Édition du 19 novembre 2024

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États-Unis

Barak Obama ne dit rien de la guerre au Congo. Pourquoi ?

La dernière guerre au Congo, qui s’est terminée en 2003, a fait 5millions 400 mille morts ; le pire désastre humanitaire depuis la seconde guerre mondiale. C’est le silence international qui l’a permis. Cette guerre a été ignorée et les causes en sont restées dans l’ombre parce que des gouvernements soutiennent les divers groupes combattants. Une nouvelle guerre vient de commencer et le silence sur son existence est assourdissant.

(tiré de Counter Punch.org, ), 26 novembre 2012,

Traduction, Alexandra Cyr

Le président Obama ne semble pas être au courant. Il reste aveugle à la crise des réfugiéEs et aux crimes de guerre commis par la milice M-23 contre le gouvernement démocratiquement élu de la République démocratique du Congo.

Il se peut que les apparences soient trompeuses. Le gouvernement américain a en fait, les deux mains en plein dans ce conflit comme c’était le cas lors de la dernière guerre lors de la présidence de Bill Clinton. L’attitude passive de B. Obama est un acte d’encouragement conscient aux envahisseurs comme celle du Président Clinton à son époque. Au lieu de dénoncer l’invasion et les tentatives de renversement d’un gouvernement démocratiquement élu, le silence devient une puissante arme de complicité avec les envahisseurs.

Pourquoi le président Obama agit-il de cette façon ? Les envahisseurs sont armés et financés par le Rouanda un important allié des État-Unis, leur marionnette. Les Nations Unies ont publié un rapport qui prouve sans l’ombre d’un doute, que le gouvernement rouandais soutient les rebelles (congolais). Le gouvernement américain et les caricaturistes ne le croient pas.

La guerre de 2003 qui a tué tant de gens était aussi le résultat d’une invasion armée de la part du Rouanda et de l’Ouganda soutenue par les États-Unis. Le journaliste français, Gérard Prunier l’a démontré dans son livre « Africa’s World War ».ii

Plusieurs des criminels de guerre rouandais, impliqués dans la précédente guerre au Congo, comme Bosco Ntaganda, sont à la tête de la milice M-23 et sont recherchés pour crimes de guerre par le tribunal international sur ces crimes. L’actuel président du Rouanda, Paul Kagamé, est un « bon ami » du gouvernement américain et un des plus notoires criminels de guerre de la planète en lien avec son rôle dans le génocide rouandais et de la guerre qui s’en est suivie au Congo. Un groupe de Rouandais et de Congolais demande que M. Kagamé soit déféré devant un tribunal pour ces raisons.

Dans son livre, G. Prunier explique que le génocide de 1994 a été déclenché à cause de l’invasion du Rouanda par P. Kagamé parti de l’Ouganda un allié américain. Après sa prise du pouvoir, il a informé le gouvernement américain, lors d’un voyage à Washington, qu’il envahirait le Congo. Gérard Prunier rapporte cette déclaration (de P. Kagamé) dans son livre, page 68 : « Je les ai avertis, (parlant du gouvernement américain), que si la communauté internationale ne fait rien (contre le Congo), le Rouanda entrera en action. Mais la réponse de l’administration Clinton a été en fait, pas de réponse du tout ».

En diplomatie internationale, ce genre de non réponse à une menace d’invasion, est interprété comme une puissante approbation. Le président Obama agit de la même manière en ce moment. Les mêmes criminels de guerre agissent de la même façon.

Mais, pourquoi ? L’actuel président de la RDC, M. Joseph Kabila, a aidé à l’invasion militaire de son pays lors de la précédente guerre. En bon collaborateur, il a contribué à libérer l’immense richesse minière et pétrolière pour les compagnies multi nationales. Mais depuis, son costume de marionnette commence à se découdre. Il a pris ses distances avec les Rouandais et les Ougandais si proches des Américains. Il a fait de même avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. Par exemple, le FMI l’a mis en garde contre sa stratégie d’infrastructures et de développement élaborée avec l’aide de la Chine. Il l’a ignoré. The Economist explique ainsi cette position : « Il semble que le Congo soit en tête de liste auprès d’ investisseurs étrangers (pour financer) un projet d’infrastructures et de développement qui vaut 9 mille milliards de dollars et pour lequel il existe une entente avec la Chine depuis un an. Le FMI s’objecte en disant que le Congo va se retrouver avec une immense nouvelle dette. Il refuse donc de reporter l’élimination de l’actuelle dette congolaise de plus de 10 mille milliards de dollars ».

Cette position a immédiatement transformé Joseph Kabila d’ami non fiable en ennemi. Les États-Unis et la Chine sont engagés dans une dure rivalité pour l’accès aux immenses et riches ressources naturelles du Congo. La nouvelle alliance du Président Kabila avec la Chine était plus que les États-Unis n’en pouvaient supporter.

Le Président Kabila a ensuite enragé ses anciens alliés lorsqu’il a exigé que les contrats concernant les superprofits des compagnies internationales qui exploitent les précieuses richesses minières de son pays, soient renégociés. Ainsi le pays pourrait encaisser quelques bénéfices de ses richesses.

C’est en République démocratique du Congo qu’on trouve 80% du cobalt de la planète. C’est un métal extrêmement précieux, nécessaire à la fabrication de beaucoup de technologies modernes, comme des munitions, les téléphones cellulaires et les ordinateurs. Ce pays est probablement la région du monde la plus riche en ressources minérales ; cela va des diamants au pétrole. Mais sa population est une des plus pauvres de la planète : depuis des générations des compagnies pompent ses richesses.

Une nouvelle guerre vient de commencer et les Nations Unies ne font rien. On compte 17,500 soldats de la paix en RDC sans compter les Forces spéciales américaines. La milice M-23 ne compte que 3,000 combattants. La réponse des Nations Unies est rapportée par le New-York Times : « Les représentants des Nations Unies ont déclaré qu’ils n’avaient pas suffisamment de troupes pour vaincre les rebelles et qu’ils craignaient des « dommages collatéraux ». Mais beaucoup de CongolaisEs ont rendu leur propre verdict. Mercredi (21-11) des émeutiers-ères ont saccagé les maisons du personnel de l’ONU à Bunia ».

Si Barak Obama et/ou l’ONU avait fait une déclaration publique sur la nécessité de défendre le gouvernement élu du Congo, M-23 n’aurait pas bougé.

Human Rights Watch et d’autres groupes, ont correctement qualifié les commandants de M-23 en disant qu’ils sont : « responsables de massacres ethniques, du recrutement d’enfant, de viols de masse, de meurtres, d’enlèvements et de torture ».

De son côté, l’administration Obama a activement protégé ce groupe aux Nations Unies. Voici ce qu’en dit encore le New-York Times : « Certains groupes de défense des droits humains disent que Susan Rice, l’ambassadrice américaine à l’ONU, et protégée du président pour le poste de Secrétaire d’État, avait été bien trop tendre avec le Rouanda. Le pays est un allié proche des États-Unis et M, Kagamé, son président connait Mme Rice depuis des années. Des militantEs l’ont accusée d’avoir utilisé un langage adoucit dans une résolution du Conseil de sécurité qui voulait mentionner les liens entre le M-23 et le Rouanda. Selon ces sources, elle aurait aussi contribué à bloquer la publication d’un rapport des Nations-Unies qui mettait à jour ces liens ».

Il est probable que l’administration Obama va entrer en action aussitôt que M-23 et ses alliés auront atteint leur objectif de renversement du régime congolais. Elle aura rouvert les canaux des profits des entreprises à la pointe des fusils. Il y a des discussions entre le M-23 et le gouvernement congolais sous l’égide de l’Ouganda, pays collé aux États-Unis. Il est peu probable que ce processus donne des résultats sauf si le Président Kabila démissionne et laisse le M-23 et ses supporteurs rouandais prendre le pouvoir. Le M-23 se sait en bonne position ; son pouvoir est renforcé par le silence des Nations-Unies et du gouvernement américain.

Si la guerre s’installe, il faut s’attendre à encore plus de silence sur la scène internationale. Il faut aussi s’attendre à plus de massacre et de nettoyage ethnique. Il faut comprendre que la population qui n’en finit plus de se remettre des exactions passées, se retrouvera encore dans d’immenses camps de réfugiéEs où elle sera encore à la merci de militaires qui l’assassinera, où les viols, la famine et autres formes de barbarismes seront monnaie courante. Ces éléments inhérents aux guerres précédentes se répéteront cette fois encore avec plus de brutalité dans le silence international assourdissant.

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