Édition du 8 avril 2025

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Élections fédérales 2025

Qui est Mark Carney ?

Note de l’auteur le 22 mars : La première version de cet article fut publiée le 11 mars dans Presse-toi à gauche. Apparaissait le même jour dans Presse-toi à gauche l’article de James Hardwick, dont l’analyse remet carrément en question la mienne. C’est pourquoi dans cette version de mon article, j’inclus quelques paragraphes dans lesquels j’illustre à lectrices et lecteurs le fondement de mon désaccord avec Hardwick.

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Nous vivons présentement au Canada une crise tout à fait historique. Une crise où un Donald Trump, à la fois prédateur et impérialiste, impose au Canada des tarifs massifs qui font en sorte qu’un Québécois sur quatre et un Ontarien sur deux craignent présentement de perdre leur emploi ; une crise où le conservateur Pierre Poilievre, habile manipulateur des réseaux sociaux et jusqu’à peu disciple de Trump, risque d’accéder au pouvoir.

Auteur de Cry of the Earth, Cry of the Poor (2016) et Globalization Under Attack (2017)

Le seul, nous le savons tous, qui pourrait empêcher cette éventualité, est Mark Carney.

Voter pour le Parti libéral, affirment cependant de nombreux progressistes, revient à appuyer le néolibéralisme. Et ceci est d’autant plus vrai, disent-ils, que ce parti, sous la direction de Mark Carney, va faire un virage à droite.

C’est ce que laisse carrément entendre, par exemple, David Moscrop, dans un article du 20 février dernier publié dans The Breach.

Le programme politique de M. Carney et son approche du leadership, affirme Moscrop, représentent un virage à droite pour les libéraux, un engagement à vénérer l’autel du fondamentalisme du marché - et peut-être même un retour à l’austérité et au ‘pragmatisme’ des années 1990 qui nous ont conduits sur la voie de tant de problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui.

C’est aussi ce que laisse entendre James Hardwick dans l’article publié le 10 mars dernier dans Canadian Dimension et dont une version française apparaissait le lendemain dans Presse-toi à gauche.

Carney regarde droit dans les yeux les catastrophes en expansion et en multiplication du capitalisme tardif et reste inébranlable dans sa conviction que les changements structurels sont inutiles, affirme Hardwick. Il voit un monde au bord du gouffre et ne veut rien faire d’autre que de bricoler les subtilités de la politique publique. (...) La vision de Carney pour l’avenir du Canada est celle d’une oligarchie d’oligarques mieux élevés. D’un néolibéralisme avec des ‘valeurs’.

Le Canada a besoin d’un premier ministre capable de reprendre le pouvoir aux forces du capital et d’exercer ce pouvoir dans l’intérêt des citoyen-nes.

Je viens de terminer la lecture de Values : Building a Better World for All, un livre de 527 pages que Mark Carney publiait en 2021.

Ayant analysé en profondeur l’œuvre remarquable de la militante progressiste canadienne Naomi Klein, This Changes Everything : Capitalism vs. The Climate, (2016), j’ai pu comparer les deux livres. Même si Klein fait ressortir davantage que Carney la racine coloniale et prédatrice de la présente crise environnementale ainsi que l’augmentation scandaleuse de l’inégalité de revenu et de richesse qui caractérise l’économie mondiale actuelle, la thèse principale que défendent Carney et Klein, à mon grand étonnement, se ressemble énormément.

L’argument principal de Naomi Klein est que le capitalisme fait la guerre à la vie sur terre et doit être remplacé, d’où le titre de son livre Capitalisme vs l’environnement. Cependant, comme je l’ai démontré dans Cry of the Earth, Cry of the Poor (2016), l’argument de Klein, comme d’ailleurs celui du pape François dans son encyclique sur l’environnement Laudato Si (2017), reste flou et ambigu. Car, malgré leur appel révolutionnaire à remplacer le système, ce qui est constamment et explicitement remis en question par Klein et le pape n’est pas le capitalisme comme tel, mais plutôt la version fondamentaliste, ou néolibérale, de celui-ci. Autrement dit, une société fondée sur les seules forces du libre marché.

Une partie de la gauche, comme en témoignent l’article de David Moscrop et celui de James Hardwick que je viens de citer, présente Mark Carney comme simple défenseur du néolibéralisme. Le Parti libéral sous sa direction, affirme Moscrop, va vénérer l’autel du fondamentalisme du marché. Carney va laisser le pouvoir aux forces du capital, allègue Hardwick, et tout simplement chercher à instaurer un néolibéralisme avec des ‘valeurs’.

Pourtant, Carney fait exactement le contraire dans son livre. Jamais ne l’ai-je vu vénérer l’autel du fondamentalisme du marché. Et jamais ne l’ai-je vu affirmer qu’il fallait laisser le pouvoir aux forces du capital. Le marché, rappelle-t-il souvent, n’a pas de valeur ; seules les personnes humaines en ont. C’est pourquoi le gouvernement doit, dans une économie de marché, orienter, encadrer, et réglementer le marché afin qu’il serve réellement les intérêts de la population et le bien commun. Sans cela, le marché conduit à inégalité scandaleuse de richesse et de revenus et la destruction de l’environnement.

Bien qu’il reconnaisse et admire, comme le fait d’ailleurs Karl Marx, l’efficacité remarquable et l’innovation extraordinaire que favorise le libre marché, Carney critique néanmoins de façon percutante les gouvernements qui transforment celui-ci en vérité et simple foi inviolable, et qui adoptent une politique économique néolibérale de laissez-faire et de déréglementation.

Dans ce qui suit, je vais souligner quelques-unes des idées principales de Values : Building a Better World for All, et reproduire plusieurs extraits qui les illustrent.

Je vais aussi faire une brève critique de James Hardwick, ce militant impressionnant qui, depuis dix ans, se consacre aux adultes en situation de pauvreté et d’itinérance, mais dont l’analyse du livre de Carney révèle, selon moi, un manque étonnant de rigueur. Dans son article, J’ai lu le livre de Mark Carney pour que vous n’ayez pas à le faire, Hardwick présente à lectrices et lecteurs ce qu’il dit être la pensée de Carney. Je vais cependant démontrer, à l’aide de quelques exemples, que Hardwick déforme parfois systématiquement sa pensée, non seulement en lui faisant dire ce qu’il ne dit pas, mais même en lui faisant dire exactement le contraire de ce qu’il dit.

Cela devrait permettre à lectrices et lecteurs de juger si, dans leur opinion, les idées de Mark Carney reflètent celles d’une personne qui vénère l’autel du fondamentalisme du marché, autrement dit, si, comme l’allègue une partie de la gauche, il n’est qu’un néolibéral qui va orienter le Parti libéral davantage vers la droite.

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Carney remet carrément en question le néolibéralisme

Non à un système d’éducation privé pour l’élite, oui à davantage d’investissements en éducation publique et santé. Le Québec accorde beaucoup de place aux écoles privées. Cette politique, affirment les forces progressistes comme Québec solidaire et Debout pour l’école, reflète le néolibéralisme et doit être éliminée. Il y a à peine quelques jours, Québec solidaire présentait d’ailleurs le projet de loi 895 qui va dans ce sens.

Au même moment que Québec solidaire présentait ce projet, le président Donald Trump se préparait à signer un décret visant à réaliser son objectif de longue date, à savoir supprimer le Département de l’éducation des États-Unis. Quelque chose de tout à fait normale pour un président qui s’est entouré d’une douzaine de milliardaires, dont l’homme le plus riche de la planète, Elon Musk, chargé par Trump de couper dans la bureaucratie fédérale, afin, de toute évidence, de laisser plus de place au ‘libre marché’ que contrôlent ses amis milliardaires. Coupures que Musk effectue d’ailleurs avec l’aide de la tronçonneuse que vient de lui donner publiquement son grand admirateur de l’extrême-droite, le président argentin Javier Milei.

Assez étonnamment, le soi-disant ‘néolibéral’ Mark Carney n’est pas du tout d’accord avec la position de Donald Trump. Au niveau de l’éducation, sa position ressemble plutôt à celle de Québec solidaire.

Il est désormais largement reconnu que l’éducation de la petite enfance est essentielle, » affirme Carney. « Il ne s’agit pas simplement d’envoyer les enfants à l’école, mais aussi de leur permettre de s’impliquer et de former des communautés composées de personnes d’origines diverses et dotées d’expériences passées diverses. Le système scolaire public doit devenir la voie de la mobilité sociale et de l’excellence. Permettre un système privé parallèle pour les élites est économiquement, socialement et moralement désastreux. Un enseignement public de qualité exige de recruter et de former les enseignants, et de permettre à ceux-ci et celles-ci un perfectionnant constant, y compris en leur accordant des congés sabbatiques. Il exige des parcours d’apprentissage différenciés pour les différentes forces des élèves, mais avec une certaine flexibilité afin qu’ils et elles puissent passer d’une cohorte à l’autre. Il exige aussi de gros investissements et une expérimentation constante.

Peu étonnamment, Hardwick évite de reproduire, dans son article, cet extrait du livre de Carney, car le faire remettrait en question sa thèse principale selon laquelle Carney ne serait qu’un néolibéral. Il est bien connu que les néolibéraux veulent mettre la hache dans l’école publique, et prônent carrément la privatisation de l’éducation. Ce qu’a d’ailleurs fait le pionnier du néolibéralisme, le dictateur Augusto Pinochet au Chili.

Cet extrait qu’il omet montre aussi la fausseté d’une autre allégation que Hardwick fait pour appuyer sa thèse. Lorsque Carney se réfère au délabrement des infrastructures sociales, affirme Hardwick, il ne parle jamais de la nécessité d’augmenter « les dépenses publiques dans les domaines de la santé et de l’éducation ». Voilà la preuve qu’il est un néolibéral ! Pourtant, dans l’extrait que je reproduis, Carney mentionne explicitement le besoin de gros investissements publiques dans le système d’éducation publique.

Voyons maintenant si Hardwick a raison d’alléguer que Carney ne parle jamais, dans son livre, de la nécessité que le gouvernement investisse en santé. S’il a raison aussi d’alléguer que Carney, lorsqu’il se réfère à la stagnation des revenus, ne parle pas de l’augmentation du salaire minimum et de l’augmentation du pouvoir des syndicats.

Premièrement, lorsque Carney souligne l’importance de saines institutions si on veut que l’économie serve le bien commun, il ne dit pas explicitement qu’il faut augmenter le pouvoir des syndicats, mais il en fait cependant ressortir l’importance.

Des institutions fortes et des marchés justes et efficaces sont les fondements de l’opportunité pour tous, affirme Carney. (...) Il s’agit d’une infrastructure sociale, qui comprend des institutions formelles - comme les parlements, les systèmes judiciaires, les banques centrales, les filets de sécurité sociale et les écoles - et des associations et groupes informels, comme les syndicats, les guildes et les organisations caritatives.

Deuxièmement, dans les nombreuses pages de son livre qu’il consacre à la pandémie Covid-19, Carney souligne et déplore le fait que les employés et employées du secteur de la santé, qui accomplissaient pourtant les tâches les plus importantes pour la population, étaient très mal payés et jouissaient de très mauvaises conditions de travail. Ils étaient aussi les plus exposés au virus, ce qui leur était souvent fatal. Les gouvernements, insiste-t-il, doivent remédier à cette situation et davantage investir pour se préparer à de futures pandémies.

À la suite de la crise sanitaire, » écrit Carney, « il est raisonnable de s’attendre à ce que le public réclame du gouvernement une amélioration de la qualité et de la couverture de l’aide sociale et des soins médicaux, qu’il accorde une plus grande attention à la gestion des risques et qu’il tienne davantage compte de l’avis des experts scientifiques.

Érigé en foi, le marché détruit les valeurs humaines les plus fondamentales. Lorsque je lisais certains passages du livre de Carney, je reconnaissais chez lui la même révolte que ressentait le jeune Karl Marx lorsqu’il décrivait avec émotion dans ses écrits comment la foi aveugle dans le marché libre détruit les communautés et les valeurs humaines les plus fondamentales, réduisant tout à simple valeur marchande.

Le livre Values s’inspire de mon expérience récente comme gouverneur au G7 alors que nous nous trouvions confronter à une série de crises ayant une cause commune : une crise des valeurs, une crise où les valeurs du marché avaient carrément usurpé celles de l’humanité.

Le livre s’inspire également de l’histoire de la valeur dans la pensée économique, philosophique et politique. Il montre comment une révolution économique qui a commencé au plus fort de la révolution industrielle a conduit à l’idée, largement répandue aujourd’hui, que le prix de chaque chose est la valeur de chaque chose. C’est une approche qui suppose que nos valeurs sont immuables et qui est aveugle à la façon dont un tel fondamentalisme du marché corrode les valeurs sociales et favorise les crises de notre époque. Dans notre monde numérique, nous n’avons jamais eu autant besoin de retrouver notre humanité.

Comment les évaluations issues du marché libre affectent-elles les valeurs de notre société ? L’étroitesse de notre vision et la pauvreté de notre perspective nous amènent-t-elles à sous-estimer ce qui est important pour notre bien-être collectif ? Telles sont les questions que ce livre cherche à explorer. Il examinera comment notre société en est venue à incarner l’aphorisme de Wilde – connaître le prix de tout, mais la valeur de rien – et comment, en érigeant la croyance dans le marché en vérité inviolable, nous sommes passés d’une économie de marché à une société de marché.

Trop souvent, les décisions sont prises en additionnant simplement les prix, sans aucun sens des priorités ni considération de leur répartition. Et ce qui n’a pas de prix - comme la nature, la communauté et la diversité - est ignoré. Cela encourage les compromis entre la croissance d’aujourd’hui et la crise de demain, entre la santé et l’économie, entre la planète et le profit.

Lorsque seul le profit motive les entreprises, cela détruit l’être humain et la nature sur laquelle dépend sa survie. Carney argumente que le grand économiste Adam Smith, auteur de The Theory of Moral Sentiments (1759) a été mal interprété, et ce surtout par les économistes néoclassiques et, plus récemment, les économistes de l’école néolibérale de Milton Friedman.

Ces derniers, affirme-t-il, prétendent que Smith aurait soutenu que, pour assurer l’atteinte du bien commun, il suffit qu’individus et entreprises ne se consacrent qu’à leur seul enrichissement individuel. Grâce à la main invisible, présumément celle de Dieu, les forces du marché libre feraient en sorte que le bien commun soit automatiquement atteint.

Rien ne saurait être plus faux, argumente Carney. Smith, dit-il, soulignait que le fonctionnement efficace du marché nécessite des valeurs particulières, notamment confiance, équité et intégrité. Il critiquait l’entreprise qui cherche à avoir le monopole afin d’abuser des consommateurs, et celle qui s’organise discrètement avec d’autres entreprises afin d’écraser et d’exploiter travailleurs et travailleuses en maintenant le plus bas possible les salaires.

Par ailleurs, dit-il, Smith n’a pas reconnu le fait paradoxal qu’avec le temps, l’extension et l’intensification du marché pouvaient conduire à la corrosion de ces mêmes valeurs humaines – confiance, équité et intégrité – et donc, comme ce fut le cas à maintes reprises dans l’histoire, et plus récemment en 2008, à inefficacité et crise aiguë.

L’essentiel de mon propos dans ce livre, poursuit Carney, est de reconnaître, d’une part, cette corrosion des valeurs qui nous a fait graduellement passer d’une économie de marché à une société de marché, et, d’autre part, de proposer des moyens concrets pour y remédier.

Solidarité, esprit communautaire, souci d’équité et d’intégrité, reconnaissance que les simples forces du marché n’arriveront jamais à mesurer ce qui compte le plus, soit la vie elle-même, la nature, la beauté, la diversité, le respect de l’autre... nous devons tous et toutes sans cesse reconnaître et cultiver ces valeurs et les développer comme autant de muscles, affirme l’ex-banquier catholique qui pratique tous les jours la méditation. De plus, les gouvernements doivent sans cesse créer et maintenir des institutions qui, tout en encadrant et orientant le marché, reflètent et incarnent ces valeurs profondément humaines.

L’entreprise qui ne repose que sur la seule recherche du profit des propriétaires et actionnaires ne saurait, poursuit Carney, être un succès, et ce, même sur le plan purement commercial. Celle-ci doit évidemment tenir compte du profit, mais toujours en élargissant son but afin que ce dernier tienne compte aussi du bien des consommateurs ainsi que celui de la société en général, notamment en termes d’équité au niveau de la richesse et du revenu, et en termes de santé environnementale.

D’où l’importance, dit-il, de perfectionner le plus possible les outils permettant de mesurer, outre la simple rentabilité financière court terme, l’impact d’une entreprise sur toutes les personnes – actionnaires, mais aussi travailleurs et travailleuses, consommateurs et consommatrices – qu’elle affecte en termes de qualité de vie et en termes de cette grande urgence que représente, surtout pour les générations futures, l’atteinte d’une économie à zéro émission de carbone.

Est fort révélateur le fait qu’en 2020, Carney, après avoir dirigé la Banque du Canada (2008 à 2013) et la Banque du Royaume-Uni (2013 à 2020), fut nommé Envoyé spécial des Nations unies pour l’action climatique, assumant la responsabilité de mobiliser des fonds privés pour lutter contre le changement climatique, principalement par l’intermédiaire de la Glasgow Financial Alliance for Net-Zero.

Il n’est pas tellement étonnant que Steven Guilbeault, un des plus articulés et respectés environnementalistes du Québec et actuel ministre de l’Environnement et du Changement climatique du gouvernement fédéral, ait rapidement soutenu la candidature de Mark Carney à la direction du Parti libéral.

Une politique économique qui reflèterait les valeurs qu’il met de l’avant dans son livre

Il est probable qu’avec un Donald Trump qui oriente carrément l’économie étatsunienne vers la destruction accélérée de l’environnement – Drill, Baby, Drill ! – et adopte un protectionnisme à la fois crasse et idiot, Mark Carney perçoive une grande opportunité pour le Canada.

L’opportunité d’éliminer les barrières tarifaires entre provinces canadiennes, de lancer de grands projets d’envergure où le Canada pourra exercer un grand leadership international non seulement en termes d’économie verte, mais aussi, et pour cette même raison, en termes de rentabilité.

L’opportunité de créer de nouvelles relations commerciales moins dépendantes du marché américain, où se trouveraient garantis accès au marché, résilience de la chaîne d’approvisionnement, mesures de protection de l’environnement, et mesures aussi de protection des travailleurs et travailleuses.

L’opportunité de développer des politiques qui visent à prévenir les inégalités de richesse et de revenu au lieu de miser sur la seule redistribution pour régler les problèmes après coup.

L’opportunité d’établir des relations de collaboration et de réciprocité avec entreprises et syndicats afin de garantir que l’économie canadienne se développe de façon inclusive et équitable.

L’internationalisme coopératif requiert précisément sens de la mission, pragmatisme et recherche de consensus, des qualités dont le Canada, à son meilleur, a su faire preuve, écrit Mark Carney dans son livre. Pensons à Brian Mulroney qui a exercé un leadership pour imposer des sanctions contre l’apartheid pratiqué par l’Afrique du sud, pensons au protocole de Montréal sur les chlorofluorocarbones. Ou encore au leadership de Lloyd Axworthy pour arriver à l’interdiction des mines antipersonnelles et au rôle central joué par le Grand Chef Littlechild dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.

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Mark Carney est élu chef du Parti libéral

Je terminais la rédaction du texte ci-dessus dimanche matin, 9 mars, au moment où on comptait encore les votes.

Nous savons maintenant qui a gagné la course au leadership du Parti libéral. C’est Mark Carney, et ce avec une majorité étonnante des voix.

Dans son discours, à la suite de sa victoire, Carney accusait Pierre Poilievre de vénérer à l’autel du fondamentalisme du marché, et d’être prêt à laisser brûler la planète. Les marchés, affirma-t-il, n’ont pas de valeur. Seules les personnes humaines en ont. Les marchés sont indifférents face à la souffrance humaine et à nos besoins les plus fondamentaux. Sans encadrement gouvernemental adéquat, ils enrichissent l’élite, et laissent carrément tomber les autres.

Les États-Unis sous Donald Trump imposent des tarifs injustifiés et cherchent à nous affaiblir, poursuivait Carney. Ils veulent s’approprier de nos ressources, notre eau, notre territoire et même faire de nous leur 51ième état. Ils n’y arriveront jamais ! Là, les soins de santé sont un gros business. Ici au Canada, la santé est un droit !

Aux États-Unis, on ne respecte pas la différence. Les Premières nations ne sont pas reconnues. La langue française ne jouirait d’aucun droit. La joie de vivre, la langue et culture francophone font partie de notre identité. Nous devons protéger et promouvoir tout cela.

La réalité va-t-elle refléter les propos apparemment si positifs et prometteurs de Carney ?

Il serait difficile de trouver des progressistes qui estiment qu’une victoire de Poilievre serait préférable à une victoire de Mark Carney. Pourtant, plusieurs estiment qu’il ne faut pas voter pour le moindre mal qu’est le Parti libéral, cet « ennemi de classe », et qu’il faut mettre toute son énergie dans une mobilisation nationale et internationale contre le système.

Ma crainte, en plein milieu de cette crise tout à fait historique que nous vivons, c’est qu’en optant pour ce qui nous paraît meilleur, nous finissions par ouvrir la porte au pire.

Le pire, par rapport au bien-être concret de la population. Le pire, aussi et surtout, par rapport à nos enfants et petits-enfants, qui auront à vivre dans une planète de plus en plus fragilisée.

Ma crainte, aussi, est que notre option pour ce qui nous paraît meilleur, se fonde sur une analyse peu rigoureuse, voire carrément fausse, de la pensée de celui qui est le seul en mesure d’empêcher la victoire de Pierre Poilievre.

Cela étant dit, je sais que je ne suis pas assis sur la vérité. La réalité que nous vivrons dans les prochains mois et les prochaines années, si le Parti libéral gagne les élections qui s’annoncent pour bientôt, représentera le véritable test des idées de Mark Carney.

Va-t-il nous décevoir, comme plusieurs progressistes le prédisent, et couper dans les programmes sociaux ?

Va-t-il, comme il le promet, faire avancer le bien-être concret de la population ?

Ou bien va-t-il plutôt, afin d’attirer de nouveaux investisseurs, non seulement, comme il l’a déjà annoncé, éliminer l’augmentation de la taxe sur les gains en capital qu’avait prévue le gouvernement Trudeau, mais aussi, selon la formule typique traditionnelle, maintenir relativement bas les salaires et fragiles les conditions de travail afin de concurrencer l’économie d’extrême-droite de Donald Trump ?

Va-t-il tenir à sa promesse de tout faire pour protéger l’environnement ?

On sait qu’il va abolir la taxe carbone pour consommateurs, consommatrices et petites entreprises, parce que, dit-il, « elle ne fonctionne pas, étant devenue trop conflictuelle », tout en maintenant celle-ci pour les plus gros pollueurs que sont les grandes entreprises. Cependant, va-t-il aussi, sous prétexte d’une urgence de sécurité nationale et même si c’est contraire à l’avis d’éminents environnementalistes, relancer le projet de pipeline liant l’est à l’ouest du Canada ?


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