Les cibles de réduction de GES que se donnent le Canada et le Québec.
Le Canada se fixe les cibles suivantes au niveau de la réduction des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES). D’ici 2020, il se propose de réduire ses émissions de 17 % par rapport à 2005. D’ici 2030, il se propose de réduire ses émissions de 30 % par rapport à 2005 et de 14,% par rapport à 1990. Les cibles du gouvernement du Québec sont plus ambitieuses, car il propose de diminuer ses émissions de 20 % par rapport à 1990 pour 2020 et de 37,5 % par rapport à 1990 pour 2030. C’est une réduction des émissions de 80 à 95 % qu’il vise par rapport à 1990 pour 2050.
Le gaz naturel est-il une source d’énergie pertinente pour atteindre ces cibles ?
L’industrie du gaz naturel prétend que oui. Elle prétend que le gaz naturel aurait un rôle clé à jouer pour réduire les émissions de GES et réaliser la transition énergétique. L’industrie mène une offensive majeure de lobbying et de communication sur ce front mondialement et localement.Elle prétend qu’en privilégiant l’utilisation du gaz naturel dans le transport et les industries, on pourrait réduire notre dépendance au pétrole et permettre ainsi de réduire jusqu’à 32 % des émissions de GES.
En avril 2018, Energir (Gaz Métro) avait 139 lobbyistes pour convaincre le gouvernement de leur prétention. Derrière cette offensive, il y a une augmentation considérable de la production du gaz naturel. En Amérique du Nord en 1990, on produisait 616 milliards de m³. En 2016, la production atteignait 916 milliards de m³, soit une augmentation de 49 %. En 2000, le gaz de schiste comptait pour 5 % de réduction de gaz aux États-Unis, en 2017, elle en représente environ 60 %. Depuis le début des années 2000, les exportations du gaz produit aux États-Unis et le Mexique ont connu une hausse considérable. 75 % de la production commerciale en gaz aux États-Unis, comme au Canada d’ailleurs, provenait de sources non – classiques.
Position du Canada par rapport au gaz naturel
Le gouvernement canadien a maintenu ses subventions afin de créer un environnement concurrentiel pour le gaz naturel liquéfié. C’est ainsi que les sociétés gazières ont pu profiter d’un taux d’imposition plus faible, que les promoteurs se sont vus accorder un traitement fiscal favorable et que les licences d’exploitations ont été prolongées jusqu’à 40 ans.
Position du Québec s’inscrit dans la même logique de soutien au tournant vers le gaz naturel
Dès mai 2014. Le gouvernement du Québec a donné le feu vert à l’exploration à l’exploitation du gaz et du pétrole. Il accorde à ces entreprises un soutien politique et financier proactif et assidu. Dans la présentation de sa politique énergétique, l’Énergie des Québécois, source de croissance, le gouvernement Couillard « explique vouloir miser notamment sur le gaz naturel liquéfié moins polluant que le pétrole ou le diesel comme carburant de transition ». Ce soutien au Gaz naturel prend plusieurs formes : le gouvernement soutient à la hauteur de 3 M$ la mise en place de stations d’approvisionnement en gaz naturel pour favoriser l’acquisition de camions au GNL. Il prévoit consacrer 40,8 M$ en aide financière pour l’acquisition de camions alimentés au gaz naturel. Il prévoit la mise en place de stations de ravitaillement en gaz naturel et ce dernier aura tout sa place dans les stations multicarburants que le gouvernement veut installer sur tout le territoire Québécois. 4,2 M$ sont consacrés à la construction de 6 navires-asphaltiers-bitumiers-chimiquiers fonctionnant au GNL pour le transporteur de pétrole Desgagnés. 1,5 M$ le sera pour l’ajout de voies ferrées, installations de quais, de réservoirs et d’équipements de manutention pour le transbordement de gaz propane à Val d’Or.
Des investissements sont prévus dans cinq projets de construction d’usines de Gaz naturel liquéfié (GNL). Le premier ministre Couillard accorde son appui au projet privé de 7 milliards $ d’un terminal d’exportation de gaz naturel liquéfié aux installations portuaires de Grande-Anse. Il présente ce projet comme le développement d’une énergie de transition. Il va ainsi élargir l’accès aux fonds publics aux projets d’exploitation d’énergies fossiles à un minimum prévu de 200 M$, notamment pour favoriser la transition vers le gaz naturel liquéfié.
L’ensemble de ces mesures vont favoriser la croissance d’Énergir. L’expansion du réseau d’Énergir pourrait se faire sans le développement de l’extraction au Québec, le gouvernement soutient clairement que l’exploitation du gaz naturel au Québec est souhaitable parce que le gaz naturel serait une « énergie de transition ». 53 000 km² du Québec sont déjà couverts par des permis. Des projets d’exploration sont déjà en cours dans Lotbinière, le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie.
Le gaz naturel est-il réellement une « énergie de transition » ? Non !
Le gaz naturel contribue au réchauffement climatique. Non seulement il émet du CO2 au moment de sa combustion, mais au moment de sa production, les puits connaissent des fuites de méthane qui est aussi un puissant gaz à effet de serre. Il justifie son tournant vers le gaz naturel en prétendant que l’exploitation de gaz va permettre de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 25 à 32 % si on le compare à l’essence ou au diesel. Le gouvernement fait abstraction du moment de la combustion et des fuites de méthane qui pour nombre de scientifiques annulent l’avantage du gaz naturel.
Investir en 2018 dans des infrastructures gazières qui procureraient des gains de 25 à 32 % et qui dureront des décennies au détriment d’autres investissements plus porteurs quand nous devons avoir réduit nos émissions de gaz à effet de serre de 37,5 % dans 12 ans et de 80 à 95 % en 33 ans comme le prétend la politique gouvernementale, c’est se fermer les yeux sur les défis qui sont devan5 nous.
Le tournant vers gaz naturel ne nous permettra de réaliser une véritable transition énergétique
Le gaz naturel n’est pas la solution. La transition passe par l’économie d’énergie, l’application et l’amélioration de normes de construction des bâtiments, le passage aux énergies renouvelables, la densification urbaine, le transport collectif électrifié, le transport actif et l’achat local.
Le tournant vers le gaz naturel que nous impose le gouvernement Couillard nous éloigne de la possibilité de réduire réellement les émissions de GES. Il aura un coût carbone de plus en plus important et nous enfermera dans des structures du passé. Ce tournant vers le gaz naturel, c’est du temps perdu qui nous obligera à payer deux fois pour la transition et la mettra véritablement en péril.
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