Cette politique oppressive se pratique au nom de la supposée antériorité des Juifs et des Juives en Palestine, fondée sur la "racialisation" des tenants et tenantes du judaïsme, ceux-ci se considérant comme supérieurs aux "Arabes". C’est ce qu’on qualifie de "suprémacisme juif".
Cette politique exclusiviste brutale a déjà été dénoncée depuis longtemps puisqu’elle se continue malgré toutes les critiques dont elle est l’objet. Alors, pourquoi y revenir dans le cadre du présent article ?
Pour apporter un point de vue rarement, sinon jamais abordé qui tient en deux remarques d’ensemble.
Tout d’abord, le suprémacisme juif décomplexé pousse, par l’intermédiaire du gouvernement de Tel-Aviv, l’impudence jusqu’à tenter de criminaliser toute forme de solidarité avec la nation palestinienne et par les temps qui courent, cette intimidation s’exerce contre BDS (Boycott, désinvestissement, sanction). C’est une initiative internationale lancée par la société civile palestinienne en 2005 au lendemain de la seconde Intifada, armée celle-là (2000-2005) et qui s’est soldée par un échec.
BDS est un mouvement pacifique prônant pour l’essentiel, comme son nom l’indique, des sanctions économiques et commerciales à l’encontre de l’État hébreu pour qu’il desserre son étau sur la Cisjordanie, Jérusalem-Est et son blocus contre Gaza.
Plusieurs pays occidentaux (dont le Canada et le Québec) comptent désormais des branches de ce mouvement, ce qui a alarmé la classe politique israélienne. Celle-ci a riposté par une stratégie agressive contre BDS par l’entremise de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste qui essaie de faire adopter par divers gouvernements et institutions une définition de "l’antisémitisme" assimilant plus ou moins à un discours haineux toute critique un peu trop poussée au goût de ses promoteurs et promotrices de l’État hébreu et de ses politiques, du moins certaines d’entre elles, ce qui ouvre la voie à la censure institutionnelle et même à d’éventuelles sanctions pénales contre les membres de BDS.
Les gouvernements occidentaux n’ont pas encore tous adopté d’inclure cette définition dans leur arsenal législatif, mais sans aller jusque là, des responsables politiques dénoncent BDS ou gardent à son égard un silence hostile.
L’administration Trump aux États-Unis a bien entendu adopté un décret reprenant cette définition ; le successeur de Trump, Joe Biden a proclamé son désaccord avec BDS. Le gouvernement Trudeau continue d’acheter des produits israéliens provenant de colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie, et ce en dépit de la décision contraire d’une cour de justice. L’Ontario a adopté une motion appuyant la définition de l’Alliance (même si elle n’a pas force de loi). L’arrondissement montréalais de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce a fait pareil et l’Alliance tente de faire accepter sa définition de "l’antisémitisme" par la Ville de Montréal, sans succès jusqu’à maintenant. Mais ce n’est peut-être que partie remise.
Il est peu probable que l’Alliance et ses partisans réussissent à faire adopter une loi contraignante contre BDS, puisque BDS mène une action parfaitement légitime et légale. Une loi l’interdisant ou paralysant ses activités serait sans doute déclarée inconstitutionnelle. La faiblesse juridique de ce projet renvoie à la vulnérabilité politique du sionisme.
Les bien-pensants ne peuvent donc accuser BDS de sympathiser avec le "terrorisme" ; c’est plutôt la violence israélienne qui se trouve ainsi mise à nu, et l’illégalité sur le plan du droit international de sa politique de colonisation.
La seconde remarque qui me vient à l’esprit est que le racisme ne loge pas où on pense. Le soutien inébranlable à l’État hébreu et le constant dénigrement de la cause palestinienne (du moins quand elle est défendue par les armes) de la part de plusieurs classes politiques occidentales révèlent en creux une forme de mépris confinant au racisme vis-à-vis des Palestiniens et Palestiniennes.
Non seulement les gouvernements occidentaux dans leur ensemble n’exercent-ils aucune pression efficace sur leur homologue israélien pour que celui-ci cesse sa colonisation à marche forcée en territoire palestinien, mais ils s’abstiennent en plus de dénoncer les abus israéliens criants contre la population occupée. Ces excès viennent d’un pays souvent décrit comme "la seule démocratie du Proche-Orient", ce qui en dit long par ailleurs sur le jugement porté par les bien-pensants occidentaux sur des cultures politiques qui diffèrent du libéralisme bon chic bon genre à l’occidentale ; en parlant de racisme...
En Occident, on a abondamment (et avec raison) dénoncé les pogroms et la Shoah mais aussi défendu le supposé "droit sacré" d’Israël à l’existence (et ce au détriment des Palestiniens et Palestiniennes), comme s’il existait un lien entre les deux. Mais politiciens et politiciennes de chez nous s’émeuvent beaucoup moins du martyre palestinien très réel et actuel celui-là, imposé par "L’État chouchou" des pays occidentaux : Israël.
Au vu de toutes ces considérations, pourrions-nous conclure à une forme d’anti-palestinianisme s’apparentant à du racisme du côté des bien-pensants ? Nos interrogations seraient plus pertinentes si on les dirigeait en ce sens.
Jean-François Delisle
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