Tiré de Inprecor 720 - mai 2024
1er mai 2024
Par Antoine Larrache
En Allemagne, l’interdiction d’un congrès et l’annulation de la participation de Nancy Fraser à une université sont la partie émergée d’une immense pression politique contre la solidarité avec la Palestine, accusée d’antisémitisme. En France, le cortège de militant·es convoqués par la police pour des accusations d’apologie du terrorisme se prolonge, et la répression dans les universités se développe, à l’image de ce qui se passe aux États-Unis. Là-bas, à Los Angeles, New York, Austin, Boston, Chicago ou Atlanta, les mobilisations prennent de l’ampleur : des tentes sont installées, des manifestations et des prises de parole ont lieu. La répression est très forte, avec notamment une centaine d’arrestations mercredi 24 avril à Boston et la tentative continue de créer un amalgame entre
antisionisme et antisémitisme.
Réprimer pour mieux saigner
Une telle répression, contre des mouvements relativement restreints, ne peut signifier qu’une chose : la volonté de faire taire toute solidarité visible avec le peuple palestinien. Alors que, coïncidence ou pas, de nombreux indices semblent prouver l’imminence d’une attaque israélienne à Rafah. En effet, il semble que Netanyahou ait négocié un compromis avec les États-Unis qui consisterait à ne pas lancer de grande attaque contre le Liban ou l’Iran dans l’immédiat, en échange d’un feu vert pour attaquer Rafah. Rafah, une petite ville de 150 000 habitant·es dans laquelle se sont réfugiées 1,5 million de personnes fuyant la guerre et la destruction de leurs habitations, et luttant quotidiennement contre les engins de mort d’Israël, contre les maladies et la famine. Car Israël, non content de massacrer et de détruire, empêche toujours l’aide humanitaire de parvenir dans la bande de Gaza, poursuivant ainsi son œuvre génocidaire.
Massacrer à Gaza et à Rafah est un point d’orgue du projet sioniste mené par l’extrême droite au pouvoir en Israël : il s’agit de supprimer toute présence palestinienne dans cette région, en attendant de s’attaquer plus directement à la Cisjordanie, voire plus. Les attaques de colons et de l’armée d’occupation d’Israël contre les Palestinien·nes n’ont cessé d’augmenter depuis le 7 octobre. De plus, depuis le début de l’année, près de 1 100 hectares ont été déclaré terres domaniales, un statut qui donne leur contrôle au gouvernement israélien, soit déjà deux fois plus qu’en 1999, jusque-là année record. Les logiques guerrières et génocidaires ont leurs propres dynamiques : négocier de nouveaux financements militaires auprès des États-Unis, acheter des armes à ces derniers ou à la France, réprimer les populations, attaquer une région, tout cela pousse à en faire toujours plus et il n’est pas exclu qu’après avoir attaqué Rafah, Israël attaque aussi le Hezbollah au Liban, l’Iran, dans une fuite en avant qui correspond également à l’état du monde. En effet, de l’Ukraine aux Philippines, de la Palestine à Taïwan, le monde est de plus en plus militarisé (les budgets militaires ont augmenté de 6,8 % en 2023 atteignant 2 400 milliards de dollars), les zones d’influence sont de plus en plus disputées dans ce monde en crise profonde, le nationalisme et les extrêmes droites se renforcent.
Agir, vite et fort
Il y a donc urgence à ce que les solidarités internationales s’expriment de façon militante. Dans les universités du monde entier, dans les entreprises, aux élections européennes, tous les lieux d’intervention seront utilisés pour faire face au massacre en cours.
Il y a urgence à ce que notre mobilisation trouve un second souffle pour reconstruire des mobilisations de masse, capables de faire peur à nos dirigeants. Boycotter les produits et les entreprises qui collaborent, manifester, construire des collectifs de base, organiser des réunions de formation et de mobilisation sont nos tâches élémentaires. À cela s’ajoutent des discussions stratégiques sur la construction du mouvement : nous avons besoin de combiner, d’une part, une compréhension fine des enjeux de la situation, du rôle de l’impérialisme, de la nature du sionisme, de la nécessité d’une révolution régionale pour rejeter Israël, mais aussi les gouvernements arabes qui sont complices de la colonisation et des massacres et n’hésitent pas à réprimer leurs propres populations, avec, d’autre part, un mouvement large, très unitaire, pour arrêter les massacres et la répression, capable donc de compromis avec des forces avec lesquelles nous pouvons avoir de grands désaccords.
Construire une grande contre-offensive internationale, mobiliser les quartiers populaires, reconstruire une conscience de classe, internationaliste, faire face au racisme et au fascisme, contre les impérialistes, endiguer le développement du militarisme, tels sont les enjeux de la situation.
Le 27 avril 2024
Antoine Larrache est rédacteur d’Inprecor et membre de la direction de la IVe Internationale et du NPA.
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