Nous constatons…
§ que le féminisme, qui vise l’émancipation des femmes et lutte contre l’oppression patriarcale, est maintenant fragmenté et détourné de son objectif. Or, la Convention sur 1’é1imination de toutes les formes de discrimination à 1’égard des femmes (CEDEF), adoptée par l’ONU en 1979 et entrée en vigueur en 1981, lie 187 États, dont le Canada. Le Québec s’est également déclaré lié par cette convention.
§ que certains acquis du mouvement féministe sont fragilisés tant par des revendications à caractère religieux que par d’autres à caractère libertaire en faveur du libre marché de la prostitution, et ce, au nom même du « féminisme ». Nous nous inscrivons en faux contre cette forme d’usurpation des luttes menées antérieurement.
Nous dénonçons…
§ certaines décisions et mesures adoptées ou tolérées par les pouvoirs publics, qui minent, voire abolissent, des acquis durement gagnés par nos luttes.
· les tentatives répétées des élus du Parti conservateur pour interdire le droit d’accès à l’avortement.
· la décision de la Cour suprême du Canada d’accepter qu’une femme puisse témoigner dissimulée sous un niqab, privilégiant ainsi une interprétation discutable de la liberté religieuse au détriment du droit à la dignité des femmes et faisant fi des conventions internationales.
· la création, par le gouvernement fédéral, d’un Bureau de la liberté de religion qui, de facto, place la liberté religieuse au-dessus de la liberté de conscience, alors même que les droits des femmes sont souvent remis en question au nom de cette même liberté.
· un système judiciaire qui accorde de plus en plus de droits aux profiteurs du corps des femmes dans la prostitution, le trafic sexuel et la pornographie, gommant ainsi le fait qu’il s’agit le plus souvent de femmes qui vivent dans la pauvreté.
· les prises de position de certains défenseurs des droits humains qui, au nom de la liberté religieuse, se portent à la défense de pratiques culturelles discriminatoires à l’endroit des femmes.
· le relativisme culturel qui entrave l’accès à l’égalité des filles et des femmes immigrantes en accordant la priorité au respect de certaines traditions et coutumes patriarcales de leur pays d’origine.
· certaines prises de positions d’organismes voués en principe à la défense des droits des femmes, mais qui participent à leur recul en privilégiant les libertés individuelles au détriment des droits collectifs de toutes les femmes et contribuent ainsi à renforcer leur oppression.
· le laxisme qui permet à des professeurs-es, normalement des modèles à suivre pour leurs jeunes élèves, d’afficher des signes religieux ostentatoires dans le cadre de leur fonction, tout particulièrement dans les écoles publiques, alors que ces dernières sont dûment déconfessionnalisées depuis 1997 et soumises à une obligation légale de neutralité religieuse en vertu des Chartes.
Nous demandons…
· à nos gouvernements de respecter leurs engagements au titre de la CEDEF et à nos tribunaux d’en tenir compte dans leurs décisions.
· au gouvernement du Québec d’adopter, dans les meilleurs délais, une Charte de la laïcité, seule garante d’une société démocratique où l’égalité des sexes n’est pas négociable.
· au gouvernement du Québec de faire en sorte que les administrateurs des institutions éducatives protègent mieux les droits des petites filles et des adolescentes dont ils sont responsables.
· à nos gouvernements de réorienter leur action afin de criminaliser les proxénètes et les clients sans pour autant pénaliser les femmes prostituées.
Près de cinq cents personnes ont signé ce manifeste dont la liste complète est publiée sur le site de la Coalition Laïcité Québec www.laicitequebec.org <http://www.laicitequebec.org/> et où il est possible d’inscrire son soutien au manifeste.