Prenant la parole à la « Journée Internationale contre la violence faite aux femmes » la journaliste Elena Reina Muñoz rappelait qu’au Mexique, entre les années 2013 et 2014, sept femmes (en moyenne) par jours sont assassinées. Ces assassinats ont été en constante progression au cours des 15 dernières années, comparativement au taux à la baisse d’homicides chez les hommes. [1]
Les femmes du Mexique sont victimes de différentes formes de violence, 68% de celles-ci, âgées de 30 à 39 ans, affirment avoir été victimes d’abus ou de violence. Ce chiffre s’élève à 80% à Chihuahua et dans l’État de Mexico. On trouve un pourcentage similaire chez les plus jeunes femmes. À Mexico, la capitale, 65% des jeunes filles âgées de 15 à 19 ans se plaignent d’avoir été maltraitées physiquement ou sexuellement. [2]
Tuer les femmes (le féminicide) un problème structurel.
Ainsi en conclue l’institut National des Statistiques et de Géographie (INEGI) qui constate que ces meurtres relèvent davantage d’un « modèle » culturel que de la violence sociale en provenance du crime organisé. En effet, 30% des femmes victimes de meurtres sont chez elles, à la maison, au moment de leur assassinat. Ce qui est loin d’être la situation des victimes masculines. Les hommes, au contraire, sont pour la plupart du temps tués en pleine rue.
L’un des traits caractéristiques des « féminicides », c’est la cruauté extrême que met le meurtrier pour tuer sa victime. Le INEGI signale que ceux-ci emploient des méthodes douloureuses qui prolongent la souffrance avant de provoquer la mort des victimes, la plupart du temps la conjointe ou la partenaire sexuelle. Les statistiques de 2013 révèlent que 32% des femmes assassinées ont été pendues, étranglées, noyées, brûlées, poignardées ou battues. En comparaison, la majeure partie des hommes assassinés (65%) sont eux abattus par des armes à feu.
Inaction des autorités
La journaliste Muñoz rapporte les propos d’un policier attaché au département des « féminicides » de l’État de Mexico. Selon ce dernier, un grand nombre des femmes trouvées assassinées , étaient connues de la police car elles avaient déjà porté plainte auprès des autorités pour accuser leur conjoint de violence. « Mais, on n’en a pas fait de cas en disant à ces femmes de retourner chez elles, de rejoindre leur mari. » Les statistiques du INEGI font état que 47% des femmes âgées de 15 ans et plus sont violentées au cours de leurs relations, par leur dernier ou actuel partenaire ou conjoint.
L’État de Mexico, le plus peuplé du pays avec plus de 15 millions d’habitants, est aussi l’État le plus sanglants en rapport aux crimes perpétrés contre les femmes. Il est le premier État qui a inclus à l’intérieur du Code Pénal le « féminicide », concept pour définir la spécificité des meurtres perpétrés contre les femmes. Cet ajout au code pénal a été imité par 17 autres États. [3]
Les femmes s’organisent et se défendent.
Les femmes mexicaines sont loin d’accepter cette culture de violence dont l’issue est de se faire assassiner. De plus en plus de femmes se mobilisent, dénoncent, forment des groupes et agissent pour mettre fin à une situation devenue intenable. Une des initiatives prometteuses qui prend forme, particulièrement dans la ville de Mexico, c’est la formation de groupes autonomes de femmes et d’auto-défenses. Le « Comando Colibri » est à l’origine de ce mouvement et se démarque pour former les femmes à l’auto-défense et à combattre l’attitude de victimisation.
L’expérience Colibri s’est initiée au cours de l’année 2014. Un groupe de femmes de la ville de Mexico a décidé de s’organiser et d’affronter la violence des hommes de la rue. Pour rompre avec la victimisation, ces femmes se rencontrent et s’exercent dans des groupes d’auto-défense afin de dépasser la peur d’être harcelées verbalement et sexuellement dans tous les espaces publiques. L’instigatrice de ce projet, Maria Teresa Garzón Martínez donne en quelques mots la philosophie fondamentale du projet « s’entraîner pour un combat que nous n’aurons pas à livrer ». Selon elle, l’entraînement que les femmes se donnent, vise surtout à surmonter leurs craintes et à se défaire de l’attitude de soumission. Ce qui s’acquiert par la « pratique » et par les exercices qui permettent de se réapproprier de son corps et de la conscience de soi. Gazón affirme que si les femmes s’assument comme femmes, comme féministes – même si elles constituent le groupe humain le plus vulnérable dans une population et dans le monde – les femmes reprendront une place à part entière dans ce monde. « Notre but n’est pas de survivre, mais de vivre la vie pour elle-même et de faire en sorte que la vie devienne supportable. »
(Source : Les propos de Madame Garzón et l’information concernant le Comando Colibri ont été recueillis sur le journal web TeleSurtv, sous le titre Cinco grupos feministas de Latinoamérica que deberías conocer « https://www.telesurtv.net/news/Cinco-grupos-feministas-de-Latinoamerica-que-deberias-conocer-20160308-0071.html »)
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