En prime, « nos anges » des RI ont toutes les possibilités objectives d’être contaminés par le Covid-19, vu la proximité inhérente au confinement exigé, vu la non-cohérence des autorités sur les droits de sortie de la clientèle, et à cause aussi du manque de matériel sanitaire dans de nombreuses ressources peu organisées. Il y aurait maintenant jusqu’à une soixantaine de cas d’infection, selon certaines sources ! C’est vous dire comment ça peut voler bas, au paradis du cheap labor ! Un petit shot de Purrell avec ça ?
Un métier particulier
Sérieux, étant donné les conditions de travail, ce métier-là d’intervenant-e dans une résidence intermédiaire du privé n’a rien de particulièrement attirant. C’est ce qui fait que la majorité du personnel est composé de stagiaires-étudiants-es, de personnes immigrantes, de sans diplôme, de personnes illettrées, et, sans surprise, à 89% de femmes. Cela dit, j’ai moi-même pratiqué ledit métier pendant des années dans des ressources en santé mentale de la Basse-ville de Québec. Or, bien sûr qu’on peut y trouver de notables compensations malgré le salaire anémique et les conditions peu reluisantes comparées à celle du public ! Ainsi, on y développe des habiletés de travail, on concoure au rétablissement de nos gens, on s’y attache, on a un sentiment d’utilité sociale, etc., mais tout cela trouve vite ses limites, surtout quand surviennent les accidents, les agressions, les traumas, les mises à pied injustifiées…
Manque de matériel, surcroît de tâches
Le personnel des ressources intermédiaires (du privé) mérite sans conteste un bien meilleur sort, et pour illustrer d’avantage, je ne peux faire autrement ici, que donner en exemple le cas de Pascale-Julie Montreuil, coordonnatrice d’une petite ressource intermédiaire de neuf employées, le Manoir de l’Âtre, en banlieue de Québec, qui outre de faire régulièrement part de son légitime désarroi sur les réseaux sociaux, lance un véritable cri du cœur au gouvernement Legault.
« Nous sommes une petite ressource commence-t-elle, et parce que nous avons fait le choix de la qualité pour nos résidents-es, nous sommes parfois deux par quart de travail. Malheureusement, compte-tenu de la faiblesse des budgets consentis par l’état, nos employées, qui font un travail remarquable, n’ont droit qu’au salaire minimum et ont peu de conditions de travail. »
« Dès le début de cette crise, poursuit la coordonnatrice, trois travailleuses sont tombées malades, et nous avons dû péniblement gérer le surcroît de tâches. Nous n’avions pratiquement rien : ni Purell, ni masques, ni matériel désinfectant. Il nous a fallu tout trouver ailleurs, acheter de l’alcool, des lingettes, des jaquettes de protection, et ce tout en assumant les risques d’être contaminés en gérant le quotidien. Juste faire l’épicerie était devenu un véritable parcours du combattant, précise madame Montreuil.
La nécessaire reconnaissance
Par ailleurs, tout en évoquant les lourdes conséquences et le flou des directives de confinement du CIUSSS pour une clientèle qui a longtemps été institutionnalisée, la coordonnatrice décoche une flèche à la ministre Mc Cann : « Ce qui nous fait-le plus mal, c’est le manque de reconnaissance du gouvernement, avoue-t-elle. Même la ministre de la Santé ne souligne jamais notre travail… Elle parle plutôt des préposés-es du public qui gagnent en moyenne 21$ l’heure, ce qui n’est certainement pas notre cas, en ressource intermédiaire privée, à 13$ l’heure ! »
Enfin, pour Pascale Julie Montreuil qui œuvre aussi de concert avec Johanne Pratte de l’Association des Ressources d’Hébergement Intermédiaires du Québec (ARHIQ), « il est absolument inconcevable de maintenir les employés-es de RI dans de telles conditions salariales. À travail égal salaire égal ! » revendique-t-elle.
« Surtout, conclut la dame, quand ces personnes-là mettent leur vie et celle de leur famille en jeu ! »
Souhaitons qu’on en ait pris bonne note, en « haut-lieu », et qu’au-delà des roucoulades habituelles, l’argent nécessaire à une juste reconnaissance salariale puisse enfin trouver le chemin du bas.
Nous le devons bien à nos Anges !
Gilles Simard,
Journaliste et Pair-aidant en Santé mentale
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