Édition du 15 avril 2025

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Amérique centrale et du sud et Caraïbes

Une jeunesse instruite pour une société solidaire

‘’ Tant vaut la jeunesse, tant vaut la nation ‘’

Par Bleck Dieuseul Desroses

La capacité d’une formation sociale à se projeter dans le futur dépend de sa politique de jeunesse. Autrement dit, l’avenir d’une société repose sur la capacité de sa jeunesse à faire face aux défis des générations futures. Son rôle est alors crucial dans la construction de l’avenir et sa participation active à la citoyenneté est essentielle pour la démocratisation, le développement et la stabilité. Pour cela, elle doit intégrer certaines valeurs patriotiques comme la solidarité et la fraternité.

La solidarité en Haïti est un feu de paille. Elle se manifeste généralement pendant certains événements malheureux à teneur anxiogène comme les catastrophes naturelles : cyclones dévastateurs et/ou tremblements de terre désastreux.

L’élan de solidarité qui se dégage après le séisme du 12 janvier 2010 disparaît immédiatement sous le poids des intérêts mesquins et individualistes. Celle qui jaillit après celui du 14 août 2021 a pris l’allure d’un show médiatique où stars de la musique et politiciens en quête de visibilité et de légitimé, sans oublier des dirigeants de certaines organisations en panne de visibilité et/ou de financement se bousculent dans le grand Sud pour attirer l’attention de la presse nationale et internationale.

Loin d’être un geste de solidarité et de fraternité réelle, ces tragédies sont généralement l’occasion pour les ONG nationales et internationales de déployer leurs flottes médicales et leurs armées d’experts sans la moindre qualification, bref de pseudo-experts, sur le terrain afin de justifier des dépenses pharaoniques.

De par son éducation familiale et sa formation académique, l’Haïtien ne peut penser ou agir collectivement. Aux problèmes collectifs, il propose des solutions individuelles. Il devient narcissique et se contemple sans cesse dans un miroir qui lui donne une image erronée de sa personne et de sa beauté cosmétique. Il se croit beau même lorsqu’il est répugnant et hideux aux yeux de tous. Il souffre du syndrome du paraître.

Au problème d’électricité, l’Haïtien se procure d’autres sources d’énergie alternatives. Il s’agit d’une marque de distinction sociale témoignant d’une certaine réussite économique et professionnelle. Il le crie haut et fort partout où il passe.

Au problème de la performance du système éducatif, le parent aisé envoie ses enfants à l’étranger ou les confie aux écoles américaines ou françaises. Par naïveté, il met à la disposition d’Haïti un aliéné de plus. C’est typiquement le phénomène décrit dans‘’ Peau noire, Masques blancs ‘’par Frantz Fanon.

Au problème de la détérioration des infrastructures routières, le nanti s’achète des véhicules adaptés pour des sommes exorbitantes. Ainsi se démarque-t-il de la foule.

Au problème de la défaillance du système sanitaire, il se dote d’une carte d’assurance internationale et s’envole à moins d’égratignures vers Cuba, République dominicaine ou Amérique du Nord pour se faire soigner par les meilleurs médecins dans des hôpitaux de première classe sans se soucier du sort des patients de l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH) incendié récemment par les gangs de Village de Dieu.

L’Haïtien aisé ne se soucie jamais du sort des autres. Il ne pense qu’à lui-même et se montre aveugle devant la situation de ses frères. Aucun lien fraternel. Enfermés dans leur confort de petits bourgeois ou de bourgeois réactionnaires dans les hauteurs de Delmas ou de Pétion-Ville, le problème de l’insécurité à Martissant, Cité Soleil, Bel-Air, La Saline, Carrefour n’était jamais pour eux une préoccupation nationale. Ils n’ont compris le poids de ce drame que lorsque les quartiers huppés de l’aire métropolitaine sont devenus également la cible des bandes criminelles.

Quant à l’Haïtien modeste, il n’est solidaire que dans la folie incendiaire. Et la rage de destruction. Sans y être conscients, les manifestants tout comme les membres de l’organisation criminelle Viv Ansam adoptent la même attitude de destruction des biens et des infrastructures du pays.

Pour une société solidaire

La crise actuelle doit amener les élites à repenser la formation sociale haïtienne sur la base d’un nouveau contrat social. Il faut inculquer à la jeunesse des valeurs de solidarité et de fraternité. Ces valeurs sont fondamentales dans la construction d’une société juste, équitable et harmonieuse. Elles garantissent la cohésion sociale en ce sens qu’elles favorisent l’unité et la coopération entre les classes sociales. Elles font disparaître les clivages sociaux et permettent aux membres d’une société de se soutenir mutuellement, de se comprendre et de travailler ensemble pour le bien commun. Elles renforcent l’idée d’une communauté soudée, où chacun se sent responsable du bien-être des autres.

La solidarité est essentielle pour soutenir les personnes en situation de précarité, que ce soit sur le plan économique ou social. Elle encourage les actions de soutien, de partage et d’entraide pour réduire les inégalités et permettre à chacun de mener une vie digne.

Dans une société où les valeurs de solidarité et de fraternité sont présentes, il y a moins de tensions et de conflits. En favorisant le dialogue, l’écoute et la compréhension mutuelle, ces valeurs permettent de créer un environnement pacifique, où les différences sont acceptées et s’interprètent comme un enrichissement de notre humanité.

La solidarité et la fraternité incitent à la prise de responsabilité collective. Elles rappellent que chaque individu fait partie du corps social et que les actions de l’un peuvent entraînent des conséquences sur la vie des autres. Cela encourage à agir pour le bien-être de la communauté, plutôt que pour des intérêts égoïstes et mesquins.

En cultivant des relations basées sur la solidarité et la fraternité, une société favorise également le développement personnel et collectif. Ces valeurs renforcent l’empathie, la bienveillance et l’altruisme, des qualités qui contribuent à l’épanouissement de chaque individu et à la prospérité collective.

La solidarité et la fraternité sont des piliers dans la lutte contre les injustices, les discriminations et l’exclusion sociale. Elles favorisent la mise en place de politiques et d’actions pour créer un environnement plus égalitaire, où chaque personne a les mêmes chances de réussir sa vie sociale et professionnelle.

Pour une école républicaine

Les valeurs de solidarité et fraternité sont des construits. Il s’agit d’un travail quotidien qui s’inscrit dans un projet national élaboré et mis en œuvre par la puissance publique pour construire ou pérenniser les fondements de l’État-Nation. L’école, en tant que couloir de transmission des valeurs républicaines, devrait jouer un rôle crucial dans l’implémentation et le succès de ce projet. Au lieu d’inculquer aux jeunes des valeurs démocratiques et libérales, l’école haïtienne prépare des seigneurs féodaux, des princes auto-dominés pour reprendre un concept du sociologue Jean Anil Louis-Juste.

À la place de l’école féodale et de l’enseignement scolastique génératrice des égoïstes, apatrides, narcissiques, soumis et aliénés, il faut nous une école républicaine authentiquement haïtienne liée à la promotion d’une citoyenneté active, de l’unité nationale et de l’intégration des différentes classes sociales au sein de la société. Cette nouvelle école jouera alors un rôle clé dans la transmission des valeurs républicaines, comme le respect des droits de l’homme, la laïcité, et l’égalité entre les sexes. Pour cela, elle doit être laïque, gratuite et obligatoire pour tous les enfants, indépendamment de leur origine sociale ou de leurs croyances.

Dans une société comme la nôtre marquée par des inégalités socio-économiques criantes et des crises politiques récurrentes, les valeurs solidarité et fraternité sont indispensables pour bâtir un avenir fondé sur la paix, la tolérance et la justice. Elles ne doivent pas uniquement être des principes ontologiques, mais des engagements concrets au quotidien, à travers des actes de générosité, de partage et de bienveillance. Ainsi, la solidarité et la fraternité doivent constituer les piliers de la nouvelle fondation politique haïtienne en vue d’une société plus humaine et plus équitable à travers un système éducatif adapté et républicain. Haïti n’a qu’un choix : soit un pacte de solidarité soit un pacte de suicide collectif.

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