le 10 juillet 2024 | tiré de Courrier international | PHOTO NASUNA STUART-ULIN/NYT
Tyron Richard, originaire de la Grenade, a passé, en 2015 et 2016, dix-huit mois dans trois prisons à sécurité maximale de la province canadienne de l’Ontario. Et ce, relate Radio-Canada, “même s’il n’était pas considéré comme un danger”. Mais seulement parce qu’il avait immigré clandestinement au Canada, et “pour risque de fuite”. Dans une déclaration sous serment publiée par le diffuseur, il raconte notamment avoir subi des douzaines de fouilles à nu.
“Je devais me déshabiller, me retourner, me pencher, écarter mes fesses, subir une inspection de mon anus par un gardien muni d’une lampe de poche, et ensuite subir une inspection visuelle en dessous et autour de mes organes génitaux.”
L’utilisation des toilettes se faisait à la vue de tous dans sa cellule, et les visites se déroulaient sans contact physique mais à travers une vitre, et par l’intermédiaire d’un téléphone, ajoute-t-il. À présent résident permanent au Canada, Tyron Richard s’est dit “fier de pouvoir désormais [se] battre contre cette pratique inhumaine”.
Enchaînés et menottés
Un haut tribunal du pays vient de lui donner raison, ainsi qu’à beaucoup d’autres. La Cour supérieure de l’Ontario vient en effet d’autoriser contre le pouvoir fédéral d’Ottawa un recours collectif qui, précise le diffuseur, “représente 8 360 personnes qui ont été détenues dans 87 prisons provinciales ou territoriales par l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC] entre 2016 et 2023”.
En autorisant cette poursuite judiciaire, le juge Benjamin Glustein a rejeté tous les arguments présentés par les avocats du gouvernement canadien et déclaré que les personnes incarcérées à des fins d’immigration “faisaient face aux mêmes conditions que les détenus criminels, [comme] l’utilisation de chaînes et de menottes”.
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Comme l’a précisé l’organisme Centre justice et foi, qui promeut la justice sociale, l’ASFC a le pouvoir de détenir des migrant-es sur la crainte qu’ils ne se présentent pas à une future procédure d’immigration, si leur identité n’est pas établie, ou encore s’ils représentent un danger pour la sécurité publique. Mais, ajoute Radio-Canada, “les ressortissants étrangers et les résidents permanents qui sont détenus par l’ASFC en vertu de la loi sur l’immigration et la protection des réfugiés ne sont pas accusés d’un crime”.
Ottawa n’a pas encore annoncé s’il ferait appel de la décision du juge.
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Ce n’est pas la première fois que le gouvernement canadien est critiqué de la sorte.La chaîne de télévision de Toronto CP24 et la chaîne panarabe Al-Jazeera avaient rapporté, plus tôt cette année, qu’un autre recours en justice avait été entrepris contre les autorités par des travailleurs saisonniers agricoles étrangers. Ils accusent Ottawa de maintenir en place depuis les années 1960 des programmes d’emploi discriminatoires les concernant, qui les privent de bénéfices et qui les rendent sujets à être exploités par leurs employeurs.
Martin Gauthier
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