Statistique Canada nous apprenait récemment que le niveau d’insécurité alimentaire a considérablement augmenté dans les dernières années. De 9,6 % des ménages canadiens qui vivaient une forme d’insécurité alimentaire en 2017, nous sommes passés en 2022 au taux de 15.6 %. Les données qui émanent du Bilan Faim publié en début de semaine par
Moisson Montréal sont, elles aussi, plus qu’alarmantes alors qu’on recense plus d’un million de demandes d’aide alimentaires mensuelles seulement dans la métropole.
Ces chiffres consternants nous poussent à constater que les réponses actuelles à l’insécurité alimentaire ne suffisent plus à limiter les dégâts. Plutôt que de miser sur les réponses caritatives habituelles, notre société a besoin de mesures plus globales qui permettent de s’attaquer au cœur du problème de l’insécurité alimentaire ainsi qu’aux
nombreux dysfonctionnements de notre système alimentaire qui crée et perpétue des inégalités, nuisant au bien-être de notre société et de la planète.
Devant ce constat, la reconnaissance du droit à l’alimentation par le gouvernement québécois apparait comme une réponse adéquate et pérenne.
Reconnu dans plusieurs textes internationaux tels que la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), le droit à l’alimentation vise à garantir à toute personne, sans discrimination et dans le respect de sa dignité humaine, un accès physique et économique
stable à une alimentation adéquate et respectueuse de la biodiversité.
Le Canada et le Québec ont reconnu ce droit en 1976 en signant le PIDESC. Pourtant, il est clair que ce droit est loin d’être garanti, en témoignent notamment les hauts taux d’insécurité alimentaire, le piètre état de nos territoires nourriciers, la souffrance des producteurs et productrices agroalimentaires et la faible résilience de notre système
alimentaire mondialisé face aux crises climatique et géopolitique.
Que pourrait apporter le droit à l’alimentation comme réponse à la crise actuelle ?
Le droit à l’alimentation est un droit humain qui impose un cadre juridique clair au sein duquel les mesures favorisant la sécurité alimentaire doivent être réfléchies et mises en œuvre. Ce cadre se déploie à travers une vision qui se transpose dans quatre composantes : disponibilité et stabilité des approvisionnements alimentaires, accessibilité physique et économique des aliments, durabilité des systèmes alimentaires et adéquation des aliments.
En somme, il impose de prendre en compte simultanément toutes ces facettes de nos systèmes alimentaires et à surpasser les silos qui font qu’on tourne actuellement
en rond.
Ce droit fondamental instaure également des responsabilités bien définies pour les gouvernements qui ont l’obligation d’agir conformément à leurs engagements internationaux en faveur du droit à l’alimentation.
Ils doivent ainsi le respecter (ne pas porter eux-mêmes atteinte au droit), le protéger (empêcher les tiers de brimer le droit) et le mettre en œuvre (prendre des mesures concrètes pour garantir le droit). Ils doivent donc, pour ce faire, adopter les lois, les politiques et les programmes nécessaires à sa reconnaissance et sa réalisation, et ce,
dans tous les secteurs : alimentation, environnement, santé, économie, etc.
Le droit à l’alimentation exige finalement le respect de principes clés qui découlent de sa nature de droit humain. Le gouvernement doit donc s’assurer de respecter, dans toutes les modalités de réalisation du droit à l’alimentation, les principes de participation, responsabilité, non-discrimination, transparence, dignité humaine, empowerment et État de droit.
Comment garantir le droit à l’alimentation au Québec ?
Pour garantir le droit à l’alimentation et faire en sorte que les composantes, responsabilités et principes qui en découlent deviennent une réalité dans nos collectivités, il faut l’intégrer dans notre système juridique.
Le moyen idéal pour y parvenir, qui est la voie promue par nulle autre que l’Organisation des Nations Unies (ONU), est l’adoption d’une loi-cadre sur le droit à l’alimentation. Une telle loi-cadre, par sa nature de « super loi », viendrait encadrer légalement l’ensemble des nombreux enjeux qui touchent, de près ou de loin, au droit à l’alimentation : l’agriculture
et l’alimentation, la santé, l’environnement, le commerce, l’éducation, les conditions de travail, la sécurité sociale, l’aménagement du territoire, etc. Elle obligerait ainsi l’ensemble des ministères gouvernementaux à s’assurer que leurs lois, règlements et politiques se
conforment aux exigences du droit à l’alimentation.
La loi-cadre permettrait donc d’assurer un traitement systémique et rigoureux des enjeux juridiques, politiques, sociaux, économiques et environnementaux du droit à l’alimentation et imposerait aux décideurs publics une action multisectorielle et concertée pour garantir ce droit.
Elle donnerait aussi une assise légale à ce droit, rendant possible la saisie des tribunaux pour le faire respecter. En l’absence de reconnaissance de ce droit dans nos chartes de droits fondamentaux, il nous est actuellement impossible de le faire, contrairement aux autres droits qui bénéficient de cette protection.
Outre les fondements de ce droit, s’y retrouve également des explications sur les démarches entreprises par le RCCQ en vue de sa reconnaissance, notamment à travers son plaidoyer en faveur de l’adoption d’une loi-cadre sur le droit à l’alimentation par le gouvernement du Québec.
Pour en savoir plus sur ce droit, consultez le site internet développé par le Regroupement des cuisines collectives (RCCQ), dédié entièrement au droit à l’alimentation : www.droitalimentation.org [1]
À propos du RCCQ
Le Regroupement des cuisines collectives du Québec (RCCQ) favorise l’émergence, la consolidation et la concertation des cuisines collectives sur l’ensemble du territoire québécois, tout en militant pour la reconnaissance du droit à l’alimentation. Les valeurs fondamentales du RCCQ sont la dignité, la solidarité, l’autonomie, la démocratie, ainsi
que l’équité et la justice sociale.
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