Édition du 5 novembre 2024

Une tribune libre pour la gauche québécoise en marche

Canada

Inquiétudes soulevées quant à l'avenir de l'information en Gaspésie

À l’instare de la population des différentes régions du Québec, des centaines de gaspésiens se sont réunis à Matane et Gaspé hier pour dénoncer les compressions à Radio-Canada. En outre, l’inquiétude est palpable sur le territoire quant à l’avenir de l’information en Gaspésie.

Tiré du journal Le Graffiti.

Selon les estimations transmises pas les organisateurs des manifestations pro-radio-canadiennes, ils étaient 300 à Matane et 80 à Gaspé. Des milliers de personnes ont également pris part à la manifestation à Montréal et une mobilisation a également lieu à Moncton, au Nouveau-Brunswick.

Les compressions successives touchant Radio-Canada, mais aussi la fermeture d’hebdomadaires régionaux, dont le Riverain à Sainte-Anne-des-Mont et les coupures de journalistes régionaux au Soleil fait réagir les élus régionaux.

Dans un communiqué émis ce matin, le chef du parti Forces et Démocratie et député fédéral de Haute-Gasésie-La Mitis-Matane-Matapédia, Jean-François Fortin se porte notamment à la défense de la Société d’État.

"La saignée", selon Jean-François Fortin (discours intégral)

« Les médecins du Moyen-Âge avaient l’habitude de saigner leurs patients. Si ce n’était pas le meilleur moyen de sauver la vie du malade, ça avait au moins l’avantage de les empêcher de se plaindre du service par la suite. Déjà faibles, beaucoup en mouraient, et les plus chanceux bénissaient leurs chances.

Hubert Lacroix se comporte en médecin médiéval, en Sganarelle, mais sans l’humour. Comme un imposteur qu’on croyait dévoué aux intérêts de la télévision publique mais qui travaille à démolir irrémédiablement la SRC. Après son passage, jamais plus Radio-Canada ne sera la même. Affaiblie, émasculée, cette société d’État qui a tant contribué au développement de la culture québécoise est en voie — au rythme où vont les choses — de devenir la PBS canadienne.

La « restructuration » (euphémisme hypocrite, s’il en est un ! Allez dire à des centaines d’employés congédiés qu’ils ont été « restructurés » pour voir !) annoncée amorce le démantèlement de la télévision publique souhaité depuis des années par le Reform Party.

Stephen Harper n’aime pas les journalistes, il s’en est toujours méfié. De fait, à part avec l’exécutif, le premier ministre n’aime pas partager le pouvoir. Ni avec le judiciaire, ni avec le législatif, ni avec le quatrième pouvoir. Qu’il s’attaque à Radio-Canada n’a rien de surprenant. Tout comme Shelley Glover, la ministre du Patrimoine, qui, en bonne tory, n’a pas l’intention de bouger le petit doigt pour aider le radiodiffuseur public. Bref, que le gouvernement fédéral soit l’ennemi objectif de l’information et de la culture ne surprend personne. Mais Hubert T. Lacroix ! ?

Parce que ce n’est pas juste la population et le syndicat qui devraient aujourd’hui être dans la rue à hurler leur indignation, ce n’est pas les employés qui devraient être les plus découragés et les plus indignés, c’est le président. Celui-là même qui se cache derrière des écrans de télévision pour parler à son personnel. Celui-là même qui dit que rien n’est acquis pour les prochaines années, que tout dépend des crédits parlementaires. Celui qui devrait défendre Radio-Canada est un de ses fossoyeurs. Une véritable honte !
Le virage numérique est nécessaire et doit se faire sur une période raisonnable. Si les mandats de Radio-Canada se multiplient, les sommes nécessaires doivent suivre. On en demande plus à la SRC ? Eh bien, qu’on en donne plus. Ce n’est pas comme si Ottawa manquait d’argent. Un choix politique. Un choix idéologique.

L’absence d’indignation et de combativité du président en fait clairement un complice. Je ne demande pas sa démission, mais à sa place, incapable de défendre mon monde, je démissionnerais. Les principes ne doivent pas être négociables.

Les régions vont en pâtir, comme d’habitude, comme avec le FAPL, comme avec l’assurance-emploi. Déjà, il est question que le Téléjournal Est-du-Québec passe d’une heure à trente minutes dès 2015. Un impact considérable pour les régions du Québec, pour notre capacité à nous informer sur notre coin de pays, à débattre d’enjeux qui nous concernent, à développer le sentiment d’appartenance à nos régions. Néfaste. Je dirais inacceptable si ce mot n’avait été si galvaudé. Faut croire que le « ICI » de Radio-Canada ne s’adressait pas à nous…

Les régions vont en pâtir, l’information et la créativité aussi. On voudra des émissions qui ne coûtent pas cher, des séries à fortes cotes d’écoute, prudentes, pas trop d’audace. Grande Ourse ? Les Bougon ? Série noire ? Risqué.

Je défendrai Radio-Cadenas, comme dirait Falardeau, et j’invite tous les Québécois, fédéralistes et indépendantistes, à le faire aussi. C’est notre culture et notre accès à l’information qui sont attaqués. Ne restons pas les bras croisés. Ne laissons pas Stephen Harper, Shelley Glover et Hubert Lacroix continuer leur saignée. »

Le PQ s’inquiète aussi du sort de l’information régionale

Dans un communiqué émis vendredi, les députés péquistes de Matane‑Matapédia, Pascal Bérubé, de Gaspé, Gaétan Lelièvre, de Rimouski, Harold LeBel, et de Bonaventure, Sylvain Roy, ont aussi tenu à exprimer leurs inquiétudes au sujet des récentes fermetures et des compressions budgétaires effectuées dans les médias de l’Est-du-Québec. Ainsi, ils joignent leur voix à celle des organismes et des citoyens ayant manifesté la même préoccupation.

« Nous comptons bien participer à toute action organisée pour exprimer haut et fort notre inquiétude de voir la qualité et la diversité de l’information locale et régionale compromises par les récentes compressions, ainsi qu’à toute réflexion portant sur les moyens de remédier aux difficultés actuelles. Pour maintenir un sentiment d’appartenance fort malgré l’immensité de nos territoires, il est primordial de se mobiliser », a déclaré M. Lelièvre.

Les députés rappellent que les hebdomadaires régionaux touchés au Bas-Saint-Laurent et en Gaspésie sont Le Progrès-Écho et Le Rimouskois de Rimouski, Le Saint-Laurent Portage de Rivière‑du‑Loup, La Voix de la Matanie et La Voix gaspésienne de Matane, de même que Le Riverain de Sainte-Anne-des-Monts. En ajoutant les compressions effectuées à Radio-Canada et au quotidien Le Soleil, on conclut rapidement que l’information régionale se trouve dans un état très précaire.

« Les médias et les journalistes qui y travaillent sont d’une importance capitale pour nos régions et la vie démocratique. C’est encore plus vrai ces temps-ci, alors que nous vivons des difficultés sur le plan des services de transport, des communications et de l’économie, notamment. L’occupation du territoire s’inscrit en droite ligne avec une information de qualité et diversifiée dans nos villages et nos villes », a ajouté le député de Gaspé.

« Alors que le gouvernement libéral met à mal le développement socioéconomique de nos régions et qu’il impose la centralisation des décisions à Québec, nous devons nous faire entendre. Parmi les moyens dont nous disposons pour ce faire, il y a les correspondants des médias nationaux et régionaux, qui relaient adéquatement ce qui se passe ici. Les inquiétudes de la population et leur volonté doivent également être prises en compte, et c’est notamment par le biais des médias qu’on peut les entendre », a conclu M. Lelièvre.

Karyne Boudreau

Journaliste au journal Le Graffici (Gaspé).

Sur le même thème : Canada

Sections

redaction @ pressegauche.org

Québec (Québec) Canada

Presse-toi à gauche ! propose à tous ceux et celles qui aspirent à voir grandir l’influence de la gauche au Québec un espace régulier d’échange et de débat, d’interprétation et de lecture de l’actualité de gauche au Québec...