*11 janvier 2022*
Il est difficile de se sentir indulgent envers les gouvernements
néolibéraux qui ont détruit l’hôpital public et nous accusent aujourd’hui
d’engorger les urgences. Il est difficile de trouver des excuses à
l’improvisation actuelle au Québec quand on a entendu des médecins réputés
dire sur les ondes de la télé publique dès le mois de novembre qu’en se
basant sur les études récentes et en lisant les rapports venant d’Europe,
on pouvait prévoir que le temps des Fêtes serait un moment où un grand
nombre d’éclosions auraient lieu.
Le nationalisme sanitaire installe une compétition entre les États pour
être les premiers à disposer d’équipements, de vaccins et de médicaments,
ce qui occasionne une grande négligence envers les pays dits « en
développement ». Cela aura pour conséquence que les variants ne cesseront
d’apparaître et réinstaureront un cycle infernal de nouvelles vagues, puis
de vaccination, puis de nouvelles vagues. Ces montagnes russes ne font que
fournir des arguments aux complotistes de tout poil.
On connaît pourtant la règle qui devrait être appliquée. L’OMS l’a dit. Il
faut vacciner toute la planète, sinon ce sera à recommencer sans arrêt. Les
gouvernements occidentaux, qui savent tout cela, ne font pas le geste qui
s’impose : lever les brevets sur les vaccins, permettre aux États dits « du
Sud » de fabriquer les vaccins à moindre coût.
La confiance de la population s’érode à raison parce que les profits
passent encore avant la santé. En tout cas, ce jeu est loin d’être amusant,
et j’estime que ma quatrième dose je dois la donner à un·e citoyen·ne des
pays pauvres. Peut-être devrions-nous forcer ainsi les gouvernements à
laisser le bla-bla pour agir selon des pouvoirs dont ils disposent et
qu’ils refusent pourtant d’exercer.
Je sais ce que vous répondrez : que ça ne marche pas comme ça, qu’on ne
peut pas transférer la dose que l’on refuse directement à quelqu’un qui en
a besoin dans un pays éloigné, que l’on doit négocier avec les autres pays
parce qu’on ne peut pas décider tout seul de lever les brevets, que ces
pays pauvres n’ont pas les infrastructures pour distribuer rapidement ces
vaccins, etc., toutes excellentes excuses pour perpétuer le paternalisme et
ne rien faire comme c’est le cas depuis le début.
Mais la question n’est pas là, c’est un geste politique pour vous forcer à
commencer quelque part. On peut ne pas attendre après les autres pays, on
peut arrêter d’être paternalistes avec les pays pauvres, on peut lever les
brevets, on peut demander aux pays pauvres de quoi ils ont besoin, car
c’est eux qui le savent. Oui, il faut être les premiers à bouger.
C’est un geste politique pour vous rappeler que vous avez le choix :
— continuer le nationalisme sanitaire accompagné du capitalisme
pharmaceutique ;
*ou bien*
— pratiquer la solidarité internationale pour lever les brevets, coordonner
les efforts en lien avec l’OMS et diversifier les approches pour lutter
contre la pandémie.
Faute d’effecteur le bon choix, vous nous condamnez à une dose tous les
trois mois jusqu’à la fin des temps.
On vous prendra au sérieux quand vous le deviendrez. En attendant, ma
quatrième dose, elle va à un pays pauvre.
LAGACÉ, Francis
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