d’appropriation du projet de pays que le peuple est appelé à définir - le travail de la constituante peut s’étendre sur un ou deux ans -, vont constituer les bases du renforcement de l’indépendantisme au sein de la société québécoise. Voilà le pari de Québec solidaire.
Québec solidaire ne fait aucun compromis sur son projet indépendantiste. Pas plus qu’un Parizeau qui a tenu un référendum qui n’a pas été gagnant ne devrait se faire taxer d’indépendantiste inconséquent. En politique, on fixe les objectifs, on s’engage, on lutte, mais on n’est jamais assuré d’une victoire.
Tous les propos de M. Zanetti sur l’électoralisme de la position de Québec solidaire ne sont pas sérieux. Sur le terrain électoral comme sur le terrain des luttes sociales, Québec solidaire ne fonctionne pas par sondage. Il défend des positions radicales sur nombre de points qui démontrent que c’est son projet social et national qui guide son action. Québec solidaire connaît bien tout le travail de conviction qui reste à mener pour démontrer que les solutions qu’il propose face aux problèmes sociaux et nationaux sont les plus pertinentes. Mais il n’hésite pas à défendre ses propositions avec énergie.
Enfin, M. Zanetti affirme justement que la “stratégie (péquiste du report sine die de la tenue du référendum) est problématique parce qu’elle dépossède la population de l’initiative de recommencer la marche vers son indépendance.” En effet, c’est tout le contraire de la démarche de Québec solidaire qui accorde la primauté à la souveraineté populaire. C’est pourquoi QS affirme que dans un premier mandat, il adoptera une loi mettant sur pied une constituante qui devrait pouvoir soumettre au peuple québécois, dans un référendum, une constitution d’un Québec indépendant. C’est là tout le sens du combat de Québec solidaire. Que Québec solidaire ait la lucidité d’affirmer que la victoire ne sera le fruit que de la détermination et la mobilisation des indépendantistes dans ce combat, ne signifie en rien un manque de détermination. C’est un simple rappel que l’indépendance du Québec sera le fruit d’un long combat pour notre libération nationale.
Puis, il y a une absence étrange dans les propos de M. Zanetti. Quelle est la proposition d’accession à l’indépendance d’Option nationale. Est-elle celle du programme du PQ de 2005, soit la tenue d’un référendum dans un premier mandat ? On ne le saura pas.
Et, dans la réponse au deuxième texte de M. Zanetti, nous pourrons sans doute expliciter les modalités de la construction d’une large unité populaire dans cette lutte pour l’indépendance du Québec et pourquoi les dimensions sociales et nationales de la lutte pour l’indépendance sont les deux faces d’une même pièce.