3 décembre 2024 | Billet de blog
https://blogs.mediapart.fr/tanguy-delaire/blog/031224/extreme-droite-sur-internet-la-montee-des-influenceur-ses-nationalistes
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Conclusion
Les discours de l’extrême droite se sont adaptés aux codes de l’internet pour asseoir sa domination. Gardant son côté sulfureux historique, tout en reprenant l’humour léger de la publicité et le cynisme des forums Internet, elle a réussi à faire de l’internet un porte-voix pour ses idées excluantes. La médiatisation par les marges des groupuscules les plus violents a permis aux groupes plus institutionnels et policés comme le RN de se hisser aux postes d’élu·es, tout en se démarquant de cette image de milices qui lui collait à la peau. Comme une division du travail idéologique, on voit les représentant·es de partis d’extrême droite afficher une image de respectabilité et d’ouverture, en encourageant en douce les groupes les plus radicaux à saturer la toile de discours racistes et d’appels au meurtre.
Ce jeu entre partis « officiels » et groupuscules radicaux permet à l’extrême droite de déplacer la fenêtre d’Overton. Cette métaphore a été imaginée par le sociologue du même nom pour désigner les opinions considérées comme acceptables par l’opinion publique, et donc susceptibles d’être introduites dans la législation [1]. Toute opinion exprimée dans l’espace public qui se trouverait en dehors de cette fenêtre métaphorique serait par défaut discréditée comme insensée ou trop extrême. Par exemple, la prohibition de l’alcool aux États-Unis a duré pendant 13 ans (de 1920 à 1933). Elle était donc acceptable politiquement à ce moment précis de l’Histoire, à cet endroit du monde. En 2024, un·e politicien·ne qui proposerait l’interdiction de la vente et de la consommation d’alcool serait sûr·e de ruiner son image et sa carrière. Elle n’est plus dans la fenêtre d’Overton.
De même, la théorie du « grand remplacement » est longtemps restée confinée à d’obscurs groupuscules ou des terroristes (Brenton Tarrant a intitulé son manifeste « Le grand remplacement » avant de tuer 50 personnes à la sortie d’une église néo-zélandaise). Elle est désormais reprise dans de nombreux médias (notamment la chaîne CNews, possédée par Vincent Bolloré) et par de nombreux responsables politiques d’extrême droite ; d’abord cantonnée à Éric Zemmour et ses soutiens, elle est passée au Rassemblement National et même maintenant au groupe politique « centre-droit » Renaissance.
L’agenda médiatique actuel est déplacé vers les problématiques de l’extrême droite, qui saturent petit à petit le débat politique. Les discours racistes des marges se retrouvent au cœur des gouvernements et de leurs politiques, que les élu·es soient ou non affilié·es à des partis d’extrême droite. En France, la loi sur l’immigration, proposée par Renaissance, pourtant désigné par le ministère de l’Intérieur comme « centre-droite » a été votée par 100% des parlementaires du RN tandis que 22% des parlementaires de Renaissance s’abstenaient ou votaient contre. Une première dans ce mandat [2]. Marine Le Pen a d’ailleurs qualifié ce vote de « victoire idéologique » [3].
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