Édition du 17 décembre 2024

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Environnement

Ce que nous devons faire pour être entendus

Entre les festivités, les réceptions, la dinde et le réveillon, il est probable que vous n’ayez pu suivre l’actualité. Bien que j’y aie consacré peu de temps, une nouvelle a retenu mon attention : des femmes autochtones ont bloqué une valve de pipeline sur la ligne 9B. Pour ce faire, elles se sont enchainées et le sont restées jusqu’au moment où la police les a délogées. Elles voulaient empêcher la compagnie de transporter son sale pétrole.

Je suis souvent stupéfaite de la force des opposants écologistes, encore plus de celle des autochtones. En effet, ils comptent pour une minorité de la population et ils n’ont pas le même statut que les autres Canadiens (Si vous ne le saviez pas et pensiez que les Premières Nations en réserve sont chanceuses, apprenez que vous êtes victimes d’une sévère désinformation. Ce bonheur exquis vient avec une perpétuelle minorité juridique, car les Amérindiens sont les pupilles de l’État, ils restent des asservis au regard de la Loi sur les Indiens). Malgré tout, ils résistent de plusieurs manières à leur envahissement territorial et culturel. Certains de leurs droits sont bafoués, comme la possibilité d’exprimer leur désaccord à propos de ce qui se passe sur leur territoire ancestral. La question se pose : qui a-t-on sérieusement écouté parmi la population civile et les groupes autochtones sur la question de l’inversion du pipeline de la ligne 9B ?

Je me permets une petite parenthèse pour les sceptiques. Pourquoi les écologistes s’énervent-ils avec un pipeline déjà en place ? Bonne question en effet. Outre le fait qu’il est vieux, il a été conçu pour que le pétrole circule dans une direction, ainsi l’inversion pourrait constituer un risque en soi. Le vrai danger vient toutefois du type de pétrole qui y transite. C’est du pétrole des sables bitumineux, visqueux, corrosif et mélangé à des agents de liquéfaction volatils, pas le pétrole léger pour lequel il a été construit.

Revenons à nos Amérindiens et à notre population civile. Avons-nous été écoutés ? Non ! À preuve, la nation Chippewas de la Thames poursuit Enbridge à propos de cette inversion du flux du pipeline. La cause sera présentée à la Cour suprême. Comment réagir à cette nouvelle ? Fermer le téléviseur ou son écran d’ordinateur et reprendre une deuxième part de tourtière ! L’autre alternative serait de se questionner sur notre possibilité d’être entendus lorsque nous nous opposons à une catastrophe annoncée. Du pétrole bitumineux qui se déverse dans le paysage, c’est un désastre d’une grande ampleur.

En fait, nos sœurs autochtones se sont enfermées pour NOUS préserver de graves problèmes de pollution, pourquoi est-ce si facile d’éviter de parler de leur combat ? Ces femmes se commettent pour notre bien-être, comme ces opposants qui jouaient le même tour deux semaines plus tôt. Il faut, impérativement, leur consacrer une petite pensée en cette nouvelle année. Elles savent ce qui doit être fait pour être écoutées. Et comme je ne veux pas parler à leur place, je leur cède le mot de la fin. Vanessa Gray nous dit : « il est évident que l’exploitation des sables bitumineux est une forme de génocide culturel et environnemental. Je défends la terre et l’eau parce qu’elles sont sacrées. J’ai le droit de défendre ce qui menace mes traditions et ma culture ».

Marie-Ève Mathieu
Saint-Jude
12 janvier 2016

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