De Paris,
Omar HADDADOU
Entre liberté d’expression et diffamation, le bien-fondé de l’information boit le calice jusqu’à la lie !
Jubilatoires pour les uns, consternantes pour les autres, les turbulences impétueuses que traverse actuellement la Démocratie française, laisseraient penser à un retour du tout sécuritaire et du bâillonnement institutionnalisé, aiguillonné par une extrême droite euphorique, encline à veiller sur « la chaleur tournante ». Jouant sur les peurs et les entrechoquements circonstanciels, en espérant rafler la mise le jour du scrutin, celle-ci n’hésite pas à électrolyser les QG des forces de l’ordre, en butte à de sérieux accrocs.
C’est incontestablement une année charnière lestée de confrontations politiques à couteaux tirés, et de saisines interposées, à vivre intensément en France. Celle qui s’annonce aujourd’hui sous la trique, aux effets boomerangs, a tous les ingrédients de l’épreuve de force où chaque acteur (trice) joue sa survie.
Une Femme qui n’a nul besoin de coup de projecteurs, a décidé de ne pas se laisser démonter par une procédure prompte et accablante, augurant d’une rude bataille des communiqués.
Candidate socialiste à l’élection régionale, tête de liste Île de France en commun, Audrey Pulvar n’a pas hésité à rendre - avec un aplomb à faire décoller les journalistes de leur siège douillet - la monnaie de sa pièce au Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, en répliquant ce lundi 24 mai 2021 par deux plaintes : La première devant la Cour de justice de la République pour « dénonciation calomnieuse », la seconde au civil pour « diffamation ». Pour maître Ivan Terel, l’un des avocats de Mme Pulvar, sur ces plaintes « il ne s’agit pas d’ajouter de la confusion à la confusion, mais simplement de poser les bases d’un retour à un débat serein". Les vents tournant au détriment de la formation, la contre-offensive s’est aussitôt organisée dans le camp socialiste afin d’éviter le coup de butoir fatal. Consciente de la force de frappe de son adversaire, Pulvar n’a pas tardé à mettre son cabinet d’avocats sur le pied de guerre. D’où la déclaration de sa défense : « Nous espérons que les juridictions ordinaires qui sont elles-mêmes garantes des libertés publiques, sauront faire constater cette diffamation dans les plus brefs délais » annonçait Maître Klugman.
Pour rappel, dans un Tweet, rendu public dimanche 23 mai au soir, le Ministre de l’Intérieur avait annoncé qu’il portait plainte contre la candidate socialiste : « Les propos de Mme Pulvar dépassent le simple cadre d’une campagne électorale et viennent profondément diffamer la police de la République. Je porte plainte au nom du ministère de l’intérieur ». Levée de boucliers au sein de l’opposition qui tire à boulets rouges sur Gérald Darmanin pour avoir loué les policiers au début du rassemblement du 19 mai devant l’Assemblée nationale, en soutien aux forces de l’ordre.
Jugeant « glaçante » la manifestation policière, la candidate socialiste était loin de se figurer la portée de l’onde choc de ses propos et le processus judiciaire y afférant.
Dans un communiqué publié dimanche, la liste de Mme Pulvar réagissait derechef : « Cette tentative d’intimidation d’une candidate d’opposition, par un ministre de l’intérieur, par ailleurs [chargé] de l’organisation des élections (…), est sans précédent sous la Ve République », et d’ajouter « C’est une atteinte à la liberté d’expression d’une extrême gravité ».
Ce corsetage très prononcé dont est l’artisan le Ministre de l’Intérieur, a provoqué une forte exaspération dans les rangs de la gauche, notamment chez la Maire de Paris « Du jamais vu ! À quelques semaines de l’élection régionale, le ministre de l’Intérieur porte plainte pour diffamation contre une candidate tête de liste en Île-de-France. Heureusement nous sommes dans un État de droit. J’ai toute confiance dans la justice de mon pays » s’indignait Anne Hidalgo animée d’ambitions présidentielles.
Dans un communiqué de presse, Ile de France en commun dénonce une manœuvre politicienne et réaffirme sa détermination à aller au bout de cette campagne électorale tumultueuse derrière la candidate Audrey Pulvar.
On l’aura compris. Le décor est planté, les projecteurs actionnés. Reste à assister à la prestation de l’institution judiciaire et ses retombées sur le cours des événements.
O.H
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