« Si les femmes restent largement sous-représentées au sein des institutions démocratiques québécoises, celles qui décident de s’engager en politique ont d’aussi bons résultats que les hommes, révèle une analyse réalisée par l’agence 37ième Avenue pour Le Devoir. Détruit, le mythe de la femme-poteau aux chances minimes d`être élue. Défait, également, celui voulant que les électeurs favorisent des candidatures d’hommes au moment d’apposer un X sur leur bulletin de vote.
Tous partis confondus, de 2003 à 2012, près de 28 % des candidats aux élections provinciales étaient des femmes. Mais celles-ci avaient des chances égales, parfois même supérieures, de remporter leurs élections que les hommes. » [1]
Mais cela se concrétise-t-il pour les élections de 2014 ?
Les résultats des dernières élections sont loin d’être encourageantes pour les femmes qui veulent s’impliquer en politique. Il y avait 241 candidates femmes tous partis confondus. 34 ont été élues. C’est un recul, les résultats passent de 33 % en 2012 à 27 % en 2014. Au conseil des ministres, il y a 8 femmes sur 27 postes.
Même si les femmes réussissent aussi bien que les hommes, elles sont absentes du terrain politique. Cette lacune a fait dire à la ministre madame Isabelle Vallée qu’il faudrait peut-être envisager établir des quotas.
Qu’en est-il des quotas ?
Solutions ou aggravation de situation ? Les quotas établissent des mesures garantissant des territoires aux femmes. Est-ce discriminatoire pour les hommes ? Les quotas restreignent effectivement la présence des hommes. Mais les hommes occupaient TOUT le territoire alors les quotas ne font que rétablir un déséquilibre.
À preuve, l’établissement de quotas permet aux femmes de se faire élire et de jouer un plus grand rôle en politique.
« Au Costa Rica, la commission électorale a décrété qu’il devait non seulement y avoir 5 0% de femmes candidates,, mais que les partis devait leur réserver la moitié des comtés où ils ont remporté la dernière élection pour qu’elles aient plus de chances d’être élues. Au Sénégal, la nouvelle constitution a instauré des quotas et la représentation des femmes est passée de 22 % à 43 % dès la première élection. » [2]
Actuellement plusieurs pays légifèrent en ce sens.
« En 2012, on dénombrait 52 pays qui avaient soit adopté une législation ou modifié leur constitution pour permettre les quotas, et 50 pays où des partis les avaient adoptés sur une base volontaire. Depuis, 34 autres pays ont eu recours à une législation et on compte 35 pays où la mesure est volontaire, pour un total de 121 pays. » [3]
Face au recul de la dernière élection, il faudra sérieusement se pencher sur la question.
Québec Solidaire en obtenant pour une troisième élection de suite la parité dans les candidatures prouve que, si les partis politiques adoptent des valeurs d’égalité, il est possible que les femmes tentent leur chance. Québec Solidaire le réalise déjà. Quant aux quotas : « Sa porte-parole parlementaire, Françoise David, est d’avis qu’il faudra en quelque sorte se résigner à légiférer sur la question.
« Je pense qu’il va falloir le faire, et je vous le dis presque à regret. On voudrait ne pas en avoir besoin. » — Françoise David, co-porte-parole de Québec solidaire
La parité fait largement consensus au sein de la société québécoise et des formations politiques, mais celles-ci sont rebutées par la charge de travail que l’atteinte de cette parité sous-tend, souligne celle qui a été à la tête de la Fédération des femmes du Québec (FFQ) entre 1994 et 2001.
« Il faut consentir à faire le double d’efforts pour trouver et convaincre les femmes. Si on n’a pas de règles, c’est tellement facile de renoncer à ce travail-là ! », a-t-elle expliqué.
Françoise David suggère d’avoir recours à la carotte et au bâton pour corriger la situation.
Les partis qui présenteraient « un minimum de 40 % » de candidates féminines obtiendraient des « encouragements financiers », tandis que ceux qui n’arrivent pas à dénicher 30% de femmes seraient mis à l’amende, un peu comme en France.
« Mais pour que ce soit convaincant et contraignant, il faudrait que les amendes soient sévères », a-t-elle lancé, précisant au passage que la première chose dont le Québec a besoin, c’est d’un débat public sur la question. » [4]
Donc une politique de la carotte et du bâton. C’est innovateur et cela permet de dépasser les Bémols des quotas. Si les amendes ne sont pas assez sévères, les partis politiques préfèrent souvent payer les amendes que mettre de l’énergie à trouver des femmes. A preuve la France.
Seulement des quotas ?
Les quotas ne sont pas une solution miracle, il faut creuser davantage la question.
Notre mode de scrutin n’incite pas les femmes à faire de la politique. Le potentiel démocratique des petites circonscriptions contre les grosses associations urbaines laissent un goût amer : chaque vote n’a pas le même poids. De plus une seule personne élue par comté est loin d’assurer la parité à l’assemblée nationale, même si plusieurs femmes se portent candidates.
Il faut donc réfléchir à notre mode de scrutin : le scrutin proportionnel. Déjà plusieurs argumentent pour un tel mode de fonctionnement pour établir une démocratie plus large au Québec et éviter qu’un gouvernement soit au pouvoir avec le plus grand nombre de députéEs mais avec des pourcentages de votes moindres que l’opposition officielle. Si le mode de scrutin proportionnel établit des listes nationales paritaires en commençant par des candidatures femmes, la parité est plus facile à obtenir. Il faudra cependant maintenir les quotas pour la partie compensatoire mixte (la personne élue par circonscription) du mode de scrutin.
En plus du mode de scrutin, il faudra revoir certaines pratiques politiques et établir une approche de conciliation famille-travail-militance. Les heures de travail, les heures de réunion, les lieux et les distances de rencontres devront être questionnées. Les attitudes, les comportements et les habitudes machos et patriarcales seront aussi remises en question.
Les femmes s’impliquent déjà en politique dans les tâches de bénévolat, d’encadrement et d’organisation mais n’envisagent pas de se présenter. Il faut donc des mesures capables de développer le goût de se présenter comme candidate. Il faut éviter le forcing mais développer la motivation et l’intérêt surtout des jeunes femmes.
Les acquis pour les femmes en politique sont très fragiles. L’élection de 2014 en est la preuve. Par chance que QS ait la parité pour poser continuellement la discussion sur la place publique. Mais la réflexion est encore à faire.
Chloé Matte Gagné