Le gaz naturel est-il une source d’énergie pertinente pour réduire le niveau d’émissions des gaz à effet de serre (GES) ?
Les scientifiques du GIEC ont démontré que le gaz naturel éloigne l’ensemble des nations de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. [2] Pourtant, Energir prétend qu’en privilégiant l’utilisation du gaz naturel dans le transport et les industries, on pourrait réduire notre dépendance au pétrole et permettre ainsi de réduire jusqu’à 32 % les émissions de GES. Energir emploie près de 140 lobbyistes pour convaincre le gouvernement de ses prétentions. Cette offensive couvre une augmentation considérable de la production du gaz naturel. En Amérique du Nord en 1990, on produisait 616 milliards de m³. En 2016, la production atteignait 916 milliards de m³, soit une augmentation de 49 %. Depuis le début des années 2000, les exportations du gaz produit aux États-Unis et au Mexique ont connu une hausse considérable. 75 % de la production commerciale en gaz aux États-Unis, comme au Canada d’ailleurs, provenait de sources non – classiques. [3]
Le gouvernement Legault poursuit le même type de politique
Il n’a pas hésité à appuyer la construction d’un gazoduc pour exporter le gaz albertain via l’Abitibi-Témiscamingue vers le Sagueny-Lac Saint-Jean. Il soutient également la construction d’une usine de liquéfaction et d’un port méthanier. Cela est une pure aberration, car ce gazoduc permettra l’accroissement de la production gazière albertaine et de la consommation de gaz au Québec.
Le gouvernement Legault fait ainsi lai preuve d’un aveuglement volontaire. Il n’hésite pas à reprendre à son compte la campagne d’Energir qui présente la transition vers le gaz naturel comme une voie de sortie de la crise climatique alors que ce virage va retarder la transition vers des énergies sobres en carbone.
Des municipalités comme Montmagny, Lac-Mégantic et Drummondville favorisent le passage du mazout au gaz naturel et accordent un soutien financier aux projets gaziers qui s’annoncent sur leur territoire. Le maire de Drummondville subventionne le développement d’une flotte d’autobus au gaz naturel. Et Energir ose prétendre que le virage au gaz naturel ne constitue pas un obstacle à l’électrification du chauffage domestique, commercial et institutionnel, de l’électrification des transports publics et celle entreprises manufacturières.
La campagnie d’Energir, oser présenter le gaz naturel comme une énergie de transition
Après avoir prétendu que le gaz naturel n’était pas une énergie fossile et caché que le gaz naturel émettait du méthane qui est un gaz à effet de serre, voilà qu’Energir cherche à enjoliver la réalité en prétendant qu’elle veut accroître la proportion de gaz renouvelable (GNR) issu des déchets domestiques, des résidus forestiers ou des boues produites par les municipalités dans le gaz naturel dont cette entreprise se fait le pourvoyeur. En fait, aujourd’hui, cette proportion de GNR est de 0,5%. Le gouvernement a adopté un règlement qui fixe les cibles de gaz naturel renouvelable dans les approvisionnements de gaz naturel à 1% du volume total en 2020, à 2% en 2023 et 5% en 2025. Ces cibles ne sont pas contraignantes et visent en encourager la construction d’usine de biométhanisation. Energir s’est réjoui du règlement, mais les organismes environnementaux n’ont pas hésité à qualifier cette annonce d’écran de fumée qui cache en fait l’augmentation de la consommation de gaz naturel issu de la fracturation hydraulique au Québec.
Energir est allé jusqu’à participer à une coalition comprenant la Fondation David Suzuki, le Conseil du patronat, la CSN, SWITCH (Alliance pour une économie verte initiée par Equiterre) et d’autres entreprises de l’économie verte. Cette coalition se fixe des cibles plus ambitieuses en termes de GNR, 7% en 2020 et 15% d’ici 2030. En fait, la véritable cible est que 85% du gaz distribué au Québec en 2030 soit du gaz tiré de la fracturation hydraulique. Voilà une autre manipulation qui sait utiliser le dialogue pour parvenir à ses fins. En fait, dans le cadre de sa campagne, il s’agit pour Energir de trouver les « réalistes » prêts à assumer les compromis les plus douteux qui permettront de préserver l’image et la rhétorique de l’entreprise. [4]
Le tournant vers le gaz naturel est une impasse. Soutenons la campagne Non au gaz jurassique.
Le gaz naturel n’est pas la solution. La transition passe par l’économie d’énergie, l’application et l’amélioration de normes de construction des bâtiments, le passage aux énergies renouvelables, la densification urbaine, le transport collectif électrifié et gratuit et la recherche de souveraineté alimentaire permettant l’achat local.
Le tournant vers le gaz naturel que nous impose le gouvernement Legault à la suite du gouvernement Couillard nous éloigne de la possibilité de réduire réellement les émissions de GES. Cette politique irresponsable aura un coût carbone de plus en plus important et nous enfermera dans des structures du passé. Ce tournant vers le gaz naturel, c’est du temps perdu qui nous obligera à payer deux fois pour la transition et la mettra véritablement en péril.
La campagne de la fondation « Coule pas chez nous » contre le développement de l’utilisation du gaz naturel insiste sur le fait que le gouvernement a octroyé des dizaines de millions de dollars en subventions aux entreprises d’exploitation des hydrocarbures au cours des dernières années, ce qui empêche une transition vers les énergies propres. Cette campagne cible un enjeu crucial dans la lutte aux changements climatiques : bloquer tous les projets d’exploration, d’exploitation et de transport des hydrocarbures et particulièrement du gaz naturel qui est au centre aujourd’hui des grandes manœuvres des entreprises du secteur et des gouvernements à leur service.
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