Chaque 29 mars, Haïti marque l’anniversaire de la Constitution de 1987, adoptée par référendum dans un contexte de renouveau démocratique après la chute de la dictature des Duvalier. Conçue comme un rempart contre l’autoritarisme et une garantie des libertés fondamentales, cette Constitution devait symboliser un nouvel élan vers un État de droit et une gouvernance transparente. Trente-huit ans plus tard, la question se pose : ce texte a-t-il réellement été respecté, ou a-t-il été vidé de sa substance par des pratiques politiques contraires à ses principes fondamentaux ?

La Constitution de 1987 a été perçue comme un espoir de rupture avec les abus du passé. Elle instaurait un système présidentiel limité, des contre-pouvoirs pour éviter la concentration excessive de l’autorité et un ensemble de droits et libertés pour les citoyens. Pourtant, dès les premières années, des tentatives de modification et de contournement ont affaibli l’application de ses principes.
L’instabilité politique chronique a souvent entraîné des dérives, avec des gouvernements utilisant des stratagèmes divers pour contourner les exigences constitutionnelles. Les décrets gouvernementaux en période de vacance parlementaire, les reports électoraux récurrents et les manipulations pour prolonger des mandats en sont des exemples frappants.
Le respect de la Constitution haïtienne est à géométrie variable. Les articles garantissant les droits fondamentaux des citoyens, notamment en matière de justice, d’éducation et de conditions de vie dignes, restent largement inappliqués. Par contre, certains articles sont invoqués avec zèle lorsqu’ils servent les intérêts des gouvernants ou des groupes d’influence.
L’indépendance du pouvoir judiciaire, prévue par la Constitution, est restée une utopie. La nomination de juges et la gestion des institutions judiciaires sont fréquemment soumises à des influences politiques, rendant l’application de la loi partiale et inéquitable.
Face à ces dérives, des voix s’élèvent régulièrement pour une refonte de la Constitution. Certains prétendent qu’elle est inadaptée aux réalités du pays et qu’une nouvelle version plus pragmatique est nécessaire. D’autres, en revanche, soulignent que le véritable problème n’est pas la Constitution elle-même, mais plutôt l’absence de volonté politique pour la respecter et la faire appliquer dans son intégralité.
L’avenir du respect de la Constitution haïtienne repose donc sur la capacité des acteurs politiques et de la société civile à en faire un véritable outil de gouvernance, plutôt qu’un texte manipulable au gré des intérêts personnels. Ce 29 mars 2025 doit être une occasion de réflexion collective sur la place du droit dans la construction d’un État moderne et d’une société juste et équilibrée.
Le respect de la Constitution ne doit pas être une option, mais une obligation pour tous, au service d’un avenir stable et prospère pour Haïti.
Smith PRINVIL
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